Houssaine Ouâchrine n’est pas né dans la dernière couvée. Et pour cause. C’est un homme qui a roulé sa bosse, pendant des années, sur le terrain de l’engagement et du militantisme amazighs. Originaire du Moyen Atlas, cette région frondeuse qui en a fait voir de toutes les couleurs à tous les colonialistes, il connaît le mouvement culturel amazigh ( MCA) comme pas un. Dans cet entretien fleuve, Dda Houssa évoque son enfance heureuse, sa longue vie de militant, et, fidèle à son franc parler qui le caractérise tant, il n’hésite pas à pointer du doigt les nombreux ennemis de l’amazighité qui usent et abusent, lâchement, des moyens de l’État pour l’enterrer vivante.
Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelqueslignes ?
Oui, me présenter, je ne peux être qu'amazigh puisque je suis marocain. Cosmopolite aussi par l'altérité qui est la culture millénaire de l'amazighité mère et mère adoptive de tous au sein du Tamazgha occidentale où cohabitent amazigh achlhi, amazigh du Maroc central, amazigh aârabe, amazigh ouday, amazigh arifi. Et ces substrats essentiellement amazighs sont les vecteurs de stabilité et de paix que nos politiques s'évertuent à vouloir disloquer par la marginalisation volontaire du tamazight. J'ai préparé un bac littéraire vers les années soixante que j'ai raté à cause d'autres préoccupations. Je suis un chercheur libre, auteur de divers récits, poésies, publications, particulièrement des articles où l'information du lecteur est primordiale.
Vous êtes dans la soixantaine, est-ce que vous pouveznous raconter vos souvenirs d’enfant baignant totalement dans le monde unique de l’amazighité…
En effet, j'ai soixante cinq ans, ma date de naissance remonte à « asggwas n lbun » ( l'année du bon) du rationnement pendant la crise de 1945. Jusqu'à dix huit ans, comme tous les Amazighs montagnards, du moins ceux de ma génération, nous ignorions tout du monde dit arabe. Les arabophones qui venaient d'autres régions travailler dans le Moyen Atlas intégraient naturellement ces hauts et nobles milieux, apprennent, parlent et chantent en tamazight, épousant même des femmes amazighes. Comme il arrivait aux Amazighs de prendre femmes parmi leurs filles. J'aimerais citer si cela n'encombre pas votre temps, l'histoire d’un homme arabophone de Missour, Région de Taza que j'appelais Epile car je balbutiais encore en déformant son nom Lafdel. Venu très jeune, mon père le maria plus tard à ma tante Itto, « iwta ahdjam » il a " frappé " comme on dit le dos de sa main d'un charmant « ahdjam » (tatouage) amazigh, il dansait ahidous, il m'a appris même tamazight et le dialecte arabe de l’Oriental marocain fort méprisés à ce jour par les TV marocaines. À cette époque, la langue amazighe est tellement quotidienne, naturelle, parlée de tous ; il était superfétatoire de se demander si l'on était amazigh, arabe ou juif. L’amazighité accompagnait le lever des matins et rendait vivace la vie des êtres et des choses le long des soirées. Toutes les populations des « idurar » (hautes montagnes) se retrouvaient dans les us et coutumes que versaient chaleureusement dans leur cœur cette poésie divine qu'inocule à la mémoire le langage amazigh. Et même les mauvais prêtres de l'Islam, les « tolba » charlatans sur lesquels j'avais publié dans le journal Tawiza un article-analyse n'ont pu effacer l’amazighité de son ciel et de sa terre car elle était et demeure l'âme de la plus belle cosmogonie de l'Afrique: le haut pays qui va du Rif, les Atlas et jusqu’au-delà du pays du Souss et même jusqu’aux confins sahariens. Je me souviens aussi des « chorfa » alaouites de l'époque qui venaient dans notre maison pendant le « ârafat », la journée précédant l'aîd Sghir. Ils clamaient des chants religieux en tamazight à la mémoire du prophète Mohamed. Je me souviens encore de certains passages bien gravés dans ma mémoire :
A tilghmin tumlilin ttawinin abrid i.
Daâunt s mohamed ad ibllegh Rabbi lmeqsoudine ,Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelqueslignes ?
Oui, me présenter, je ne peux être qu'amazigh puisque je suis marocain. Cosmopolite aussi par l'altérité qui est la culture millénaire de l'amazighité mère et mère adoptive de tous au sein du Tamazgha occidentale où cohabitent amazigh achlhi, amazigh du Maroc central, amazigh aârabe, amazigh ouday, amazigh arifi. Et ces substrats essentiellement amazighs sont les vecteurs de stabilité et de paix que nos politiques s'évertuent à vouloir disloquer par la marginalisation volontaire du tamazight. J'ai préparé un bac littéraire vers les années soixante que j'ai raté à cause d'autres préoccupations. Je suis un chercheur libre, auteur de divers récits, poésies, publications, particulièrement des articles où l'information du lecteur est primordiale.
Vous êtes dans la soixantaine, est-ce que vous pouveznous raconter vos souvenirs d’enfant baignant totalement dans le monde unique de l’amazighité…
En effet, j'ai soixante cinq ans, ma date de naissance remonte à « asggwas n lbun » ( l'année du bon) du rationnement pendant la crise de 1945. Jusqu'à dix huit ans, comme tous les Amazighs montagnards, du moins ceux de ma génération, nous ignorions tout du monde dit arabe. Les arabophones qui venaient d'autres régions travailler dans le Moyen Atlas intégraient naturellement ces hauts et nobles milieux, apprennent, parlent et chantent en tamazight, épousant même des femmes amazighes. Comme il arrivait aux Amazighs de prendre femmes parmi leurs filles. J'aimerais citer si cela n'encombre pas votre temps, l'histoire d’un homme arabophone de Missour, Région de Taza que j'appelais Epile car je balbutiais encore en déformant son nom Lafdel. Venu très jeune, mon père le maria plus tard à ma tante Itto, « iwta ahdjam » il a " frappé " comme on dit le dos de sa main d'un charmant « ahdjam » (tatouage) amazigh, il dansait ahidous, il m'a appris même tamazight et le dialecte arabe de l’Oriental marocain fort méprisés à ce jour par les TV marocaines. À cette époque, la langue amazighe est tellement quotidienne, naturelle, parlée de tous ; il était superfétatoire de se demander si l'on était amazigh, arabe ou juif. L’amazighité accompagnait le lever des matins et rendait vivace la vie des êtres et des choses le long des soirées. Toutes les populations des « idurar » (hautes montagnes) se retrouvaient dans les us et coutumes que versaient chaleureusement dans leur cœur cette poésie divine qu'inocule à la mémoire le langage amazigh. Et même les mauvais prêtres de l'Islam, les « tolba » charlatans sur lesquels j'avais publié dans le journal Tawiza un article-analyse n'ont pu effacer l’amazighité de son ciel et de sa terre car elle était et demeure l'âme de la plus belle cosmogonie de l'Afrique: le haut pays qui va du Rif, les Atlas et jusqu’au-delà du pays du Souss et même jusqu’aux confins sahariens. Je me souviens aussi des « chorfa » alaouites de l'époque qui venaient dans notre maison pendant le « ârafat », la journée précédant l'aîd Sghir. Ils clamaient des chants religieux en tamazight à la mémoire du prophète Mohamed. Je me souviens encore de certains passages bien gravés dans ma mémoire :
A tilghmin tumlilin ttawinin abrid i.
Ô chamelles banches qui cheminez,
Priez au nom du prophète pour que s'accomplisse ladestinée.
Adday nini Nnbi ig ulli nwu a lmxaliq,
A mmi qqenx alf usddi ghas têaâllucin.
Quand je Nabi, comme si j'ai attelé
Mille cordes rien que des agnelettes.Adday nini nnbi ig wulinwu a lmxaliq,
A mmi d gerx ahdadi g its imnayn zillin
Quand je prononce le nom du prophète,
Comme si j'ai jeté mon étalon dans une troupe de beaux cavaliers.
Et quand est-ce que vous avez pris conscience qui menacent cette amazighité débordante devie ?
Il faut plutôt parler de la prise de conscience du racisme culturel ! A partir de la moitié des années soixante, l'orientation politique des ministres du parti de l'Istiqlal qui se sont succédé à la tête du Ministère de l'éducation nationale était tout sauf nationale. Ils étaient et demeurent toujours les obsédés de l'arabisation systématique du peuple. Ils avaient appliqué la "fatwa" du prétendu penseur philosophe Al-Jabiri :"L'arabisation même à coups de bâton". Cette arabisation massive du peuple n'allait pas sans provoquer la réaction des intellectuels amazighs. À l'époque, le parti de l'Istiqlal faisait la pluie et le beau temps et travaillait sur tous les moyens et clichés pour dissuader, emprisonner, interdire, discréditer... tout ce qui avait rapport à l'amazighité. Des rumeurs, des accusations, la propagande intimidante née du "dahir berbère", dont les Amazighs ignorent tout et que ledit parti leur colle au dos. Une diffamation historique qu'aucun parti n'a dénoncée de façon sérieuse auprès des instances supérieures... Ces partisans d'outre-monde allaient jusqu'à faire du tamazight, injustement, un facteur d'éclatement et de balkanisation du Maroc. Heureusement qu'aucune communauté amazighe ne se trouve en Irak, en Palestine, sinon elle serait le bouc émissaire des arabo-islamistes qui triturent sanguinairement les pauvres peuples de cette région,qui charrie comme le poids sinistre d'un péché originel. La prise de conscience venait des pionniers qui avaient même été condamnés à des peines comme notre regretté Ali Azaykou qui a passé plus de deux ans d'incarcération et mort des séquelles d'une maladie contractée dans la prison. Enfin le mouvement culturel amazigh prenait forme, évoluait, l'information circulait et la société civile amazighe se développait. Puis venaient les revendications toutes légitimes qu'allaient présenter aux différents gouvernements les confédérations associatives et le Congrès Mondial Amazigh (CMA). Les arguments sont forts, prégnants et éclatants de vérité car puisés dans l'histoire, l'archéologie, les traditions, la culture, la civilisation et bien entendu la langue. Ma prise de conscience de l'amazighité est une réaction spontanée caractérisant tout être humain blessé dans sa dignité par la manipulation, le mensonge et la déformation des vérités historiques par des gens, marocains malheureusement, que rien ne lie avec le monde qu'ils habitent imaginairement et celui où ils vivent réellement. Des fers de lance d'un arabisme de pays lointains qui n'ont aucune ressemblance avec l'Occident amazigh africain, pis encore ils s'obstinent à injecter dans la mémoire du peuple une civilisation et des traditions étrangères à sa nature humaine et la nature physique de son pays. Durant le demi-siècle d'indépendance qu'a vécue le Maroc, le tamazight naguère présent dans tous les espaces populaires a connu un traitement fallacieux, surtout une programmation sournoise qui allait causer sa marginalisation. Une situation aggravée par l'indifférence des politiques arabophones et amazighophones que dominent un lobby arabiste militant qui prône sans faillir un messianisme entêté où même l'Islam sert de support à sa vision raciste et dangereuse pour la stabilité et la paix des peuples de l'Afrique du Nord. Nous en sommes aujourd'hui à une prise de conscience nationale qui interpelle le peuple marocain dans toutes ses composantes par cette question : Le Maroc étant un royaume souverain mais les théoriciens activistes de l'arabisme acharné veulent le réduire à un couloir servant de convergence aux idéologies arabo-islamistes qui plantent déjà leurs bases de relais sous forme de pôles d'investissement. Une sorte de postes avancés pour finalement prendre d'assaut l'Occident européen, se servant ainsi du vieil empire qui jouera le simple rôle de zone passerelle, le pont de ce panarabisme même qui a accouché de l'islam politique puis de l'islam intégriste et jusqu'au bout de son négativisme hystérique d'où sortit l'enfant terrible : le terrorisme. Ce maître désenchanteur de ce siècle dont le germe-mère fut le système oppresseur arabiste exclusiviste. Pis encore, ce qui est révoltant chez nos gouvernants et politiques ou arabes ou amazighs, c'est cette attitude aberrante envers une histoire écrite du sang de glorieux héros dont ils ramènent le passé tourmenté au statut de mercenaires corvéables. Sans aller loin dans l'histoire, j'évoque simplement l'instance Équité et Réconciliation qui se montra d'une prévarication ignoble. Il traita la tourmente du Maroc à partir des années cinquante tout en passant sous silence les guerres patriotiques que menaient contre l'occupation les montagnards amazighs du Rif, des Atlas, du Souss, des Aït Baâmrane, du Sahara, etc. Personne de ces braves gens ne put se représenter à l'esprit qu'une patrie est faite d'un corps et d'un esprit. Alors, nos justiciers firent fébrilement preuve d'une myopie ridicule que l'histoire ne leur pardonnera jamais. Ils ont évoqué les troubles d'esprit et mirent dans le trou de l'oubli le corps de la nation que défendaient le peuple de 1896 à 1936, des guerres sanglantes ayant emporté près d'un million de martyrs ! Je ne sais finalement si je suis militant ou ce genre de Diogène criant et dénonçant haut ratage ( tazggalt) qui semble devenir une seconde nature chez les responsables marocains.
Après cette prise de conscience des dangers terribles qui menacent le peuple et la culture amazighs, vous vous êtes certainement engagé sur le terrain du militantisme, n’est-ce pas ?
Prise de conscience des dangers menaçants dites-vous ? Mais en plus de l'assaut terrible et permanent il y a pire, il y a ce prosélytisme messianique qui rappelle les époques médiévales et qui opprime les consciences et les libertés par l'intermédiaire des mass médias et des autorités publiques. Des associations interdites, des noms amazighs interdits, un parti amazigh interdit, l'enseignement et la reconnaissance de la langue amazighe ne dérange en rien la conscience de nos gouvernants et frères en islam par-dessus tout ! Ce prosélytisme arabo-islamiste mercantiliste est affligeant en ce qu'il distille quotidiennement son fiel dans des abcès que les responsables n'ont pas essayé à cureter par une thérapie appropriée et qui n'est autre que Dame Démocratie que déforment des esprits rétrogrades. Une tare dommageable à l'essor socioculturel du Maroc qui charrie de graves séquelles depuis les années soixante qui augurèrent du manque d'une vision claire pour les Imazighen. Situation qui motiva les pionniers de la défense de la cause amazighe qui commençaient à organiser leur action revendicative.
Est-ce que vous nous faire un petit rappel de la genèse du mouvement amazigh ?
Les années soixante sont une date repère de la société civile amazighe avec M. Brahim Akhayat qui fonda vers l967 en collaboration avec d'autres militants l'Association AMREC qui devint un catalyseur de nombreuses associations à l'échelle nationale. Je n'ai pas les dates exactes mais l' historique du mouvement associatif amazigh s'est généralement déroulé comme je vous le présente mais j'avoue que bien des choses m'échappent. Après l'AMREC, venait l'association Tamaynut que dirigeait Maître Id Belkacem qui est présentement responsable dans l'Organisation pour la Défense des Peuples Autochtones. Il faudra préciser que Tamaynut qui est une confédération compte à présent plus de trente associations dont certaines sont implantées dans des pays étrangers, ex. Tamayut Hollnade... L'association Ghris a été créée par la suite chez les Igulmimen (Goulmima), prenant par la suite le nom hautement symbolique de Tilelli. Notons au passage, que Tilelli est une véritable étoile prophétique qui concourut par son boycott historique de la langue arabe à secouer bien des tabous en ravisant la conscience amazighe. Après Tilelli, la ligue Tada a été fondée, elle coiffe plusieurs associations du Sud Est et du Moyen Atlas ; puis arrivait la Coordination Amiafa qui regroupe plusieurs associations du Rif, du Moyen Atlas et du Sud. Il y a aussi la Coordination Amazighe du Rif qui compte plusieurs dizaines d'associations. Il y a la Coordination qui prit le nom de l'auguste Azaykou où se retrouvent plusieurs associations du Haut Atlas et du Souss. Il faut rappeler cette aberration absurde, le fait que la plupart des ONG énumérées n'aient pas obtenu leur reçu les autorisant à accomplir « citoyennement » leur mission. À titre d’exemple, l'association du Réseau amazigh pour la citoyenneté pour la Citoyenneté, créée depuis sept ans et qui n'a obtenu son reçu qu'en 2OO6 (??!!) L'un des événements historiques qui a couronné l'action militante des associations amazighes fut l'institution à Agadir de l'Université d'Été en 198O.
Ensuite…
En l999, le Professeur doyen M. Chafik et d'autres militants dont Maître Adgherni et le Professeur Ajaâjaâ ont rédigé le Manifeste amazigh. Alors qu'ils avaient convoqué une assemblée générale au Complexe de Bouznika, et au moment où les membres convoqués allaient se réunir, l'assemblée fut interdite par les pouvoirs publics. Les travaux de l'assemblée se sont déroulés au domicile de M Chafik. En 2OO6, ce grand réseau d'associations implantées dans tout le Maroc s'est enrichie de la Ligue des Droits Humains Amazighs présidée par notre dynamique frère Ounghir Boubker. Il faut également rappeler la création depuis près de trois ans d'un parti Politique nommé PDAM (parti démocratique amazigh marocain). Une organisation originale et dynamique qui a été formée par les jeunes étudiants originaires du Sud Est, Imdeghren( Errachidia), Ouarzazate, Zagora, le Souss, le Rif... Son objectif est la lutte contre tous genres de discriminations. Il y a le CMA, le Congrès Mondial Amazigh qui a reçu l'adhésion de grandes coordinations liguées et d'associations indépendantes. Cette ONG très dynamique par la persévérance du Président actuel Lounès Belkacem est l'ambassadrice du monde amazigh à l'échelle internationale. Le CMA intervient auprès des instances onusiennes pour toutes les questions amazighes et organise des assemblées où sont élues démocratiquement ses instances. Le CMA est le porte-parole du peuple amazigh d'Afrique et des Canaries. Il organise des séminaires sur tous les problèmes que vivent Imazighen en ce qui concerne leur patrimoine : terres, culture, langue, civilisation et histoire travaille sur les dossiers de revendications. Et l'on ne pourrait pas oublier l'Association Tidaf qui a porté plainte contre le Minisère de l'Education Nationale pour les discriminations contre Imazighen à cause des programmes qui faussent leur histoire et discréditent l'amazighité en général. Un plainte suivie d'une pétition signée par des centaines de Marocains. Je me souviens de l'une des réponses du Ministre de l’Éducation : « Les Marocains n'ont pas le droit de poursuivre leur État ». En voilà une extrapolation monstrueuse quand on veut volontairement fuir ses responsabilités. M. Malki, au lieu de concerter, analyser, faire reprendre des programmes qui l'aurait indigné lui-même en tant que marocain de par les entorses graves qu'ils cumulent, notre Ministre s'est calé le dos contre la muraille de l'État comme si ceux là qui se sont plaint ne relevaient pas de l'État. Après cette brève et douloureuse rétrospective sur le militantisme amazigh et ses diverses composantes, nous ne pouvons que saluer admirablement tous ceux qui participent dignement, de près ou de loin à élargir pour notre pays la voie de la démocratie. D'ailleurs, ce sont là les points magistraux autour desquels se focalisent les revendications amazighes, des objectifs auxquels doivent souscrire tous les Marocains, femmes et hommes intègres, jaloux de leur marocanité avant tout et imbus de principes d'équité et fiers de leur pays le Maroc, royaume millénaire. Dans l'ensemble, les organisations civiles amazighes revendiquent l'officialisation de la langue amazighe, la révision de l'histoire, l'autonomie régionale fédérée, des académies indépendantes des études amazighes, la laïcité qui n'est aucunement contre ni le régime monarchique ni contre la religion qu'elle protège d'ailleurs comme dans les monarchies européennes.
Ne pensez-vous pas que les acquis du mouvement amazigh sont on ne peut plus maigres ? Excepté l’IRCAM ( l’Institut royal de culture amazighe) qui reste, malgré les dénégations répétitives de M. Boukous, une institution chaque jour enchaînée si ce n’est carrément sans efficience aucune, le mouvement amazigh ne doit-il pas changer de stratégie ?
Oui, par cette question, vous avez cerné la situation tragique du tamazight avec en parallèle la comédie des systèmes marocains, gouvernants et politiques. Comme je vous l'ai dit précédemment, les Imazighen sont excédés par le poids des attentes qui a trop pesé sur leur avenir et sur leur existence même. Et les réponses inappropriées à ces attentes forment un énorme cumul d’un inachevé se prolongeant dans le provisoire. En fait, un éternel report dû à la mauvaise volonté du système que gangrène un réseau de responsables en perpétuelle lévitation, planant au-dessus des réalités nationales qui sont, elles, partout palpables et visibles sur la face des êtres et ancrées dans leurs milieux terrestres. Un tout viscéralement et physiquement constitué, une clarté qu’agressent et s’évertuent à obscurcir des papillons produits de mythes fantaisistes que la science a brûlés et finira par faire disparaître. Et là, tout Marocain sensé est confronté à l'amère réalité quand on évalue le douloureux parcours du tamazight. Déjà, dans une déclaration que Mahjoubi Aherdane a faite quelque part, feu Hassan II lui avait répondu vers les années soixante-dix : « Aherdane, parle-moi du tamazight dans vingt ans". Une lapalissade hâtive commune aux hommes très sûrs d’eux mais reprise narquoisement par Abbès Elfassi en 2OO6 : "Il faut attendre dix ou vingt ans pour constitutionnaliser ou enseigner tamazight. » Nous sommes en 2OO7, et en cette fin du mois de février, Mhand Lenser, a cyniquement déclaré lors d'une émission de 2 M : « Pour moi, le tamazight doit d'abord être présent dans tous les secteurs avant son officialisation. Notre parti lui a réservé la place qui lui revient dans son programme... » L’on ne pourrait taire la contrariété révoltante que suscite ce défaitisme béat du populaire agriculteur officiel marocain, de la perfidie de Abbès le conservateur d’une noblesse sans armoiries si ce n’était la conquête d’une île orientale arabe dite Najat qui mit en déconfiture des milliers de foyers qui crurent à sa découverte, et d’Aherdane l’Amazigh jaloux de son arabité tel qu’il en faisait sa litanie face à Abbès qui n’a jamais été visité par une telle vertu pouvant lui faire dire : « Je suis vandalou mais jaloux de mon amazighté.» Je rappelle aux férus « homonymistes » qui mêlent par idiotie l’Andalousie au monde arabique qu’historiquement « Andalousie » s’appelait « Vandalousie ». C’était grâce à la coalition des souverains vandales et amazighs que la civilisation impériale gréco-romaine a périclité et que nous ne fumes point romains. Oui, Aherdan qui aurait pu être candidat au Panthéon amazigh s’il eut simplement boycotté un système politique qu’il avait toujours cautionné, et à une époque où son mouvement était présent dans les plaines comme dans les montagnes. Et toute la cohorte de partis politiques marocains excepté les nouveaux, présentent également les mêmes inepties visionnaires : libéraux, populaires, socialistes, islamistes, ils s’engouffrent chacun selon un étrange grégarisme qui lui est indiciaire et spécifique dans son pôle. Et comme tout ce monde se retrouve dans une physionomie spatiale que départagent trois tendances qui charrient par le jeu des coalitions complices des dizaines de formations sous-jacentes, l’ensemble matérialise un triangle hybride et abstrait où tous cohabitent en appliquant, par une complaisance vulgaire face aux urgences nationales, la nouvelle règle du bon équilibre et du bon voisinage : observer le politiquement correct. Et le grand perdant dans toutes ces théories ambulatoires de visionnaires impotents, fuyant leur devoir envers la nation, la grande perdante et martyrisée n’est autre que le tamazight qui perd le long des décades que durent ces atermoiements et ces spéculations sournoises d’importants pans de ses contenus culturel, spirituel et patrimonial qu’aggravent des dévidoirs massifs et permanents d’une arabisation provocante devenue le dragon hégémoniste au service du wahhabisme pétrolier depuis les années soixante. Années qui virent des centaines de missionnaires salafistes s’implanter dans le Tamazgha qui allait voir disparaître quelques années plus tard même son autre nom neutre : Maghreb, devenant Al-Maghreb Al-Arabi, appellation berçant un fond plus politique que territorial. Au Maroc, tous les partis politiques adhérèrent à ce parti des partis : populaires, libéraux, socialistes et même les « alems» (savants) théologiens et les islamistes ne purent dénoncer un tel « munker » (sacrilège) flagrant : faux témoignage. Et certaines personnes de ce beau monde étaient prébendées par le dictateur sanguinaire Saddam, recevant leur part de royalties pour propager la pensée unique arabo-baâthiste dont l’objectif initial inavoué était d’émousser et déprécier l’islam amazigh ou maghrébin. Mais le retour de manivelle fut cruelle quand l’arabo-baâthisme accoucha de son destructeur endogène, l’Islam politique d’où allait surgir l’autre branche dont l’ancêtre proche fut le nationalisme panarabe, l’intégrisme terroriste qui allait meurtrir la patrie longtemps immunisée par la mémoire du héros amazigh de Noumidia «l’Algérie », Youguerten (Jughurta). Enfin, une lueur parvint à échapper aux ronrons inintelligibles des épaisseurs idéologiques qui sont la cause du désenchantement amazigh. Une trouée s’opéra dans la nébuleuse opaque que pompait à gros débits les pétroliers proches orientaux arabistes, instables janissaires des impérialismes anglo-saxons et qui brouillaient des années durant les chemins historiques que rêvait de retrouver l’amazighité fraternelle de l’Afrique du Nord .
Et l’IRCAM fut…
En effet, ce fut en 2OO2 que le jeune souverain Mohamed VI a institué l’IRCAM. Ce fut à Ajdir que le discours royal a été prononcé à l’occasion de l’annonce de la création de cette Institution. Un événement qui fit date dans les annales de l’histoire du Royaume. Les hauts commis de l’État, les parlementaires, les partis politiques et les représentants de la société civile, en costume national immaculé se retrouvèrent ce jour-là à Ajdir. Les applaudissements des dignitaires de l’élite nationale pourraient être assimilés à un haut hymne à la mémoire des martyrs montagnards amazighs puisque à quelques kilomètres d’Ajdir, jouxtant la violette Khénifra, se trouve le vaste cimetière des héros ayant résisté contre les armées françaises et qui porte le nom évocateur de l’une des fabuleuses batailles amazighes en 1914 : Elhri. Ironie du sort, la même année, les premiers lycées furent construits à Fès et à Rabat et portent à ce jour les noms de Moulay Idriss et Moulay Youssef. Établissements revendiqués au protectorat par les notables de ces villes. Et les notables de Fès n’eurent point le sentiment solidaire et déclamer le « latif » contre le cruel génocide de leurs frères « Al-Barabir » comme ils l’eurent fougueusement chanté trente ans plus tard alors que le collège berbère d’Azrou venait à peine d’avoir trois ans d’existence en 193O. En cette même année, une cinquantaine de cadres de Fès et de Rabat formaient la première promotion venant de prestigieux établissements allaient façonner le destin disloqué du pays. Les 18 premiers partirent dans une longue et généreuse excursion pour découvrir les Lumières de l’hexagone et les nobles familles de France les recevaient comme les éclaireurs du nouveau Maroc de Moulay ou Sidi Lyautey comme le rapportent les rares chroniques sur ces sombres époques où se tramaient déjà de perfides complots contre l’amazighité et ses principautés du Rif au Sahara. L’aréopage national, après son pèlerinage à Ajdir où le grand air montagnard pouvait pourtant purifier les esprits et laver des poumons saturés de glaire noire ayant atteint le degré intolérable après cinquante ans de marginalisation et d’oubli de l’amazighité, et dès l’annonce de l’IRCAM, les Imazighen vivaient comme la joie d’enfants qui veillaient pour recevoir à leur réveil de merveilleux cadeaux offerts par notre Mère Marocanité rajeunie pour affronter un nouveau destin qui devait, par-dessus tout, être son immanence créatrice et mobilisatrice. Le boycott sournois contre le tamazight qui devait être dissout et brisé par l’ « agraw » d’Ajdir qui catalysa une intensité émotionnelle digne du vaillant peuple marocain n’a pu décrisper les mentalités asséchées qui reprirent leur adversité effrontée au lendemain même de la rencontre historique qui vit naître l’IRCAM. Un jour à peine après la promulgation d’Ajdir, je lisais dans le journal « le Matin du Sahara » l’appel fébrile d’un monsieur pour la création d’un organisme chargé de la protection de la langue arabe ! Dans les coulisses des partis pompeusement nationaux et démocratiques, on faisait circuler que l’IRCAM n’était pas une institution nationale mais une initiative royale… makhzénienne. Que peut-on penser de ces rumeurs et propagandes venant des rangs de leaders qu’on voit se courber et baiser révérencieusement la main du Roi, alors que parmi la base de leurs partis, des frondeurs dévalorisent l’importance et l’objectif de l’Institut en question ? À l’enthousiasme d’un jour vécu à Ajdir succédaient l’ineptie des décideurs et la léthargie multiforme qu’on connaît. Négligence, mauvaise volonté, manigances, en résumé, une toile de manipulations se tissaient sur la voie et asphyxiait la voix de l’IRCAM. Les gouvernants et les responsables politiques devinrent de simples déserteurs de la haute cause nationale tout en portant des masques de faux partenaires. Encore une fois, le grand rendez-vous avec l’histoire est manqué par l’élite politique marocaine, celui de la réconciliation et du grand balayage des frustrations socioculturelles amazighes. Et si une réelle volonté politique animait tout ce beau monde, et dans un premier temps, les Ministres de la Justice, de l’Éducation Nationale et de la Culture ainsi que les autorités se trouvant dans les régions spécifiquement amazighophones auraient été naturellement permutées ou remplacées pour des raisons nationales impérieuses. Ce fut donc cet esprit nouveau pour un authentique renouveau qui devait naître de la fondation d’un IRCAM en tant que déclencheur innovateur. Il faut aussi mettre l’accent sur le fait que l’IRCAM à lui seul ne pourrait faire face au vaste océan qu’est la culture amazighe, et les gouvernants ainsi que les détracteurs de projets nationaux amazighs en sont conscients comme s’en réjouissent les ennemis des droits humains et particulièrement du droit des enfants à l’enseignement dans leur langue maternelle. L’IRCAM ne pourra gérer à lui seul le tamazight et l’amazighité, et je dirais même qu’il fait figure de moribond face aux puissants supports de la langue arabe qui engloutissent d’énormes budgets en plus des matraquages médiatiques par le biais des médias, les TV en particulier. En général, le tamazight vit de plus en plus de problèmes ardus ; ne bénéficiant d’aucun support publicitaire, ne faisant pas l’objet de campagnes de sensibilisation dans les espaces publiques ou dans les mosquées, elle ne pourra donc évoluer que dans une voie étroite où tombent sans cesse des pavés qui l’entravent. Serait-ce dû au mauvais démarrage de l’IRCAM ? Ne connaissant pas les structures de cet Institut, je peux cependant parler d’un constat personnel et pertinent. Il n’y a pas d’annexes de l’Institut à l’échelle de chaque région pour servir de réceptacles naturels aux langages, lexiques, toponymes, en général collecteurs de patrimoines oraux pour pouvoir les valoriser. Donc, sur le territoire du royaume, l’IRCAM est absent alors qu’il devait être décentralisé afin de pouvoir intervenir dans des zones géographiques montagnardes et de hauts plateaux où la langue, la culture et les traditions amazighes gardent toujours leurs fraîcheurs mais qui risquent en même temps de céder à la longue aux épreuves du temps ou dénaturées par le tourisme mercantiliste qui prend d’assaut ces hauts trésors patrimoniaux. L’IRCAM saura-t-il en assurer la sauvegarde et les préserver contre le vandalisme de marchands qui en ignorent la valeur ? Alors sur le terrain, seules les associations peuvent encore défendre le tamazight en multipliant leurs réseaux transversalement pour bâtir les grands pôles fédérés qui peuvent reprendre les noms des grandes confédérations historiques amazighes pour à la fin pouvoir adopter le boycott civil et civique de toute action ou projet méprisant l’amazighité.
Quelle solution proposez-vous donc ? Car il ne faut pas se leurrer, le régime arabiste marocain n’a et n’aura jamais aucune envie de promouvoir une culture amazighe qui n’est pas la sienne, qu’il considère comme totalement étrangère. De plus, les Amazighs sont on ne peut plus fatigués d’attendre indéfiniment en voyant leur culture se faire détruire sous leurs yeux .
Je pense personnellement que l’arabo-baâthisme que vous citez et qu’évoquent fréquemment certains militants Imazighen n’a plus l’emprise qu’il avait sur certains régimes proche-orientaux. Il ne peut non plus prédominer dans le Tamazgha qui est africaine et qui l’a toujours ignoré et même dénigré indépendamment du courant utopiste minoritaire où se retrouvent quelques partis dont la majorité des adeptes n’épousent pas d’ailleurs ce genre de passion grégarienne morbide. Mais ce courant, bien que minoritaire a pu manipuler et imposer au Maroc des orientations que le peuple paie fortement et en subit les conséquences désastreuses. Il n’y a qu’à rappeler les ministres qui se sont succédé depuis l’indépendance du Maroc à la tête de départements stratégiques et vitaux telles que l’Éducation Nationale, la Culture, la Justice…et qui sont tout à fait étrangers à la culture et à la civilisation nationales qui sont tout à fait amazighes. Pire encore, ces responsables n’ont eu à aucun moment la volonté ni le devoir de s’imprégner des valeurs nationales pour comprendre les traditions et la langue du pays auquel ils se disent appartenir. Ainsi s’en allait-il de ces ministères qu’ont dirigés des responsables promoteurs arrogants d’une arabisation outrancière que pulsait la pensée unique arabo-baâthiste. Ces responsables se sont comportés en véritables maquignons flibustiers qui méprisent le peuple marocain libre et fier en le prenant pour un troupeau qu’ils s’acharnent à incorporer dans un Porche-Orient arabe qui en est l’opposé par sa nature géographique, archéologique, sociologique… L’arabo-baâthisme est ce serpent que prenaient pour un dragon des peuples arabes qu’accable cette honte qui les frustre à cause des déboires du panarabisme charrieur de graves ratages et de lourdes séquelles à tous les niveaux : guerres perdues contre Israël, absence de démocratie, mépris des peuples, étouffement et asservissement de la femme etc.… Alors ce serpent des sables est mort là où il se lovait mais sa queue tressaute encore avec les derniers soubresauts qui font encore vibrer quelques fans qui en étaient les charmeurs, pas les charmeurs de serpents de Marrakech. L’arabobaâthiste est l’un de ces hoquets qu’a toujours poussés l’histoire dans la hâte de ses sombres méandres ; il y eut le nazisme, le stalinisme, la « qawmajia » dite arabobaâtisme… enfin des hoquets bruyants certes mais finissant par disparaître car nés d’une fatalité contre-nature. Donc l’arabobaâthisme marocain qui n’est même pas de ces hoquets dont j’ai parlé ne saurait émousser ni arrêter cette plongée intérieure qu’opèrent les peuples qui refusent l’assimilation et l’aliénation. C’était une denrée pour quelques marchands de chez nous qui en profitèrent lâchement et que l’histoire finira par déshonorer car le peuple marocain n’est plus dupe. Il y a qu’à écouter ses pulsions dans les places publiques et dans les cafés, je ne pourrais même pas rapporter les injures que profèrent par dégoût les Marocains contre les régimes arabes qui dansent derrière leur ménétrier d’une noce jamais célébrée, leur tuba échappatoire Amr Moussa, le président de leur horde dite arabe !. Souvenez-vous que les Palestiniens l’ont symboliquement enterrée plusieurs fois, et les Imazighen qu’ignore cette instance de dénégateurs ne peuvent que la conjurer. Mon cher Monsieur Oulhadj, en vous témoignant ma grande estime pour cette construction d’opinions combien édifiante, je voudrais dire que si les Imazighen ont horreur d’être assimilés à des peuples qui leur sont étrangers, il ne faudrait pas aussi oublier que les peuples arabes méprisent eux aussi ces totalitarismes fondés sur le mensonge, l’égoïsme, la discrimination raciale, la manipulation et j’en passe. Des intellectuels arabes loyaux ont dénoncé le panarabisme qu’ils ont qualifié de racisme, et les peuples du monde entier veulent seulement être eux-mêmes et vivre dignement. J’ai toujours évité d’employer « arabe » pour respecter justement les Arabes marocains qui sont judicieux et respectueux de tamazight et des Imazighen. Même ceux-là, illettrés que le système taxe d’analphabètes vous disent : « Nous et les Chleuhs sommes dans le même sac; si un côté bascule, c’est toute la charge qui tombe. » ( « hna ou chlouh f wahd chwari ; illa taht jiha, ghadi iteh koulchi ). Parole d’hommes arabophones marocains qui subissent le matraquage de l’arabisation forcée et son service parallèle appelé l’alphabétisation (mahw al-umiyya) qui n’est autre que le renforcement déguisé de l’arabisation, un rattrapage national dont des associations auraient dilapidé des centaines de millions et que couvre le parti de l’Istiqlal, qui supervise cet énième gros pactole comme il a toujours su en créer. Et si le système pour ne pas ressasser des fois à tort le terme d’arabe, si donc le système voulait manifester sa volonté déterminée de promouvoir la culture et la langue amazighes, il aurait alloué ces budgets énormes à des programmes populaires de sensibilisation et d’apprentissage du tamazight, et ces universités populaires auraient servi à ce travail de fond pour reformuler sur des bases solides la vision du renouveau du beau pays du monde, le Maroc que chantent superficiellement brochures touristiques et télévisions…Sûr que le système se moque des Imazighen ! Et c’est une flagrante et horrible violation des droits humains. En fait, un détournement et une falsification de tous les indices qui font qu’un peuple est peuple ; mais au lieu prendre conscience de ces graves faits, ce sont ces couvercles de sable que le système s’évertue opiniâtrement à coller au Tamazgha pour en étouffer les aspirations et en dénaturer le contenu : nation arabe, Maghreb arabe…des sigles de partis politiques distillant perfidement l’idéologie « aârbawiste » et qu’on étale comme de vulgaires toponymes sur la terre africaine amazighe. Contre toutes ces offenses que versent en permanence les organes étatiques dans le quotidien amazigh, ce genre de déprédation, de dénaturation, de falsification, seule l’union massive et démocratique des Imazighen peut constituer une solide barrière qui serait peut être à la Ghandi, une muraille pouvant repousser ces monstrueuses injures dont sont auteurs d’éternels blasphémateurs attitrés qui triturent même le sens de la logique des choses. Mais que pourraient avoir les arabistes avec la logique ? Descartes n’est ni saoudien, ni syrien quoique ce pays phénicien a vu naître dans sa ville de Maâra, le poète Aboulaâla Almaârri qui a légué au 1Oe siècle cette citation immortelle : « Le monde est divisé en deux. Il y a ceux qui ont une religion mais n’ont pas de cerveau et ceux qui ont un cerveau et n’ont pas de religion ». Hélas ! la pensée pharisienne arabiste ne relève ni de l’un ni de l’autre de ces variantes qui ont valeur d’apophtegmes. Les panarabistes communautaristes usent de tous les subterfuges mêmes sordides qu’ils érigent en morale. Et le Coran n’est pas épargné ! Ils affirment que l’arabe est la langue du Coran, et comme les syllogismes sont étrangers à la pensée unique arabiste, ils feignent ignorer qu’ils attribuent même à Dieu une origine arabe. Appliquons ce syllogisme à leurs humeurs qu’ils prennent pour des pensées : l’arabe est la langue du Coran, le Coran est envoyé par Dieu, donc Dieu est arabe ! Et la naissance de ce corps pouvant combattre l’absurdité des niveleurs en tout ne viendrait sûrement pas de l’IRCAM qu’organisent et orientent des responsables ignorant tout de l’amazighité. Je dois avouer en toute honnêteté que j’ignore tout de l’IRCAM, j’ai eu le plaisir de connaître M. Ahmed Assid et Mme Meryam Demnati au cours de quelques rencontres culturelles, deux personnes sympathiques qui ont publié des choses consistantes. Assid étant en même temps un poète qui encourage les rways du Souss. Mais je suis convaincu que l’IRCAM est incapable de promouvoir de façon générale et nationale tous les constituants civilisationnels et culturels amazighs. Coincé à Rabat, sans antennes ou délégations à l’échelle de chaque région spécifique, son activité est condamnée à végéter pour finalement ne réaliser aucun objectif d’envergure en plus des entraves que provoquent les départements qui sont pourtant ses partenaires : Ministère de l’Éducation nationale, médias et autres... Qui est derrière le marasme endémique que vit l’amazighité dans toutes ses composantes ? Seul le système est responsable d’une telle déroute. Ce n’est ni Boukous ni couscous ! Excusez-moi pour cette humeur car il est énervant de voir certains responsables de l’IRCAM se livrer à d’affreuses querelles byzantines alors que même le discours royal d’Ajdir n’a pu pénétrer des mentalités endurcies soit par la paresse soit par la prévarication. La solution est entre les mains de ces Imazighen qui attendent désespérément depuis déjà un demi-siècle de spéculations et de marginalisations. En un mot, un mépris grossier caractérisé envers leurs valeurs humaines et nationales. La solution est inévitablement dans l’autonomie régionale, base d’un État démocratique fort.
Votre dernier mot...
Mon cher Oulhadj, vous me demandez un dernier mot alors que je n'en suis qu'à l'exorde préambulaire des grandes vérités sur la hideur de la masse négativiste qui accable les Imazighen. Uda! Uda! Uda! Assez! Assez! Asse! De cette béate résignation. Les Imazighen doivent s'éveiller à l'arme redoutable des temps modernes: le boycott civique et civil ne serait ce qu'au nom de cette peau de chagrin qu'est leur statut de quart-citoyen , de sous –humanité que les arabistes officiels leur ont réservé alors qu'ils représentent les trois quarts du peuple marocain. Et que la lumière amazighe soit !!