samedi, décembre 23, 2006

Le journal Nichane: l'arroseur arrosé

Il n'y a pas si longtemps ce pendant arabophone de Tel Quel a fait un article d'une démagogie formidable sur le mouvement amazigh. Quelques-uns de nos militants sont accusés ni plus ni moins d'être des extrémistes. Pire, des intégristes identitaires même. D’après Nichane, ils sont pêle-mêle contre le roi, anti-islam, anti-arabe et un tas d'autres conneries du même genre. Un prodigieux travail fait de calomnies et de dénigrements. Dont on peut dire qu'il est à des années lumières de la plus simple des objectivités. Pour la déontologie journalistique, n'en parlons même pas. Mais comme toujours la vie peut cacher des surprises. De grosses surprises même ! Plus souvent malheureusement désagréables. Voilà le dit journal qui se fait taper sur les doigts pour exactement paradoxalement les mêmes accusations adressées aux Amazighs. Et ce n'est pas fini. Car dans son cas ça risque d'être terriblement chaud. En mal de cause depuis l'affaire des caricatures danoises ( en Palestine et en Irak, c’est plutôt des guerres fratricides entre musulmans), tous les extrémistes religieux et tous les bigots vont leur tomber dessus. N'en parlons même pas de tous les hypocrites qui vont se découvrir à cette occasion des vocations de défenseurs acharnés de l'Islam et du prophète. Ils sont d'ailleurs les premiers à monter au créneau. C'est vous dire...

vendredi, décembre 15, 2006

L’amazighité dans l’audiovisuel : une nécessité absolument impérieuse

S’il vous est arrivé, dernièrement, de jeter un coup d’œil sur les chaînes de télévision publiques marocaines, vous aurez certainement remarqué leur couverture du 5e festival du cinéma de Marrakech. Ce qui est tout à fait normal diriez-vous. Elles effectuent leur mission principale : l’information du public. Reste que d’emblée mon impression personnelle est qu’elles ont poussé le mimétisme aveugle, franchement pataud, des chaînes françaises à un point tel qu’elles en sont ridicules. Excusez mon indélicatesse, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’en rire. Qu’elles se distinguent un peu ! Qu’elles fassent un peu dans l’originalité !

Cependant là où c’est moins drôle, c’est lorsqu’on aborde le coût d’un tel festival et tout le faste clinquant qui l’entoure. Réunir le gratin du show biz mondial dans la capitale des Almoravides, ne se fait pas gratuitement. Il faut y mettre le prix fort. C’est à donner le tournis au plus sage des hommes. Car nous ne sommes plus dans des milliers mais facilement dans des millions de dollars US. Ce qui n’est pas rien, surtout pour un pays qui stagne désespérément et honteusement en bas de l’échelle de tous les classements mondiaux en terme de développement économique et social.

Mais une question, lancinante au demeurant, restera probablement pour toujours sans réponse : où trouve-t-on de telles sommes astronomiques alors que le prétexte du manque de moyens financiers est systématiquement brandi pour entraver toute accession de l’amazighité aux médias ? Reconnaissez que c’est quand même sidérant. Lorsqu’il s’agit de l’ouverture sur l’étranger, on met le paquet avec un zèle absolument extraordinaire. Mais une fois qu’il est question de l’amazighité, c’est la crispation, si ce n’est carrément de l’énervement. Au Maroc, malheureusement, et il faut se rendre à l’évidence, malgré les discours mielleux, le tristement célèbre principe de « tout sauf l’amazighité » reste encore et toujours malheureusement de mise. Jusqu’à quand ? Nul ne le sait.

En rapport avec le même sujet, un papier dégoté par le plus grand des hasards sur Internet a retenu particulièrement mon attention. Au-delà, et vous en conviendrez, de son titre pour le moins scandaleux - une chaîne amazighophone, pour ou contre ? -, ce sont les propos cités d’un certain Jamaâ Goulahsen que je trouve très inquiétants. Ce n’est pas n’importe qui ce monsieur. C’est lui en effet qui chapeaute le bulletin d’information amazigh qui va être lancé incessamment par 2M – si tout va bien. Que dit-il en substance ? Qu’une chaîne amazighe peut toujours attendre. Rien que cela. La priorité, selon lui, doit être exclusivement accordée aux chaînes généralistes arabes marocaines. Son argument, un peu suranné tellement qu’il revient souvent : les programmes pour une future chaîne amazighe risquent de manquer. Et là, je dois lui savoir gré de ne pas évoquer l’autre argument tout autant ridicule, si ce n’est plus : la mauvaise qualité qu’auraient les émissions amazighes.

À franchement parler, j’avoue que M. Goulahcen a mille fois raisons mais juste dans le cas des médias marocains. Qu’il ne s’en formalise pas, mais ils sont encore au stade de la préhistoire tellement qu’ils sont dépendants de la production étrangère. Autrement dit, ils ne sont pas le modèle à suivre. Dans tous les pays du monde où l’on a un minimum de fierté nationale et où le professionnalisme est de rigueur, la production locale est encouragée, mises en avant. Des quotas ont même été institués. Il faut impérativement les respecter au risque d’être pénalisé. Des sociétés de production du cru, rivalisant d’ingéniosité, sont créées pour justement apporter de la matière aux chaînes nationales et privées de leurs pays. Il faut bien dire ce qu’il y a : c’est une situation de laquelle le Maroc est à des années lumières. À titre de rappel, il faut savoir que même pour le doublage en arabe des dessins animés, il fait appel au savoir-faire moyen-oriental. Et ce, malgré les milliards dilapidés dans sa politique d’arabisation démagogique et criminelle à maints égards. Surtout dans le cas de l’amazighité.

N’en déplaise à M. Goulahcen, la création d’une chaîne de télévision et de radio amazighes et même plusieurs – pourquoi pas ? - est une urgence absolue. Ce ne doit même plus être l’objet d’un quelconque débat. Car elles vont permettre enfin au Maroc d’avoir, pour la première fois de son histoire, une réelle production audiovisuelle propre grâce encore une fois à l’amazighité, sa véritable identité. D’autant plus qu’il n’y aura plus de risque qu’il fasse appel à la solution de facilité : l’importation à coups de devises sonnantes et trébuchantes de navets arabes et latino-américains, doublés à la va vite par les Jordaniens et autres Libanais.

Dans la foulée, ce qui est tout à fait naturel et réellement souhaitable, des sociétés privées amazighes (d’émissions de variétés, de téléfilms, de doublage, de documentaires...) vont voir le jour. On aura alors une véritable industrie télévisuelle. Avec toutes les nouvelles perspectives d’expression et d’emploi qu’elle offrirait pour une jeunesse amazighe bourrée de talent, mais qui, jusqu’à présent, végète indéfiniment et désespérément dans le chômage et l’exclusion. Mais apparemment tout cela M. Goulahcen n’en a cure. À moins qu’il l’ignore... si on lui accorde bien évidemment le bénéfice du doute.

dimanche, novembre 26, 2006

Une pluie de chaînes arabes sur le " Maghreb arabe"

Certains médias arabo-marocains ont carrément sauté de joie en apprenant que la télévision libanaise LBC lance sa chaîne destinée au " Maghreb arabe ". Ils en feront probablement pareil lorsqu’ils sauront que la société émiratie Dabi, elle aussi, va faire de même, incessamment. Pour leur grand bonheur assurément, la fameuse Al-Jazira, connue par son chauvinisme arabe exacerbé et sa promotion de l’islamisme le plus radical, a déjà lancé en grande pompe son propre journal quotidien destiné encore et toujours au même " Maghreb arabe ". Toute cette effervescence télévisuelle orientale, très inquiétante au demeurant, m’a inspiré ces quelques petites et modestes remarques.

Primo, vous n’êtes pas sans savoir que cette appellation du " Maghreb arabe ", banalisée par les médias arabes, est on ne peut plus coloniale, impérialiste, raciste, ethniciste, excluante, insultante... Mais personne n’en a cure. Il ne faut surtout pas s’attendre que l’on arrête de s’en fait l’écho. Au contraire, on continue avec un plaisir non dissimulé à la répéter sur tous les tons. Mais il y a un hic. Le mot Maghreb est déjà arabe que l’on sache, n’est-ce pas ? Pourquoi donc le qualifier encore d’arabe ? Cette insistance, pathétique du reste, est révélatrice. Elle a le mérite de montrer au grand jour qu’il y a un problème. Un gros malaise même. En effet, l’Afrique du Nord n’est pas arabe. Elle ne l’a jamais été. Mais il y a un risque important qu’elle le devienne. Pour mener à bien ce " noble objectif civilisateur" dans le far west amazigh, les monarchies pétrodollarisées du Golfe- où paradoxalement les Arabes deviennent de plus en plus dangereusement une minorité- ne lésinent jamais sur les moyens. Il suffit juste de lever le petit doigt et vous serez noyé sous des tonnes de billes verts, sans condition, illico presto.

Secundo, il ne faut pas en fin de compte reprocher aux Moyen-orientaux de qualifier notre région de " Maghreb arabe " et même nous intégrer bien malgré nous à leur nation et autre patrie arabes. Il faut savoir que tout ce que nous avons comme élite autoproclamée n’a des yeux que pour l’arabisme et ses avatars. N’en parlons même pas des dirigeants. Ils ne ratent jamais aucune occasion pour nous rappeler que nous sommes au " Maghreb arabe ", c’est-à-dire chez eux. Qui plus est, ils n’arrêtent pas de souhaiter de voir son union se concrétiser sous la bannière de l’empire virtuel arabe (l’empire français qui l’a réalisée était, lui, bel et bien une réalité). Ce à quoi le chef des terroristes du Polisario, soutenu à bras-le-corps, rageusement et désespérément par Bouteflika et ses généraux sanguinaires, répond en écho. Sauf qu’il faut satisfaire sa plus grande lubie qu’il caresse depuis plusieurs décennies déjà : son intronisation solennelle à la tête de son ex-future république arabe très démocratique du Sahara occidental. Sinon, il n’y aurait ni union ni rien du tout. Reconnaissez quand même que c’est terriblement drôle !

Cela étant dit, quelle serait donc, si on revient à nos moutons, l’utilité des chaînes " publiques " marocaines devant raz de marée de médias arabes ? Il faut savoir qu’une grande partie de leurs programmes sont importés à coup de millions de dollars US du Moyen-Orient. Poursuivront-elles encore et toujours cette même politique fondamentalement absurde ? Continueront-elles à faire des Marocains des zombies juste bons à consommer les navets arabes ? Nul ne le sait. Mais une chose est sûre : malgré la créativité audiovisuelle dont l’amazighité a toujours fait preuve, les responsables des " médias publics " marocains ne veulent en aucun en entendre parler. Et tous les prétextes sont bons justifier cette aberration on ne peut plus raciste. Même les plus risibles et les plus loufoques.

Et comme si cela ne suffisait pas, Tel Quel n’a pas résisté au plaisir d’entrer dans la mêlée. Et ce, pour jouer sa propre partition faite de discrédit et de désinformation. Selon ce très respectable et non moins déroutant hebdomadaire, les défenseurs de l’amazighité à la télévision ne sont rien de moins que des aigris en mal de publicité. Rien que cela. Présentée presque comme un scoop, la raison de leur dernier tohu-bohu presque déplacé est dû au refus de leurs projets télévisuels. Sidérant, n’est-ce pas ? En fait, pas tant que cela. Après sa logorhée délirieille aux accents "attajdidistes " fustigeant, à la limite de l’obscénité, encore et toujours ce serpent ennuyeux de "l’extrémisme amazigh " (le vrai terrorisme arabiste avec ses effroyables dégâts humains et matériels, nul n’a encore pensé à le dénoncer), publiée dernièrement dans la version arabe du même canard, il ne faut pas s’attendre à mieux.

Avant de reprocher aux autres d’être atteints de schizophrénie, il serait peut-être judicieux de commencer une petite cure pour en guérir soi-même. N’est-ce pas messieurs les responsables de Tel Quel ?

mercredi, novembre 15, 2006

Hommage à Al-Jabiri : l’UNESCO est piégée

L’UNESCO s’apprête à honorer Mohamed Abd Al-Jabiri, l’un des théoriciens les plus connus de la tristement célèbre idéologie baâthiste. Ce qui a scandalisé plus d’un. Surtout les Amazighs qui n’ont pas hésité à le faire savoir. En lançant une pétition. Pour en apprendre plus, nous avons contacté l’un de ses initiateurs, le militant amazigh bien connu, Ali Khadaoui.

Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques lignes ?

Je m'appelle Ali Khadaoui, natif d'Ajdir (à l'Est de Khénifra) au Moyen-Atlas, vers 1953, sous une tente traditionnelle. Inspecteur principal de l'Enseignement secondaire à la retraite; poète en français et amazigh, peintre et anthropologue, spécialiste de la question amazighe. Conférencier sur la même question. Militant de la cause amazighe depuis plus de vingt ans. Ancien membre du Conseil Fédéral du Congrès mondial amazigh (1999-2002) et du Bureau national de l'AMREC depuis 1996 (Association marocaine de recherche et d'échanges culturels) : j'y ai démissionné en juillet 2006 après 15 ans d'intenses activités associatives pour divergences de vue quant à la stratégie à suivre pour amener le pouvoir à reconnaître pleinement l'amazighité du Maroc.

Vous avez été aussi membre de l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) ...

J’ai été un ex-membre du Conseil d'Administration de l'IRCAM, duquel j'ai démissionné également avec six autres membres en avril 2005 pour protester contre l'absence de volonté politique réelle du gouvernement à prendre en charge l'amazighité dans toutes ses dimensions. Notre démission avait un double objectif : d’une part, montrer au Pouvoir qu'il existait encore dans ce pays des Amazighs qu'on ne peut pas acheter ; d’autre part, introduire une rupture épistémologique dans le discours du Mouvement amazigh après la crise provoquée par la création de l'IRCAM (la cooptation de la majorité des grands militants par le Pouvoir a fini par désorganiser tout le mouvement amazigh), afin que ce dernier puisse repartir sur des bases plus solides qu'avant. En tout cas, c'est ce que nous croyons et nous faisons tout pour y arriver.

Pensez-vous que l'UNESCO ne connaît pas assez Al-Jabiri pour l'honorer ou est-ce une provocation ?

Nous pensons que l'UNESCO a été induite en erreur par le lobby arabe très influent au sein de cette organisation, surtout le lobby andalou marocain. Je pense également qu'il s'agit d'une opération politicienne (l'autre candidate à l'hommage est une juive allemande) qui s'inscrit dans les efforts que certains déploient pour rapprocher les Israéliens et les Arabes. Dans ce cas, l'UNESCO a été piégée.

Pensez-vous que l'UNESCO va vous entendre ?

Si nous avions disposé de plus de temps et de moyens (surtout humains), l'UNESCO nous aurait sûrement entendu car notre cause est on ne peut plus juste, et M. Al-Jabiri est on ne peut plus raciste du point de vue des principes des instances internationales elles-mêmes.

Al-Jabiri est un anti-amazigh primaire même s'il est amazigh lui-même, que pouvez-vous nous dire sur ce genre de personnes qui sont malheureusement très nombreux ?

M. Al-Jabiri n'est pas amazigh même s'il dit avoir vécu à Figuig et parlé le tamazight jusqu'à l'âge de 12 ans. M. Al-Jabiri se définit comme étant un chérif descendant des "Al-Jaber du Koweit" ; de plus, être amazigh aujourd'hui relève de la conscience qu'historiquement, anthropologiquement et génétiquement, l'Afrique du Nord est amazighe. Eu égard à ces vérités, l’étude de la colonisation peut nous éclairer à bien des égards. Et comme dans toute situation coloniale, les Amazighs anti-amazighs relèvent de ce que Paul Nizan appelait déjà "le complexe du colonisé".

Réalisé par Lahsen Oulhadj

dimanche, novembre 12, 2006

Maroc : enfin une ONG amazighe des droits humains

25 ans, enseignant, Said Ezzaoui est un fervent militant qui n’a de cesse de lutter pour les droits du peuple amazigh. Il a été membre des plus grandes organisations amazighes avant de décider avec ses amis- tout aussi actifs- qu’il est temps de mettre sur pied une ONG amazighe des droits humains. Il faut dire qu’elle en manquait terriblement. Ce qui fut concrétisé en peu de temps. Et c’est en tant que son coordinateur général que nous l’avons contacté pour répondre à quelques-unes de nos interrogations. À lire impérativement !


Pourquoi une Ligue amazighe des droits humains ( LADH) ?
Nous sommes un groupe de jeunes militants, pratiquement tous issus du mouvement culturel amazigh (MCA), qui étaient conscients, depuis longtemps, de la nécessité de créer une structure organisationnelle à même de défendre le peuple amazigh non seulement au Maroc, mais dans l'ensemble des pays du Tamazgha. Ainsi, le plus logiquement du monde, la Ligue amazighe des droits humains (LADH) a vu le jour dans le courant de mois juillet dernier. Les raisons sont les suivantes : les violations continues des droits du peuple amazigh (droits culturels, droits linguistiques, droits économiques, droit à la vie et à l'existence...) ; le mutisme total de toutes les associations et autres organisations des droits de l’homme- d’obédience arabiste- œuvrant au Maroc par rapport à la situation inique que vivent les Amazighs ; la participation dans la dynamique internationale du mouvement des droits de l'homme. Ce qui passe, à mon avis, par le biais de deux modes d’emploi : intégrer, d’une part, les revendications amazighes dans le processus mondial de défense des droits humains et, d’autre part, les faire connaître le plus possible aux organisations internationales comme l’ONU…

Pour quelle raison vous dites que les ONG des droits de l’homme sont d’obédience arabiste ?

Nous, membres de la Ligue amazighe des droits humains, ne nions en aucun cas le rôle historique important de ces organisations dans la défense et l’amélioration des droits de l’homme au Maroc. Mais nous nous sommes rendu compte qu’elles font totalement litière des droits culturels, linguistique et historique du peuple amazigh. Leur vision de la défense des droits de l’homme est théoriquement globale et n’exclue personne, mais dans la réalité, c’est tout autre chose. Et ce, pour des raisons idéologiques plus qu’évidentes. Nous n’oublierons jamais l’attitude scandaleuse de Abderrahman Ben Amrou, l’ex-président de l’Association marocaine des droits de l’homme ( AMDH) et l’un des ténors du parti de l’Avant-garde socialiste lors du congrès de la Confédération internationale des droits de l’homme (FIDH) tenu à Casablanca en janvier 2001. Il avait refusé catégoriquement de soutenir une proposition appelant le régime marocain à officialiser la langue amazighe. Pire encore, lors des Congrès de ses ONG marocaines, nous savons également que bon nombre de nos militants amazighs y sont souvent l’objet de pressions tous azimuts et d’intimidations diffuses. En fait, ces ONG restent encore et toujours tributaires des courants arabo-baâthistes, qui dominent toutes leurs structures et tous leurs appareils exécutifs. À telle enseigne qu’il est parfois très difficile de les distinguer de tous ces partis arabo-islamistes présents sur l’échiquier politique marocain. Des partis qui ne ratent jamais aucune occasion de s’enorgueillir d’être très dépendants du Moyen-Orient. Vous pouvez en juger vous-même. Lisez juste leurs communiqués pour savoir à quel point, pour ces organisations, seuls les problèmes arabes ou des Arabes sont dignes d’être évoqués !

Peut-on dire que ce sont donc des ONG pour la défense des droits de l’homme " arabe " ?

Malheureusement oui. Ces organisations n’ont jamais démontré qu’elles défendent les droits du peuple amazigh. C’est un sujet qui ne les intéresse guère. Contrairement au problèmes des Arabes et du Moyen-Orient. D’ailleurs, elles ne parlent que de cela. Dans ces conditions, on ne pouvait indéfiniment rester les bras croisés et les attendre qu’elles changent d’attitude. Nous devions agir et nous prendre nous-mêmes en charge. Nous avons donc pensé créer notre propre organisation qui aura pour tâche principale la défense des droits du peuple amazigh non seulement au Maroc, mais dans tout le Tamazgha.

Ne pensez-vous pas qu’une telle organisation devait exister depuis longtemps déjà, vu la multitude d’injustices dont est victime le peuple amazigh ?

En effet, il fallait que les militants amazighs créent une organisation des droits de l’homme propre à eux depuis longtemps. Puisque les violations des droits du peuple amazigh ne datent pas d’aujourd’hui. Si ce n’était pas fait, c’est pour ces raisons. Une bonne majorité d’entre eux ont plutôt opté pour le travail associatif qui, comme vous le savez, a toujours oeuvré d’une manière concomitante sur trois domaines : le culturel, le politique et les droits de l’homme. En parallèle, une partie de nos militants a plutôt tablé sur un changement à venir des organisations existantes au Maroc par rapport à la question de l’amazighité. Comment ? Par l’entrisme au début et en y créant des groupes de pression, par la suite, afin de les amener à s’intéresser à la situation désastreuse du peuple amazigh. Mais en vain. Nos espoirs ont été déçus, car elles sont toujours restées crispées et insensibles par rapport à tout ce qui a trait à l’amazighité. Nous n’avions plus le choix. Il nous fallait notre propre organisation. Nous avons attendu que les conditions soient réunies pour passer à l’ " acte ". Ce qui fut fait. La LADH a vu effectivement le jour. Et ce pour défendre les droits de l’homme dans leur globalité, tels qu’ils sont définis par tous les traités internationaux.

Et l'administration marocaine, ne s'est-elle pas opposée à votre projet ?

Cela fera bientôt trois mois que notre organisation est née, et à ce jour nous n’avons aucun problème avec les autorités. Il faut dire que nous avons fait les choses dans les règles. Nous avons préparé minutieusement notre dossier en respectant scrupuleusement les exigences de la loi. Nous avons reçu en conséquence notre récépissé provisoire. Sans aucun problème.

Vous habitez dans l'arrière-pays du Souss ( Bouizakarn, Taghjjijt et Timoulay…), n'est-il pas difficile de travailler dans de telles conditions ? Ne serait-elle pas mieux que vous soyez dans une grande ville comme Agadir par exemple ?

Il est vrai que les fondateurs de la Ligue amazigh sont loin des grands centres urbains du Souss, mais sachez que cette situation a du bon. Car là nous sommes des témoins directs des terribles souffrances de nos populations rurales complètement exclues. Je suis d’avis que les conditions de notre combat seraient probablement meilleures dans les villes, mais l’évolution technologique impressionnante des moyens de communication et leur accessibilité ont fait que les distances se sont grandement rétrécies. Je tiens quand même à faire une mise au point : notre combat est celui de tout un peuple. Il ne doit en aucun cas être monopolisé par nos seules élites citadines. C’est l’affaire de tous les Amazighs, sans exception aucune.

Quelles sont les réactions des autres organisations marocaines des droits humains par rapport à l’avènement de la LADH ?

La création d’organisations telles que la nôtre est un droit que protègent tous les traités et toutes les conventions internationales des droits de l’homme. Si ces organisations y croient réellement et s’y inspirent, normalement, elles sont obligées de nous respecter et même de nous encourager. Mais jusqu’à présent, nous n’avons aucune réaction, ni positive ni négative. Par ailleurs, beaucoup de militants amazighs au Maroc, dans les pays du Tamazgha et dans la diaspora se sont manifestés pour nous souhaiter leur soutien le plus ferme.

Pouvez-nous faire un bref topo sur l’essentiel de vos actions jusqu’à aujourd’hui ?

Malgré le jeune âge de notre organisation, elle a pu quand même suivre avec une attention particulière toutes les violations des droits du peuple amazigh que ce soit au Maroc ou dans tout le Tamazgha. Ces cas ont été signalés aux responsables gouvernementaux et ont fait également l’objet de communiqués de dénonciation, diffusés via la presse nationale et internationale. On peut en citer : l’interdiction des prénoms amazighs, l’expropriation de notre peuple de ses terres ancestrales et de ses richesses naturelles, l’empêchement scandaleux de la troupe libyenne, Ussan, de participer au festival de Tanger, la lâche tentative d’assassinat dont a été victime Dda Hmad Adgherni… Pour rehausser le niveau de ses militants, la LADH a organisé plusieurs ateliers de formation dans le domaine des droits de l’homme. Dans le courant du mois de novembre 2006, sera organisé son premier conseil national, qui est la plus importante structure en son sein après le congrès national. Il sera l’occasion pour que les membres du bureau exécutif et les coordinateurs régionaux ( 10 comités régionaux ont vu le jour dernièrement ) pour discuter et étudier les derniers développements de la situation de droits de l’homme au Maroc, la situation du peuple amazigh, les stratégies à venir de la LADH…

Quels sont les projets que vous vous êtes fixés ?

Ce n’est pas cela qui nous manque vraiment. Même si la liste est longue on peut les résumer ainsi : organiser des journées d’études et ateliers sur la situation des droits de l’homme en général, et du peuple amazigh en particulier ; préparer des rapports réguliers sur les violations flagrantes des droits de l’homme ; fonder un centre médiatique spécialisé dans la question des droits de l’homme ; mettre sur pied des rencontres avec d’autres organisations nationales et internationales qui œuvrent dans le même domaine…

Vous parlez souvent du peuple amazigh, quel sens lui donnez-vous ?

En tant que marocains, nous appartenons géographiquement et politiquement à un pays, le Maroc. Le peuple qui habite ce pays et tout le Tamazgha est amazigh par excellence. D’ailleurs, toutes les sciences ( sciences humaines, archéologie, Histoire, anthropologie…) le prouvent et le démontrent. Or au cours de l’Histoire, les royaumes amazighs ont vécu des périodes de déclin qui ont vu la venue de bon nombre de peuples ( Phéniciens, Roumains, Byzantins, Vandales, Arabes, Français…) à des fins coloniales ou pour trouver refuge chez nous. Ces groupements humains, aussi forts qu’ils pouvaient être, n’ont jamais pu imposer aux Amazighs leur culture ou leur manière de vivre. De tout temps, notre peuple a préservé farouchement ses spécificités identitaires et culturelles.

Et le peuple arabe ?

Dire qu’il y a un peuple arabe en Afrique du Nord est complètement non fondé et ne résiste pas devant les preuves de la science et de l’Histoire. Le peuple arabe existe bien évidemment, mais chez lui, en Arabie, alors que l’Afrique du Nord est la terre du peuple amazigh. Quant au fait que le Maroc est totalement islamisé, là aussi c’est un mythe plus qu’autre chose. Un mythe que les barbus et les tenants d’un État religieux savent maintenir à dessein. Notre pays a toujours connu une pluralité confessionnelle. Il y a effectivement des religions qui ont disparu, mais leurs influences est toujours aussi vivaces. En tous les cas, et c’est mon point de vue, la religion est changeante. On ne peut donc la considérer comme un paramètre stable définissant l’identité de tout un peuple. Par ailleurs, je m’étonne toujours de ceux qui parlent, à souhait, du peuple arabe, turc, perse, mais se refusent à évoquer les Amazighs, comme un peuple à part entière avec son Histoire, son identité et sa culture. Ceux qui nous considèrent comme des Arabes et intègrent notre Tamazgha à leur monde arabe montrent, de ce fait, au grand jour leur vraie nature de colonialistes et d’impérialistes.

Réalisé par Lahsen Oulhadj

dimanche, novembre 05, 2006

Égypte : vers une république monarchique !

République monarchique dites-vous ? Je suis intimement convaincu que vous ne trouverez jamais rien de poétique à cet assemblage pour le moins insolite. S’il ne vous choque pas, il doit tout au moins vous surprendre. Et pour cause. En principe, et nous le savons que trop bien, les systèmes républicains ne sont jamais dynastiques. Mais il en va tout autrement pour certains dictateurs. Après avoir passé toute leur vie au pouvoir, ils veulent en quelque sorte s’y éterniser, symboliquement. Comment ? En prenant toutes sortes de soins pour le léguer à leur chère progéniture après leur décès.

Après la Corée du Nord, la Syrie, le Congo Kinshasa, le Togo, il appert que l’Égypte, ce grand pays dépositaire d’une civilisation prestigieuse plusieurs fois millénaires, caresse de plus en plus le projet de rejoindre le club très fermé des républiques dynastiques. Il faut dire que le régime baâthiste syrien – qui n’est ni géographiquement ni culturellement loin - y est probablement pour quelque chose.

En effet, la Syrie a été le premier à donner le la en instituant ce nouveau système politique ô combien inédit ! Au grand dam de tous les démocrates du Moyen-Orient et même d’ailleurs. Saddam aussi allait probablement suivre, mais l’intervention anglo-américaine à mis un coup d’arrêt brutal à son rêve. Le très fantasque et non moins excentrique Kaddafi n’est pas en reste. Il n’a pas non plus résisté, semble-t-il, à cette nouvelle mode. À bien suivre l’actualité libyenne, tout indique qu’il est en train, lui aussi, de préparer progressivement l’un de ses rejetons à la fonction suprême. Tout un programme prometteur !

Qu’on se le dise en toute franchise, hormis un ou deux pays dans le monde, cette bizarrerie politique a fini par devenir l’apanage des régimes autoritaires arabes anciennement progressistes. Ce qui constitue un véritable pied de nez à l’Histoire lorsqu’on sait qu’ils sont arrivés (en Égypte et en Libye plus particulièrement) au pouvoir à la faveur de coups d’État contre leurs propres monarchies, jugées à ce moment-là rétrogrades, réactionnaires et, comble des infamies, inféodées à l’Occident "impérialiste ".

Pire, pendant des décennies, ils ne se sont pas embarrassés, vu les moyens financiers importants en leur possession, de chercher des poux aux autres monarchies voisines. Ils sont même allés très loin, trop loin en n’hésitant pas à comploter contre elles. Afin de les chasser du pouvoir, ils ont financé et même hébergé, dans certains cas, toutes sortes de mouvements pseudo-révolutionnaires d’obédience stalinienne. Mais en vain. Car ces monarchies sont toujours là et se sont même avérées, au fil du temps, plus stables, moins chaotiques et pour certaines économiquement viables, si ce n’est carrément très prospères.

Exemple syrien

Si paradoxal que celui puisse être, lors de l’accession tragicomique de Bachar au pouvoir en Syrie, le président égyptien Moubarak – appelé ironiquement par ses multiples contempteurs le Pharaon d’Égypte- a été peu amène avec ses confrères arabes qui penseraient céder le pouvoir à leurs enfants. Mais depuis, elle a viré sa cuti, radicalement. Et c’est le moins qu’on puisse dire. Car le vieux raïs a fini par trouver du bon à cette invention typiquement tiers-mondiste, promise à un beau succès au Proche et au Moyen-Orient.

Même si dans certains milieux politico-intellectuels égyptiens, c’est plutôt la Première Dame, Suzanne Moubarak, que l’on croit très influente et même très puissante, qui est la principale instigatrice d’un tel projet politique pour le moins loufoque. Tellement qu’il choque plus d’un. Aux premiers desquels, les premiers concernés, les Égyptiens eux-mêmes.

Après une présidence qui va être probablement à vie, vu son âge très avancé-78 ans- et sa santé pour le moins vacillante, Housni Moubarak, même s’il n’a de cesse de le nier, nourrit le secret dessein – certes non encore assumé publiquement- de voir son cadet Gamal lui succéder. D’autant que le vide crée et savamment entretenu autour de lui, pendant des années de son règne, arrange bien ses calculs- il n’a pas de vice-président par exemple. En fait, aucune autre alternative n’est possible. L’on se trouve donc devant une seule et unique solution : celle de la succession du fiston ou le chaos – ou le déluge. Il faut dire qu’il y a des signes avant-coureurs qui ne trompent pas. Ce qui donne libre cours à toutes sortes de spéculations de plus en plus fondées.

En effet, depuis 2000, après la mise à l’écart de son grand frère, Alaa, impliqué dans une série de scandales de corruption qui ont défrayé la chronique, Gamal est propulsé subitement au devant de la scène. En prenant bien sûr le soin de ne pas refaire le scénario à la syrienne, qui a fait rire le monde entier tellement que c’était ridiculissime. À titre de rappel, Bachar, inconnu jusqu’alors y compris de ses propres compatriotes, s’est vu installer au pouvoir, au pied levé, peut-être même contre son gré. Car il n’a jamais été question qu’il succède à son paternel. C’était plutôt son aîné mort tragiquement et brutalement dans un accident de circulation que l’on préparait, depuis belle lurette, à la fonction suprême.

En sus, l’Égypte n’est pas la Syrie. Il faut donc absolument un semblant de légitimité à celui que l’on veut introniser. Il est donc impérieux de s’atteler à élaborer une stratégie implacable, qui ne souffre d’aucune faille. Pour que tout se passe dans les meilleures conditions possibles. Ce que l’on n’a pas tardé à faire et même à la mettre en branle, tambour battant. En dépit d’une suite de dénégations officielles -qui ne convainquent personne du reste-, on ne peut que constater que Gamal prend de plus en plus ses marques, sous l’œil bienveillant et affectueux du président, plus que jamais en patriarche attendant, l’esprit tranquille, la fin de ses jours.

Pour peaufiner sa stature d’homme d’État, on use et on abuse de tous les procédés politico-médiatiques. Ainsi, du jour au lendemain, Gamal est devenu, comme par enchantement, plus que présent sur tous les fronts et surtout dans le parti de son géniteur, le Parti national démocratique (PND). En un de temps record et d’une manière fulgurante, - en poussant ses pions dans toutes les directions et en écrasant au passage et sans ménagement tous les caciques du régime qui lui sont opposés- l’héritier putatif y a gravi tous les échelons pour en devenir un véritable ponte. Et pas n’importe lequel ! Il préside aux destinées de son puissant comité politique. Celui-là même qui décide du cours à donner aux orientations politico-économiques futures du parti et même du gouvernement. C’est vous dire…

Qui plus est, on le voit de plus en plus mordre sur les plates-bandes du président, ce qui ne serait certainement possible sans le feu vert de celui-ci. Désormais, il peut évoquer librement des sujets extrêmement sensibles, qui jusqu’à récemment sont du ressort unique et exclusif du chef de l’État. Ses propos dernièrement sur la nécessité pour l’Égypte de se doter d’une véritable technologie nucléaire, pour être, selon lui, moins dépendante de l’électricité hydraulique, n’ont pas passé inaperçus ; ses interventions sur la question palestinienne non plus ; de même que ses critiques acerbes du projet américain du Grand Moyen-Orient...

Lors du dernier congrès du PND, les allusions à la future intronisation de l’héritier présomptif ont fusé de toutes parts. Ce qui est tout à fait normal lorsqu’on sait le manque flagrant de toute démocratie au sein de ce parti. Il faut juste enregistrer les volontés de son président et on se tait. Telle est sa mission. Il est donc normal que l’on prépare de plus en plus l’opinion publique à une éventuelle le fils au " trône " à moins que ce soit juste des ballons d’essai. Et ce n’était pas Houssam Badraoui, l’un des membres influents du PND, qui le démentirait. " Il est de notre droit de choisir l’homme le plus à même de diriger notre parti, a-t-il affirmé en parlant de Gamal. Et à lui seul de refuser ou d’accepter. À mon sens, il ne s’agit en aucun cas d’une succession. "

Résignation

Dans une déclaration à la presse, Mohamed Habib, le bras droit du guide général de la puissante association des frères musulmans, considérée à juste titre comme l’opposition la plus structurée et la plus organisée au régime de Housni Moubarak, a affirmé que les préparatifs que le fils prenne la relève du père sont très avancés. " Aucune force, a-t-il expliqué, un peu désabusé et carrément fataliste, ne peut arrêter ce processus à moins qu’il y ait un très grand mouvement populaire. Et rien ne nous garantit qu’il y en aura un à l’avenir. "

Si du côté des puissants frères musulmans, on a adopté le profil bas, ce n’est pas le cas pour le mouvement " Kifaya " ( ça suffit en arabe), qui n’a de cesse depuis 2004 de protester et même d’organiser des manifestations un peu partout sur le territoire national. Contestataire jusqu’au bout des ongles et rassemblant des hommes et des femmes de toutes les tendances politiques présentes dans le pays des Pharaons (les Islamistes, les communistes, les socialistes révolutionnaires, les nassériens...), il a formulé plusieurs revendications que l’on peut résumer en deux points -même s’il a mis, comme on peut le constater, la barre trop haut : le départ de Housni Moubarak du pouvoir et la réalisation de réformes en profondeur pour sortir, enfin, la société égyptienne de son sous-développement chronique.

Malgré quelques coups d’éclat qui lui ont fait gagner la sympathie de la presse internationale, " Kifaya " peine à rassembler au-delà des personnes qui lui sont déjà acquises. Souvent des intellectuels, des journalistes, des avocats... Alors que l’écrasante majorité du peuple est totalement indifférente. Pour beaucoup cette situation est due au règne de Housni Moubarak, marqué par l’état d’urgence auquel il ne veut jamais mettre un terme. Ce qui a pour incidence directe la dépolitisation totale des Égyptiens. Un phénomène que l’on peut facilement constater pas uniquement en Égypte, mais dans tous les pays arabes. Il faut dire qu’une telle situation arrange bien leurs régimes connus pour leurs mœurs antidémocratiques.

De plus, la conjoncture socio-économique est tellement difficile que les citoyens ne pensent plus qu’à joindre les deux bouts et à manger à leur faim. C’est connu, lorsqu’on a le ventre creux, on ne s’intéresse plus à rien. " D’où un désengagement général des Égyptiens et leur attitude passive et fataliste ", a expliqué au journal le Monde, Rifâat Al-Said, le chef de l’un des partis de l’opposition.

Quoi que fassent les opposants au régime de Housni Moubarak, il est bien évident qu’ils ne pèsent pas vraiment lourds devant sa puissance. Le spectre, pire le cauchemar, de voir le fils accéder à la fonction suprême se concrétisera à coup sûr. À moins d’un événement inattendu qui vient chambouler le tout. En attendant, la démocratie, la vraie, sera jetée encore une fois aux calendes grecques. Pour le grand désespoir de tous les démocrates égyptiens, qui souhaitent un tout autre destin à leur pays.

Seul ombre au tableau, la position de l’armée. Est-elle d’accord ou non ? Pour le New York Times, la question est loin d’être tranchée. Car contrairement à son père, Gamal n’a jamais fait partie de la Grande Muette. Et si jamais, il accède au pouvoir, ce serait une première. Et pour cause. Depuis 1952, tous les présidents qui se sont succédé au pouvoir en Égypte viennent justement de l’institution militaire. Wait and see !

Adoubement de l’Oncle Sam
À la fin de mai 2006, lors d’une visite officiellement " privée " à Washington, Gamal a eu plusieurs entretiens avec plusieurs personnalités importantes dans l’administration américaine. Au premier desquelles le président Georges Bush, le vice-président Dick Cheney et le conseiller pour la sécurité nationale Steve Hadely. Est-elle pour tâter le pouls des officiels américains ? Est-elle un pas de plus dans la confirmation de la succession de son père ?

Toujours est-il que l’on a accueilli avec la dignité qui sied à son rang. Reste que l’impression des Américains a été largement exprimée, d’une manière on ne peut plus claire, par Robert Zulick, l’ex-secrétaire d’État adjoint auprès de Condoleeza Rice. Jugeons-en ! " C’est une personnalité exceptionnelle, a-t-il dit devant un parterre de journalistes, qui est à la tête d’un courant réformateur et qui participe activement au processus des réformes en Égypte, contrairement aux autres membres traditionnels du parti national démocratique ".

En d’autres termes, on ne pense que du bien de Gamal. Certains n’ont pas hésité à interpréter ses propos sibyllins comme une bénédiction à peine voilée. Il faut dire que l’échec en Irak a fini par échauder les Américains qui ne peuvent pas se permettre de déstabiliser l’Égypte avec leurs histoires de démocratisation. Un pays qui est l’un de leurs alliés le plus sûr, le plus stratégique et qui reçoit le plus d’aide de leur part au Proche-Orient, après bien évidemment Israël. Tant que le dauphin protégera leurs intérêts, il est fort probable qu’ils s’en accommoderont très bien. L’on assistera alors au retour au pragmatisme politique qui a toujours caractérisé la politique étrangère américaine envers les pays arabes. Après la parenthèse malheureuse de démocratisation à la hussarde en Irak de Bush et de son équipe de faucons et autres colombes, on revient donc à plus de réalisme. C’est du moins ce qu’on peut en conclure.

Mais il y a hic. Une Égypte monarchique risque de faire boule de neige. Les autres pays arabes, qui n’attendent que cela, vont tous suivre vu la place importante de ce pays, considéré dans l’imaginaire arabe, à tort ou à raison, comme un modèle à suivre. Ainsi, la liberté, l’alternance politique, la bonne gouvernance et la démocratie au Proche et au Moyen-Orient continueront à faire antichambre. Peut-être pour toujours pour le grand bonheur de tous les extrrémismes, qui trouveront là un terreau fertile pour prospérer encore et encore.

mardi, octobre 10, 2006

Triste semaine pour les journalistes

Ce que l’on craignait est enfin arrivé. Anna Politkovskaïa, l’une des plus célèbres journalistes russes, est tombée, dimanche dernier, sous les balles assassines de ses ennemis que l’on sait très nombreux. Tellement cette dame frêle, mais ô combien courageuse !, dérangeait par sa plume des milieux on ne peut plus puissants. Pourvue d’une langue bien "pendue " et une plume acerbe, elle ne s’embarrasse jamais de critiquer, d’une manière frontale, l’homme le plus puissant de Russie, Poutine, et la politique pour le moins meurtrière qu’il mène tambour battant en Tchéchénie.

Rentrant tranquillement chez elle ses courses à la main, ses tueurs l’ont liquidée, dans l’ascenseur de son immeuble, froidement, et d’une manière "professionnelle ", selon les propres termes de la police moscovite. Il faut dire qu’elle était régulièrement menacée. Elle ne le savait que trop bien. Elle a d’ailleurs été victime en 2004 d’une tentative d’empoisonnement dans l’avion qui la menait pour couvrir la fameuse tuerie de Beslan. Mais elle s’en est sortie, miraculeusement.

Enivré par les recettes astronomiques du pétrole, le président Poutine a les coudées franches et surtout des moyens immenses pour continuer d’asseoir une véritable autocratie en Russie. Après avoir fait taire tous les nouveaux riches, soupçonnés d’avoir des velléités démocratiques, et qui auraient pu, le cas échéant, lui faire de l’ombre, il s’est attaqué à la presse avec une violence inouïe. Il n’hésite pas à employer la manière la plus radicale. Il ne recule devant rien. Tous ceux qui peuvent lui poser problème sont tués. On compte d’ailleurs, selon le Comité de protection des journalistes, organisme basé à New York, 42 assassinats non élucidés de journalistes en Russie, plaçant ainsi ce pays sur le podium des pays les plus dangereux au monde après l’Irak et l’Algérie.

Pour autant, le tollé quasiment planétaire provoqué par le meurtre de Poltkovskaïa a probablement mis le maître du Kremlin dans l’embarras. Après un silence très révélateur, il a enfin brisé le silence pour promettre de faire une enquête pour confondre le criminel ou les criminels. Mais personne n’y croit réellement. Surtout la Novaïa Gazeta, le magazine où travaillait Anna Politkovskaïa. Elle a d’ores et déjà offert 1 million de dollars à toute personne à même d’aider à faire la lumière sur cette triste affaire. C’est vous dire à quel point elle fait confiance à la justice russe.

La deuxième triste nouvelle est le décès dans des conditions pas tellement claires du talentueux journaliste africain et le correspondant attitré de Radio France Internationale au Cameroun, David Ndachi Tagne. Pour ceux qui écoutaient, régulièrement, cette célèbre station, ils ne pouvaient tout simplement ne pas le connaître. Tellement ces reportages sont toujours extrêmement bien faits et très enrichissants.

Il faut dire que ce professionnel hors pair est une tête bien faite. En fait, il est titulaire d’un doctorat en littérature africaine et a même publié nombre d’ouvrages savants à ce sujet. D’autant plus que sa longue carrière journalistique, commencée en 1979, a fait de lui un homme d’expérience très respectée par ses pairs et ses auditeurs. Ce que confirme amplement cette phrase qu’on peut lire sur le site Internet de RFI : "David Ndachi Tagne, c'était l'honnête homme, un grand journaliste, une voix, une présence qui s'imposait tout naturellement. "

La dernière nouvelle tout aussi triste, mais un peu moins grave, parce qu’il ne s’agit pas, heureusement, de mort d’homme, concerne le correspondant du quotidien français le Figaro en Algérie, Arezki Aït Larbi. En allant retirer son passeport, il a été informé que son document a été bloqué par la police pour une étrange affaire de diffamation qui remonte à très loin, en 1997 plus exactement. Manque de bol, il apprend, complètement abasourdi, coup sur coup, qu’un mandat d’amener a été lancé contre lui et qu’il a même été condamné par défaut à une peine de 6 mois. Tout cela sans qu’il en sache absolument rien.

Ce qui a fait dire à l’intéressé, plus que désabusé, que "tant de coïncidences ne sauraient relever d’un simple dysfonctionnement bureaucratique, mais elles sont liées à la volonté des autorités de lui refuser son accréditation en tant que correspondant d’un quotidien étranger et aux pressions récurrentes visant à l’empêcher d’exercer son métier ".

Décidément les journalistes algériens ne sont pas au bout de leur peine. Après la décennie noire où plusieurs dizaines des leurs sont morts sous les balles de terroristes de tout poil, voilà que le régime, requinqué lui aussi par les recettes du pétrole, s’y met aussi en réprimant à tout bout de champ. D’ailleurs l’une de ces victimes les plus connues n’est autre que le directeur du défunt quotidien Le Matin, Mohamed Benichou, qui a passé deux ans en prison. Son seul et unique crime, il a écrit un livre sur le président algérien, A. Bouteflika.

Comme on peut le constater, ce qui relève de la norme dans les pays démocratiques est loin d’être le cas sous d’autres cieux. Comme quoi la lutte pour la liberté de la presse et la démocratie doit être permanente et sans relâche. Car beaucoup de régimes autoritaires n’attendent que la moindre petite occasion pour condamner illico presto les rares espaces de libertés que les démocrates ont acquis de haute lutte. À nous de les soutenir, en en parlant par exemple !

lundi, octobre 09, 2006

Libération : un grand journal à vau-l’eau

Depuis le lancement de son premier numéro sous forme de quatre pages le 18 avril 1973, Libération (appelé Libé familièrement par ses lecteurs)a connu des hauts et surtout des bas. La première grande crise de ce journal estampillé à gauche, voire extrême gauche, date de 1981. Paradoxalement, l’année même où la gauche politique, dirigée par le très charismatique François Mitterand, avait le vent en poupe en accédant, dans l’euphorie quasi générale, au pouvoir en France pour la première fois depuis l’avènement de la 5e république en 1958.

À ce moment-là, les difficultés sont telles que le titre Libération a même été obligé d’arrêter sa parution et ne reparaît que quelques mois plus tard. Bien que l’on ne ménage rien pour assurer la pérennité du quotidien, des crises récurrentes, plus ou moins graves, allaient le secouer. Mais à chaque fois il s’en est sorti, parfois miraculeusement, non sans quelques dégâts collatéraux. Loin de rester les bras croisés, tout a été pratiquement essayé de l’aveu même de son ex-indéboulonnable et non moins talentueux directeur Serge July. Mais en vain.

" Libération n’est pas une société financièrement dépensière, explique Serge July, celui-là même qui n’est déjà plus son sempiternel patron parce que poussé à la porte par Édouard de Rotshild, le désormais homme fort de l’entreprise et son actionnaire de référence. Nous avons fait beaucoup de plans d’économies, utilisant toutes les techniques : les réductions d’effectifs, l’externalisation d’un certain nombre d’activités, le plafonnement des augmentations de salaires, quand elles ne sont pas tout simplement bloquées, le blocage des embauches, le contrôle sévère de nos coûts, la mise en concurrence de nos prestataires... "

Aujourd’hui, avec ses 142 000 ventes chaque jour, ses 900 000 lecteurs et ses 200 000 internautes quotidiens, Libération est l’un des plus importants quotidiens français -et de loin, je le reconnais volontiers, mon préféré. Malgré cela, sa survie n’est pas pour autant assurée. Après moult concessions idéologiques douloureuse et autant de tentatives plus ou moins originales pour le relancer, il semble que la nième crise dans laquelle il se débat présentement, risque de l’emporter, définitivement ou du moins le changer, radicalement, à telle enseigne qu’il serait, peut-être, méconnaissable. Ce qui serait vraiment dommage !

Fin d’une époque

Mais, objectivement, comment en est-on arrivé là ? Tout simplement parce que l’époque et les gens ont radicalement changé. L’on est à la fin d’une époque et le début d’une autre. La révolution numérique qui a cours sous nos yeux a pratiquement tout chamboulé. Les vieux schémas de l’industrie médiatique ne sont tout simplement plus opérants. Les journaux gratuits et le règne de la gratuité sur Internet y sont pour beaucoup. La crise est profonde, totale et structurelle. Pratiquement toute la presse écrite et pas seulement Libération souffre, terriblement. Beaucoup de titres y ont laissé des plumes, et même certains ont mis, définitivement, la clé sous la porte. " Il est remarquable, fait savoir encore une fois Serge July, que tous les médias généralistes d’informations baissent depuis des années : la presse quotidienne payante évidemment, mais aussi les radios (2 millions d’auditeurs en trois ans) et même la télévision. "

Dans ce contexte, la publicité, l’une des sources de financement les plus importantes de la presse, ne suit plus, ne peut plus suivre. Ce qui est tout à fait logique. Pire, les coûts viennent s’emmêler. Ils n’ont cesse d’augmenter. Ce qui a naturellement empiré, dramatiquement, les choses. Même si c’est le cas partout dans le monde, en France, la situation est on ne peut plus grave. Et ce pour des raisons propres à ce pays. " (La crise) est plus aiguë en France, en raison de particularités héritées de l'histoire : les coûts de fabrication, d'impression, de transport et de distribution y sont plus élevés, et les marchands de journaux de plus en plus rares (l'année dernière, plus de 400 points de vente ont fermé) ", pourrait-on lire sur une lettre explicative du personnel publiée dans le journal.

Il n’y a pas que cela, le lectorat aussi a complètement changé parce que son mode de vie s’est radicalement métamorphosé. Par conséquent, il ne lit plus autant qu’auparavant. En fait, il y a une véritable crise de lecture dans ce pays de culture, la France. Le nombre de lecteurs s’est réduit comme peau de chagrin. La désaffection a suivi une courbe dangereusement descendante. " Il existait 28 quotidiens nationaux en 1946. Ils se vendaient à plus de 6 millions d'exemplaires chaque jour. Aujourd'hui, il en reste 11 (dont 7 généralistes), qui ne diffusent plus que 2 millions d'exemplaires ", lit-on sur un papier collectif publié sur les colonnes de Libération.

Ajoutons à cela que le lecteur n’a plus envie de lire ou il n’en a plus le temps. D’autant plus qu’il est surinformé. L’information est présente à tous les coins de rue, pourrait-on dire. A voir toutes les multitudes de médias (télévision, radio, Internet, cellulaire...) qui le bombardent sans relâche d’informations à longueur de journée, on peut facilement comprendre qu’il soit "repu " jusqu’à la nausée. À quoi bon prendre un journal pour y lire la même chose ?

Cafouillage

De plus, la fin des idéologies, doublée d’une cacophonie rédactionnelle, peut aussi être un paramètre d’explication. Le clivage gauche-droite fait déjà partie d’un passé très lointain. " Même si personne ne l’avoue, la crise de Libération est aussi idéologique : c’est celle d’un groupe d’ex-soixante-huitards qui, aimanté sur le tard par la mondialisation néolibérale, séduit par ses élites, n’a pas perçu, au tournant des années 90, la " barbarisation" du nouveau capitalisme et la paupérisation à venir des classes moyennes dont Libération aurait pu devenir le porte-drapeau. Les responsables de Libé n’ont rien vu venir : ni la panne de l’ascenseur social, ni le chômage des cadres, ni la dégradation des conditions de vie des petits fonctionnaires, ni la crise de l’idéal européen, ni la faillite du jospinisme, ni le non au référendum. Une partie de la rédaction, elle, plus en contact avec le réel, a fini par réagir. Du coup, le quotidien est devenu incohérent (pluraliste, disent les plus optimistes). Quand le reporter de Libé défend les pêcheurs, les agriculteurs ou les ouvriers " en mouvement ", l’éditorialiste et le titreur du journal promeuvent la nécessité de s’adapter à la modernité du marché. À quoi bon sauver des professions " ringardes" ? En fait, l’éditorial et la une énervent les lecteurs altermondialistes, tandis que le reportage agace ceux qui pensent comme l’éditorialiste. ", fait remarquer d’une manière extrêmement critique, le journaliste Philippe Cohen

Il y a aussi une autre chose, dans la presse, et c’est une terrible plaie, on raconte à peu prés la même chose, à quelques exceptions près. L’uniformisation rébarbative a fait son effet. Par voie de conséquence, le lecteur voit de moins en moins la différence entre les lignes éditoriales des journaux. N’en déplaise à Serge July, la presse française n’est plus aussi plurielle qu’elle était. Qui plus est, elle s’est installée, doucement mais sûrement, dans un conformisme ennuyeux. L’originalité, l’audace et l’imagination sont devenues irrémédiablement des arlésiennes. " Libé ne choque plus. Il n’est, à vrai dire, plus attendu, ni même attendu ", note, acerbe, toujours le même Philippe Cohen.

Tout cela a entraîné une espèce de divorce, lent mais bien réel, entre presse et lecteur dont on ne mesure que maintenant toute l’étendue et surtout la gravité. Car si la presse écrite est affaiblie, c’est la démocratie qui en pâtira le plus. Et là on ne peut qu’être d’accord avec Serge July lorsqu’il affirme, si justement, que "ce média est indispensable à la vie démocratique, au point d’être le média qui nourrit tous les autres, l’atelier de réflexion et du débat national ".

Espérons qu’une situation viable, durable et solide va être trouvée le plus tôt possible pour que Libération, ce joyau de la presse française, ne meure de sa belle mort, comme c’était le cas de l’Huma, France-Soir… Il est bien certain que sa probable disparition serait terrible pour des milliers de lecteurs. Comme moi. Car je l’ai lu tous les matins pendant des années. Il va sans dire que j’y ai appris énormément de choses. De plus, et je l’avoue en toute franchise, si la passion de l’écriture m’a rattrapé, c’est en partie grâce à lui. C’est vous dire...

dimanche, septembre 24, 2006

Agadir Ifawn, l’album d’Amarg Fusion est sur le marché

La formation agadiroise d’Amarg Fusion est indéniablement l’un des groupes phares et les plus en vue de la nouvelle scène musicale amazighe. Fidèle à elle-même, elle vient de nous gratifier d’un nouvel opus, Agadir ifawn, d’une exubérance exquise et d’une extrême richesse. Les mélomanes et autres afficianados, amazighs ou pas, doivent être certainement enchantés, envoûtés même d’écouter, avec ravissement, ce vrai bijou par trop précieux.

Car tout y est, les paroles, toujours des reprises tirées de l’immense répertoire des rways- sauf la chanson Agadir-, des sonorités fusionnant dans un mariage heureux les rythmes occidentaux ( jazz, rock, reggae, celte…) et amazighs, dans leur incomensurable variété ( ahwach, rways, ahiyyad, …). En fait, c’est un vrai feu d’artifice que cet album, qui nous rappelle que les créateurs amazighs, malgré le terrorisme, le racisme et l’exclusion systématique dont ils sont victimes de la part du régime de Rabat, ses médias et ses relais locaux, sont toujours capables de donner plus que le meilleur d’eux-mêmes. Les membres du groupe ont surmonté, magistralement, tous les défis et tous les écueils : ils nous ont fait là un vrai travail de professionnels, très compétents et surtout très dévoués.

L’interprétation de Ali Faik (cet enfant terrible d’Achtouken, ce coin du Souss d’où sont originaires de très grandes légendes artistiques et non des moindres, Boubakr Anchad, Houcine Janti, Said Achtouk, Brahim Achtouk, Houcine Bihtti…), fondateur et leader du groupe, est on ne peut plus admirable. Plus que cela, magnifique, sublime ou les deux à la fois. Sa voix gravement chaleureuse et profondément sensible est une invitation permanente à un voyage féerique, magique, de tous les instants, à cette orgueilleuse et inexpugnable citadelle de l’amazighité, le Souss.

Quant aux instruments, il y a de tout. Bien évidemment la présence, comme toujours, de la guitare, de la basse, de l’orgue et autre batterie est plus que manifeste. Mais pas que cela. Il y a aussi l’emploi judicieux, pertinent et intelligent de la vielle amazighe, l’indétrônable rribab, et même du sempiternel lotar qui donnent au tout une allure amazighe fondamentalement authentique. Les racines ne sont jamais sacrifiées sur l’autel du tout moderne. Il ne faut pas trop dérouter l’auditeur, telle est la philosophie que le groupe essaye de faire sienne. Et à franchement parler, il y arrive très bien, trop bien même.

Si vous en avez l’occasion, n’hésitez donc pas à vous procurer ce magnifique album d’Amarg Fusion, je suis presque sûr que vous n’allez jamais le regretter. Mais de grâce évitez le piratage ou toute autre méthode illégale, car l’acheter est la seule manière d’encourager nos artistes à aller de l’avant et à continuer à nous donner de la joie et du plaisir. Vous n’êtes pas sans savoir que leur présence dans les "médias dits nationaux " n’est nullement souhaitée malgré la pléthore de boniments -qui ne trompent plus personne heureusement- des officiels hypocrites de Rabat sur une réhabilitation pour le moins fictive de l’amazighité.

N.B : si vous voulez en savoir davantage sur Amarg Fusion, vous pouvez effectuer une petite visite à leur site Internet : http://www.amarg-fusion.com/home/

mardi, septembre 19, 2006

Al-Anfal : la barbarie à l’œuvre

Après son procès portant sur l’affaire de Doujaïl, l’ex-raïs irakien Saddam Hussein et six autres coaccusés, tous dignitaires de son défunt régime, reviennent devant le Haut tribunal pénal irakien. Et ce pour s’expliquer, cette fois-ci, quant aux opérations tristement célèbres d’Al-Anfal. Les accusations sont extrêmement graves, par nature imprescriptibles : génocide, crimes de guerre, crimes contre l’humanité, utilisation d’armes chimiques, exécution massive de civils

C'était Saddam Hussein lui-même qui a décidé du choix de la dénomination d'Al-Anfal -butin de guerre selon la sémantique coranique-, qui n'est autre que le titre de la 8e sourate du Coran où est évoquée "Badr ", la première grande bataille gagnée par le prophète contre ses ennemis, tous d’irréductibles réfractaires aux recommandations de sa nouvelle religion. Il va sans dire, et vous en conviendrez, que la reprise de cette appellation est tout bonnement inappropriée, voire même impropre parce que les Kurdes sont musulmans. Peut-être même plus musulmans que Saddam et ses hommes liges.

En réalité, l'instrumentalisation de l'Islam- une constante de toutes les dictatures arabes- par un régime qui se disait paradoxalement champion de la laïcité, du modernisme et autre progressisme, est un truisme. Il fallait donner une légitimité à ses propres horreurs quitte à battre en brèche les principes les plus simples de la religion musulmane. Et comme l'explique l’avocat arabo-irakien, Zouhir Kadem Abboud -l’un des rares à prendre la défense des Kurdes-, "Saddam a donné au massacre des kurdes et à leur extermination massive les allures d’une mission quasi-divine. L’objectif étant de donner le change aux autres populations irakiennes et gagner par voie de conséquence leur soutien ".

Crimes récurrents
On est donc à une contradiction près, mais le régime baâthiste, comme à son accoutumée, n’en a cure. Son principal objectif est de trouver hic et hunc une "solution finale " pour le "problème kurde ". Car tout ou presque a été essayé (arabisation totale, déportation de populations, exécutions sommaires, pressions tous azimuts...), mais en vain. Le Kurde tel un roc est toujours là. Il faut donc, en dernier recours, lui appliquer la manière forte, d’une cruauté insoutenable, qui n’a rien à envier aux méthodes des régimes les plus totalitaires, les plus inhumains et les plus sadiques. Désormais, tout serait permis et rien n’arrêterait plus Saddam et ses sbires dans leurs entreprises criminelles.

Il y a lieu de signaler qu’Al-Anfal n’est malheureusement que le point d’orgue d’une série de boucheries perpétrées depuis 1979 par les armées de Saddam contre les Kurdes. Le président de l’Institut kurde de Paris, Kendal Nezan, a estimé le nombre de victimes, y compris celles d’Al-Anfal, à quelque 400 000 morts. On peut en citer sans vouloir être exhaustif le massacre en 1979 de milliers de chiites kurdes, la liquidation en 1983 de près de 800 hommes dans la région de Barzan, 40 enfants massacrés en 1984, disparitions forcées d’intellectuels et de militants kurdes (Mohamed Rachid Fattah, Dichat Mariwani...), exécution sommaire de toute personne soupçonnée d’avoir la moindre sympathie avec les maquisards kurdes…

En un mot, le Kurdistan, dans sa totalité, est devenu, progressivement, à son corps défendant, une immense nécropole jonchée de corps de milliers d’innocents. Leur seul crime, c’est d’être kurde et s’entêter de le rester. Ce qui mettait le régime baâthiste dans tous ses états, car convaincu que, au nom de la supériorité réelle ou supposée de la culture et l’identité arabes, toutes les autres cultures et identités ne peuvent, en aucun cas, avoir droit de cité sur le territoire irakien. Par conséquent, elles devaient, en définitive, être anéanties, exterminées. C’est très simpliste, mais c’était ainsi.

Génocide à huis clos

Khaled Sulaiman, journaliste montréalais d’origine kurde, qui a vécu douloureusement cette tragédie dans sa chair et dans son âme- elle y a perdu plusieurs membres de sa famille-, et qui a publié dernièrement tout un livre en arabe sur ce sujet, a eu une définition pour le moins pertinente d’Al-Anfal. " C’était, explique-t-il, une opération militaire, politique, nationaliste, idéologique de l’œuvre de Saddam en 1988 contre les populations kurdes d’Irak. Tous les moyens de répression imaginables et d’extermination massive y étaient utilisés : armes chimiques, avions, chars… pour arracher, au propre et au figuré, les Kurdes à leurs maisons, à leur terre et les massacrer collectivement, dans des conditions non encore élucidées, dans le désert irakien. "

Quel prétexte le régime de Saddam a-t-il invoqué pour déclencher Al-Anfal ? Suite à l’accusation faite aux principales formations politiques kurdes, l’union patriotique kurde (UPK) et le Parti démocratique kurde (PDK), d’être en collusion avec l’Iran, qui était en guerre contre l’Irak, Saddam a ordonné à son cousin, Ali Hassan Al-Majid, d’en finir une fois pour toute avec les Kurdes et " nettoyer" tout le Nord de l'Irak de leurs combattants armés, les fameux perchmergas.

Personnage très irascible, extrêmement sanguinaire et féru d’armes chimiques (d’où son surnom d’Ali Le chimique), celui-ci va déclencher contre les Kurdes entre 1986 et 1988 huit grandes opérations meurtrières. Y sont utilisées toutes sortes de gaz (le gaz moutarde et les gaz neurotoxiques) prohibés pourtant depuis la convention de Genève de 1925. Il n’y avait que l’homme fort de l’Italie fasciste, Benito Mossilini, qui l’a transgressée en les utilisant en Abyssinie. C’ est vous dire...

Ayant les pleins pouvoirs sur tout le Kurdistan irakien, il a décidé, en 1987, que dans ce territoire il y avait des "zones interdites" dont une bonne partie de leurs habitants sont considérés comme des insurgés et conséquemment des ennemis. Il a donc donné son feu vert de tuer toute personne s’y trouvant. C’était la mise en branle des opérations génocidaires de triste mémoire d’Al-Anfal, qui ont duré du 23 février au 6 septembre 1988.

Tous les villages sont détruits et leurs populations regroupées dans des camps spécialement aménagés à cet effet. Si elles sont soupçonnées du moindre lien avec les rebelles, elles sont immédiatement passées aux armes. Ceux qui ont eu la vie sauve ne sont pas mieux traités. Ils sont déportés au Sud de l’irak pour disparaître, à jamais. C’était le cas dans la région de Garmyan, vidée, presque totalement, d’une grande partie de ses habitants. Dans les zones difficiles d’accès, l’utilisation d’armes chimiques- déjà expérimentées plus tôt sur l’Iran- était la règle pour en chasser les combattants kurdes et tous ceux qui ont fui la répression féroce des forces armées de Saddam.

Reste que le massacre le plus connu et dont les images apocalyptiques ont fait, à l’époque, le tour du monde est naturellement la ville martyre de Halabja- une quarantaine d’autres villages ont subit le même sort-, bombardée impitoyablement du 13 au 16 mars 1988 avec une panoplie de gaz plus ou moins connus : sarin, tabun et vx. Des enfants, des femmes, des vieux y ont péri dans des conditions terriblement et horriblement atroces. Les estimations vont jusqu'à 5000 morts dans cette seule ville de 60 000 habitants, 20 000 contaminés à vie avec bien évidemment de très graves séquelles, et des milliers de réfugiés en Iran.

Néanmoins, les pertes globales d’Al-Anfal en biens et surtout en vies humaines dépassent tout entendement. " On parle au bas mot, affirme Khaled Sulaiman, de 182 mille personnes sur une population de 5 millions d’âmes -ce qui est énorme- qui ont été tué ou disparu depuis ces opérations militaires. Toutes les catégories d’âge étaient concernées, même les femmes, les enfants et les personnes âgées. Pour les hommes, n’en parlons même pas. "

Preuves accablantes

Devant une telle horreur absolue, Human Right Watch n’a pas hésité à comparer Al-Anfal au nettoyage ethnique dont sont victimes les malheureux juifs se trouvant en territoire soviétique conquis par les nazis, lors de la Seconde Guerre mondiale. Car, comme le démontre les archives du régime irakien, tout est planifié au détail près. Outre les forces armées, plusieurs administrations étaient directement impliquées. De fait, on avait carrément affaire à une véritable industrie de la mort.

" De tous les crimes de Saddam Hussein, Al-Anfal est sans doute le plus massif en termes de victimes, le plus systématique dans le temps, note le spécialiste du Kurdistan Chris Kutschera en ajoutant que (c'est) aussi le plus documenté : des tonnes de documents saisis dans les bureaux des services de sécurité irakiens par les Kurdes après le soulèvement de mars 1991, et transférés aux Etats-Unis, où ils sont entreposés aux archives nationales du Congrès. "

La Convention internationale pour la prévention et la répression du 12 janvier 1951 définit le crime de génocide comme "l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ". Ce qui s’applique immanquablement et à tout point de vue au cas kurde. Il est donc tout à fait normal que Saddam et ses lieutenants soient poursuivis pour des accusations de génocide. Ce que le tribunal n’aura pas beaucoup de difficultés à prouver. Déjà les premiers témoignages des victimes l’étayent amplement. D’autant plus que l’accès aux archives du régime défunt, qui avait la manie de tout mettre sur papier, est chose on ne peut plus aisée.

" Solidarité " arabe

La complicité des régimes arabes avec Saddam est incontestable. Non seulement au nom du nationalisme arabe -sur le déclin mais encore en vogue-, mais aussi parce qu’ils voyaient le cas kurde d’un mauvais œil. Certains d’entre eux ont au sein de leurs territoires des minorités – et même des majorités- religieuses et linguistiques très importantes qui risquent de prendre graine des Kurdes. Rien ne garantit qu’elles ne seraient pas tentées de faire de même et revendiquer, elles aussi, leurs propres Etats.

Il était donc urgent, impérieux même de tout faire pour tuer dans l’œuf toute possibilité de création d’un Etat kurde. L’Algérie de Boumediène, qui avait fort à faire avec ses propres Berbères, a d’ailleurs joué un rôle déterminant dans la signature de l’accord de 1975 par lequel l’Irak, fait rarissime dans les annales des relations internationales, a renoncé le plus simplement du monde à une partie de son territoire au profit de l’Iran. En échange, celui-ci s’est engagé à l’aider à mettre fin, irrévocablement, à l’irrédentisme kurde.

Ce marché qui n’a pas eu la vie longue. Car on connaît bien évidemment la suite. Quelques années après, la donne a subitement changé. L’Irak allait envahir l’Iran après la prise du pouvoir par Khoumeyni pour tenter de mettre un point d’arrêt à l’exportation probable de sa révolution islamique. Ce conflit meurtrier arrangeait bien, d’une part, les riches théocraties du Golfe qui n’ont d’ailleurs jamais lésiné sur les moyens pour soutenir Saddam contre "l’ennemi persan" -l’animosité arabo-iranienne date de plusieurs siècles- ; d’autre part, il servait grandement Saddam dans la mesure où l’Irak est composé d’une majorité de chiites, donc forcément très sensible à ce qui se passait chez le voisin iranien. Il fallait donc tout faire pour faire taire ses empêcheurs de tourner en rond kurdes. Parce qu’il y avait des choses plus importantes à faire.

Si incroyable que cela puisse être, dans une information rapportée à l’époque par le Guardian, les ambassadeurs arabes à Londres n’ont pas trouvé mieux que d’exprimer leur mécontentement envers la presse et le gouvernement anglais. Le seul tort de ces derniers était de dénoncer, même si c’était à des degrés divers, les pratiques criminelles de Saddam contre les populations kurdes.

L’histoire peut même malheureusement se répéter. Aujourd’hui même, au Darfour, la Ligue arabe n’a de cesse d’apporter, sans aucun scrupule, un soutien indéfectible au gouvernement soudanais, qui, par milices interposées, commet les pires atrocités contre ses propres populations. Leur seul crime, comme c’était le cas avec les Kurdes, c’est qu’elles n’ont pas cette chance inouïe d’être arabes.
Silence de l’intelligentsia arabe

Quant à l’élite intellectuelle arabe, le jugement de Khaled Sulaiman est sans concession. " À part, regrette-t-il, une minorité d’hommes de culture qui ont brisé tardivement- il faut le souligner- le silence comme Adonis, Hazim Saghia, Abbas Bidoun, Ilias Khouri, Waddah Charara et Hassan Daoud, la majorité composée essentiellement de gauchistes, de nationalistes et d’islamistes est restée prisonnière des perceptions habituelles du parti Baâth, qui, comme on le sait, tendent à voir dans le Kurdistan rien de moins qu’un second Israël. "

Mais l’attitude la plus intenable et la plus insupportable aussi- vu l’envergure de l’homme- est celle de l’un des esprits les plus brillants de sa génération, le penseur américain d’origine palestinienne, Edward Saïd. Celui-là même qui n’arrêtait pas de prendre son bâton de pèlerin pour dénoncer, sans cesse, les "injustices " faites aux Arabes et aux Palestiniens, n’a pas hésité à mettre en doute la véracité des massacres des Kurdes. Et s’ils ont réellement eu lieu, ils ne peuvent être, selon lui, que de l’œuvre de l’Iran.

Dans le London Review of Books, il avait écrit noir sur blanc que "l’information selon laquelle l’Irak a gazé ses propres populations a été répétée ici et là. C’était complètement non fondé. Il y a au moins un rapport militaire dont les conclusions montrent clairement que le gazage des Kurdes a été l’œuvre non pas de l’Irak, mais de l’Iran. Mais, personne n’a daigné les évoquer". Pire, encore, il n’a pas hésité à accuser Kanâan Makiya, l’un des rares intellectuels arabo-irakiens à rapporter, des épreuves à l’appui, les crimes de Saddam, d’être, si fantaisiste que cela puisse être, au service des Américains et même de travailler pour l’ex-président américain, Georges Bush père.

Halkwat Hakem, professeur et réfugié kurde en France, fait remarquer quant à lui, un peu désabusé que "le monde arabe ne parle jamais des crimes commis par le régime irakien contre les Kurdes, contre la population arabe. Pour quelles raisons ? Je pense que le monde arabe, qui a l’esprit et les yeux fixés sur le problème palestinien, ne veut pas qu’une autre question aussi juste soit-elle, soit exposée, exprimée au sein de sa population, surtout quand cette question concerne un pays ou un dictateur arabes et qu’elle peut de plus amener l’opinion publique à accorder moins d’importance au sort des Palestiniens car, en comparaison, la population kurde a beaucoup plus souffert que la population palestinienne. Assez souvent d’ailleurs, les Kurdes disent souhaiter avoir autant de droits et de libertés que les Arabes en Israël. Les Palestiniens ont la possibilité de mener une Intifada : en deux ans, il y a eu 2000 tués palestiniens. En un quart d’heure, Saddam Hussein, le chantre du nationalisme arabe, a tué 5000 personnes, et, contrairement aux Palestiniens dont la cause est défendue à travers le monde, personne n’a rien dit ".

Complicité occidentale

Si l’attitude bienveillante des pays du bloc communiste est tout à fait logique, le silence assourdissant du monde occidental, c’est-à-dire des pays démocratiques et des droits de l’homme, par rapport aux atrocités de Saddam est tout simplement inacceptable, immorale et scandaleux. Elle s’explique pour essentiellement deux raisons :

La première, c’était que l’Irak et son régime sont devenus par la force des choses des protecteurs des intérêts euro-américains dans ce Moyen-Orient extrêmement sensible. Surtout après la prise du pouvoir à Téhéran par les Islamistes et l’exil de l’un des alliés les plus sûrs notamment des Américains et accessoirement des Européens dans la région, le Shah d’Iran. Il faut en plus éviter par tous les moyens la "contamination " des pays voisins, très proches si ce n’est carrément inféodés à l’Occident, par la "révolution islamique " de Khoumeyni, par essence anti-occidentale.

L’Irak apparaît donc comme le seul rempart à même de stopper net le nouveau régime iranien dans ses visées révolutionnaires. D’où le lancement de la guerre Iran-Irak qui allait durer quelque huit années pendant laquelle le soutien à Saddam occidental a été constant, total, aveugle même. Le 20 décembre 1983, le futur secrétaire américain à la défense, Ronald Rumsfeld, celui-là même qui a tout fait que pour les États-Unis interviennent en Irak, ne s’est pas embarrassé pour prendre le chemin de Bagdad et aller serrer la main du dictateur Saddam.

" C’était encore lui qui prépara sans scrupule les arrivages de produits chimiques, qui allaient servir, en 1988, au gazage des habitants du village kurde de Halabja, au Nord de l’Irak. C’était, en outre, les armes de l’aide militaire américaine qui permirent aux troupes irakiennes d’envahir le Koweït le 2 août 1990 ", à en croire e journaliste Ryadh Fékih.

Pire, quelques mois après le martyre insoutenable de Halabja, les Américains n’ont eu aucun mal à accorder 1 milliard de dollars de crédits supplémentaires au dictateur de Bagdad. C’est vrai qu’à l’époque, Saddam n’était pas encore devenu, pour les Américains, le monstre, le psychopathe, le nouvel Hitler… et autres sobriquets non moins éloquents. On pouvait encore compter sur lui. Par voie de conséquence, il ne fallait rien lui refuser.

La deuxième, c’est la vente des armes au régime irakien. Ce qui pose à coup sûr un problème de conscience pour certains pays européens. Le cas de la France est très édifiant à ce niveau. La fameuse "politique arabe " de la France, héritée de Gaulle, ne peut pas tout expliquer. Et c’est le cas de le dire. Il faut rappeler que, à l’époque, l’Irak était considéré par l’establishment français comme un nouvel Eldorado. Car le pays a besoin de tout et en plus, il est plus que solvable, immédiatement.
Notre ami Saddam

Sur ces entrefaites, il ne fallait pas être étonné que la France soit devenue le deuxième fournisseur en armes à Saddam juste après l’Union soviétique(c’était ce pays qui lui a fourni son premier réacteur nucléaire). Ses relations avec l’Irak date de la fin des années 60 du siècle passé lorsque le général De Gaulle était encore au pouvoir. Elles ont continué, voire se sont renforcées, sous la présidence de G. Pompidou. C’était d’ailleurs en 1972 que le futur président d’Irak, Saddam Hussein, a effectué sa première visite officielle en France.

Le rapprochement militaire entre les deux pays allait donc crescendo surtout avec Jacques Chirac comme Premier ministre de Giscard d’Estaing. Jugeons ce qu’il dit à Saddam en septembre 1975 : " Vous êtes mon ami personnel. Vous êtes assuré de mon estime, de ma considération, de mon affection. " Voilà, la messe est dite. C’était d’ailleurs lors de sa présence à Matignon que la coopération nucléaire a été signée. Même si la France se défendait de lui avoir livré que du nucléaire civil, les Israéliens n’ont voulu rien savoir. Ils ont bombardé en 1981 le réacteur irakien " Osirak ". Pour les autres armes conventionnelles, la France ne refusait absolument rien au régime irakien. Comment peut en être autrement alors que Saddam, appelée par flagornerie le " Richelieu arabe ", payait rubis sur ongle ?

Sous la présidence socialiste, la France ne changera pas d’un iota la nature de ses rapports avec Bagdad. François Mitterand a eu cette phrase on ne peut plus révélatrice en évoquant le conflit irako-iranien : "Nous ne voulons pas la défaite de l’Irak. " " À l’époque, explique avec une ironie acerbe Frédéric Pagès, le journaliste du Canard enchaîné, on trouve tant de vertus à Saddam. La laïcité, le socialisme du baâth, ‘’l’émancipation des femmes irakiennes’’ servent d’alibis. Cet Etat ‘’jacobin’’, centralisé, moderniste, a renversé la monarchie en 1958 aux accents de ‘’La Marseillaise’’ et de ‘’La Carmagnole’’. Cela autorise bien quelques ‘’Vendées’’ sanglantes ? "

En fait, la France a été toujours à la disposition totale de Saddam. Toutes les armes françaises qu’il souhaitait lui étaient livrées illico presto. Pour résumer, on trouve dans ce cas de figure l’application concrète, cynique même de la célèbre phrase de Gaulle : " La France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts ". Nous sommes tentés de dire qu’elle n’a pas non plus de principes. L’humanisme, la démocratie et les droits de l’homme dont tous les hommes politiques français n’arrêtent pas de se gargariser, toutes tendances confondues, s’en trouvent sacrifiés sur l’autel des intérêts purement mercantiles. Cités par Frédéric Pagès, Paul Angeli et Stéphane Menier écrivent dans leur livre Notre Allié Saddam qu’ "un président (Miterrand ) et trois Premiers ministres, Mauroy, Fabius et Chirac, ont fait l’impasse sur les exploits de l’Irak en chimie appliquée ".

Justement en évoquant les armes chimiques, ce n’était pas Saddam qui les a fabriquées. C’était, encore une fois de plus, en plus des Américains, les Allemands et les Anglais les lui ont fournies, abondamment. D’où bien évidemment la gêne pour le moins perceptible des chancelleries occidentales et même communistes, et la timidité évidente de leur condamnation des crimes atroces commis au Kurdistan.

Seuls le Canada et les pays scandinaves -et c’est à leur honneur- ont eu le courage de le brocarder, sans ménagement. Amnesty International n’est pas en reste. Cette organisation, toujours à l’affût, n’a pas hésité à dévoiler au monde entier l’hypocrisie des pays occidentaux. En effet, on peut lire dans l’un de ses rapports que "dix-sept entreprises britanniques figurant sur la liste des sociétés ayant vendu à l’Irak des technologies permettant de construire des fusées ou des armes nucléaires, biologiques, chimiques ou conventionnelles (...). (…) 24 sociétés américaines ont vendu des armes à l’Irak ainsi que des technologies pour des armes nucléaires et des fusées. En outre, environ ‘’50 filiales d’entreprises étrangères ont mené leurs transactions portant sur la fourniture d’armes à l’Irak depuis le territoire des Etats-Unis’’. L’Allemagne apparaissait comme le plus important partenaire de l’Irak dans le secteur de l’armement, avec 80 entreprises ayant vendu des technologies militaires à Bagdad ".

Catharsis, peut-être !

Cela étant dit, la chute du régime baâthiste de Saddam - peu importe comment et par qui- a été accueilli à juste titre avec beaucoup de soulagement par les populations kurdes et chiites. Le principal pour elles, c’est qu’il ne soit plus au pouvoir et s’il est jugé, c’est encore mieux. D ’ailleurs, on n’ergotera pas indéfiniment sur les modalités de son procès, mais une chose est sûre, celui-ci serait l’occasion pour les victimes encore vivantes de se mettre en face de leur bourreau, affaibli, complètement démuni.

Qui sait ! Peut-être arriveraient-elles à tourner, en définitive, la page et à envisager l’avenir sans ce "monstre ". Un monstre qui n’est – est c’est tellement vrai-, encore une fois selon Khaled Sleiman, qu’ "un produit de ce que la culture occidentale a de plus violent en elle et la mentalité clanique, tribaliste et chauvine arabe ". Le très controversé Bernard Lewis, le célèbre universitaire britannique installé aux Etats-Unis, abonde d’ailleurs dans le même sens, si ce n’est plus, en considérant le parti baâth ni plus ni moins qu’un clone du parti nazi.

Et comme on le sait, le nazisme, le fascisme et autre totalitarisme sont à l’origine des phénomènes éminemment occidentaux. Sans vouloir dédouaner Saddam, en fait, si on y réfléchit de près, il n’a finalement rien inventé. Il n’a fait en quelque sorte que s’inspirer, avec la bénédiction des démocraties occidentales, de tous les anciens dictateurs européens. Staline entre autres qu’il considère, à titre de rappel, comme son modèle d’homme politique.

mercredi, septembre 13, 2006

Maroc : on méprise les Amazighs et on ne s’en cache même plus

On sait tous que le journal le Matin est le porte-voix du régime marocain à telle enseigne que l’on l’appelle ironiquement le Matin du Makhzen. Si inaccoutumé que cela puisse être, c’est sur ses colonnes qu’est publié un article d’une rare objectivité et sans concession aucune sur l’enseignement de la langue amazighe. Au début, je n’en croyais pas mes yeux tellement que cela semblait inimaginable que ce soit le Matin, passé maître dans l’infantilisation de son lectorat, qui ose publier un tel papier. En fait, ce n’est pas que l’on ait à cœur la réussite de l’intégration de l’amazigh à l’école. Oh que non ! Le message presque direct que l’on veut transmettre est ainsi : on a fait de l’enseignement du tamazight un vrai bide et on le crie sur tous les toits.

Rédigé par une certaine Dounia Z. Mseffer, celle-ci nous égrène presque en détail toutes les entraves mises, volontairement et délibérément, - il faut dire ce qu’il y a- pour faire de l’enseignement de la langue de Hemmou Outtalb et autre Haj Belaid une véritable mascarade, qui ne doit certainement pas faire rire les Amazighs et leurs intellectuels. Mais de qui se moque-t-on ? Les officiels marocains doivent certainement penser que nous, les Amazighs, sommes tellement bêtes et cons que nous allons gober leurs manigances cousues de fil blanc. A mon sens, qu’on se le dise franchement, il n’y a pas d’autre explication et je défie quiconque de m’apporter une autre que celle-là.

La liste des obstructions est un véritable chapelet de duperies : les enseignants n’ont qu’une petite formation de 15 jours, ce qui n’est aucunement suffisant ; les manuels scolaires ne sont nullement disponibles à cause d’un " oubli " - je n’ai pas pu m’empêcher de rire- du ministère de " l’Éducation nationale ", ce qui n’arrive, vous en conviendrez, que lorsqu’il est question de l’amazighité ; l’inexistence d’un emploi du temps pour l’enseignement de l’amazigh ; la promesse fumeuse et sans lendemain du même ministère de la distribution gratuite des livres scolaires.

Et ça continue, malheureusement : certains directeurs d’école, et cela n’arrive qu’au Maroc, refusent simplement et naturellement- là je ne suis pas empêché d’avoir carrément un fou rire-, comme de capricieux dictateurs tyranniques, de permettre l’enseignement de l’amazigh, et même si c’est le cas ils en réduisent drastiquement les heures qui lui sont consacrées ; et si par le plus grand des hasards, l’enseignement est dispensé en 1ère année, en 2e année ils le suppriment sans aucune explication, et parfois c’est le contraire ; le refus du gouvernement marocain d’intégrer l’amazigh à l’université bien que l’hébreu y soit on ne peut plus présent, ce qui ne peut être expliqué que par la haine héréditaire, viscérale et constante de l’autochtone amazigh et de sa culture.

Enfin, et c’est vraiment le comble des combles, et là on a atteint carrément les summums de la bêtise, imaginez qu’on a fait appel aux Arabes, qui représentent dans certaines régions parfois 40% des professeurs, pour enseigner une langue qui est quasiment du chinois pour eux … Il faut le faire et au Maroc, on le fait, le plus naturellement du monde. Et comme le dit si bien le fameux dicton arabe et dans le texte, " ida kunta fi biladi almaghribi, fala tastaghrib " ( lorsque tu es au Maroc, il ne faut pas trop t’étonner ).

C’est ce qui a fait dire au Professeur Meryam Demnati, membre de l’Institut royal de culture amazighe ( IRCAM), que tout le monde ( les cadres, les délégués et même le plus petit des fonctionnaires) dans le ministère de " l’Éducation nationale " ( on se demande vraiment qu’est-ce qu’il a de national) s’est allié pour mettre en échec toute possibilité d’un enseignement réellement acceptable et véritablement viable de l’amazigh. Les recommandations du dahir du roi, qui ont normalement force de loi, s’en trouvent frappées de nullité– et c’est une première dans l’histoire contemporaine du Maroc. Est-ce que le roi est au courant ? Certainement. L’IRCAM l’a probablement informé, mais jusqu’à présent rien n’est fait pour remettre les choses à l’endroit. Et rien ne nous dit que quelque chose va être fait. On laisse donc faire, jusqu’à quand ? Seul Dieu connaît la réponse.

Pour notre part, l’on ne va pas expliquer cette situation par un quelconque complot- en tous les cas les complots ne font pas partie de notre culture-, qui est par nature secret, mais là nous avons une stratégie implacable d’échec, visible au monde entier, appliquée avez zèle et beaucoup d’ardeur par le régime marocain et ses sbires. On méprise allègrement les Amazighs chez eux, sur leur terre, et on l’étale, avec beaucoup d’esbroufe, sur ses propres journaux. Et comme disait nos anciens qui doivent certainement se retourner dans leur tombes, " wanna ur yummern, isu ilil s tghnjawt " ( celui qui n’est pas content, qu’il aille boire la mer entière avec une petite cuiller).

On va donc subir cette énième humiliation, en silence, comme on l’a toujours fait, en attendant des jours meilleurs. Pendant ce temps là, le régime marocain n’a des yeux que pour ses frères, sa langue et sa culture arabes. Parce qu’il est fondamentalement arabe, si ce n’est carrément arabiste. Pour les Amazighs, qu’ils aillent se faire cuire un œuf ailleurs, comme dirait l’écrivain Fouad Laroui. Mais une chose est sûre, et même si je suis convaincu que je prêche presque dans le désert, en s’entêtant à rabaisser tout un peuple pacifique, accueillant, on ne fait qu’insulter l’avenir. Qui vivra verra !

Saida Akil: femme faite virtuosité

Même si Saïda Akil, Titrit de son nom d’artiste, a vu le jour à Toulal dans la région de Meknès, sa famille est originaire d’Igourramen dans les environs d’Imtgheren ( Errachidia), au Sud-Est du Maroc. Une région connue par la fierté et le courage de ses habitants. Elle a en effet donné plusieurs grandes personnalités, qui ont apporté et qui apportent toujours, énormément, à la culture amazighe, dans tous les domaines de création. Saïda Akil, vu son immense talent musical, peut aisément prétendre avoir une place de choix dans le Panthéon de ces hommes et femmes, intraitables lorsqu’il s’agit de leur culture et de leur identité amazighes.

En fait, sa recontre avec le chant et la poésie remonte à loin, plus exactement à sa tendre enfance. Encore toute petite, sa défunte maman la berçait avec les " izlan ", ses légers poèmes amazighs que l’on transmet de génération en génération, depuis la nuit des temps. Elle en a d’ailleurs mémorisé plusieurs qu’elle peut fredonner, encore aujourd’hui, à tout moment, avec sa voix terriblement sensible et suavement chaleureuse.

Si sa mère a été pour quelque chose dans sa vocation musicale, encore fallait-il entretenir la " flamme " et même, pourquoi pas, la développer, la faire évoluer. Ce que Saïda Akil n’avait de cesse de faire, contre vents et marées. Le chant, sans vouloir exagérer, est quasiment consubstantiel à sa vie, il fait partie de son essence, même si quelques membres de sa famille et la société, d’une manière générale, ne le voyaient pas de cet œil. Ce qui a exigé de sa part un combat de tous les instants, pour pouvoir réaliser son rêve le plus intime : chanter. D’autant qu’elle le fait bien, très bien même.

En effet, enfant et adolescente, elle avait une capacité déconcertante à imiter les plus grandes voix de la chanson mondiale, doublée d’une oreille musicale hors pair. Elle allait donc écumer toutes les fêtes scolaires auxquelles elle prenait part, avec beaucoup d’enthousiasme. C’était là qu’elle avait pris goût aux plaisirs de la scène, vu que tout le monde appréciait, toujours, à chaque fois, sans exception, ses prestations. Et tous ses professeurs n’avaient qu’un mot d’ordre à la bouche : " Il faut continuer ! "

Inscrite en anglais à l’université de Meknès, Saïda Akil s’essayait à la composition dans la langue de Shakespear. Toujours encouragée par ses camarades de classe et ses professeurs, elle n’hésitait jamais à pousser la chansonnette devant leur emballement quasi collectif. Chemin faisant, elle a pu participer, pour la première fois, en 1987, à " Nadi al-bayda " , une émission de la Radio Télévision marocaine (RTM), animée par Nasima El Horr. Elle y a interprété, avec brio, une partie du répertoire de Dolly Parton et quelques chansons de sa propre composition. En anglais, s’il vous plaît. D’ailleurs, elle a produit dans cette langue pas moins de 54 chansons.

Son destin est donc tout tracé sauf que le discours revendicatif amazigh, qui s’imposait de plus en plus dans les années 80, est venu s’emmêler. Il n’allait aucunement laisser Saïda Akil insensible. Le tournant dans sa carrière, qui n’attendait que le moment propice, allait avoir lieu. Ainsi, elle a renoué définitivement avec son identité amazighe et a fait un point d’honneur de ne chanter désormais, uniquement et exclusivement, que dans sa langue maternelle, le tamazight. C’est ce qu’elle a fait et ce qu’elle continue de faire – et de quelle manière. Car grâce à son style très original, elle a apporté une touche féminine moderne, légérement occidental, à une chanson amazighe qui en a grandement besoin.

Son aventure avec la chanson amazighe a démarré sous une bonne lune. Elle a participé avec l’un des plus talentueux guitaristes du Rif, Khalid Izri, au concours de l’émission " Musica ", organisé en 1990 par Jacqueline Aliolie au lycée Descartes à Rabat. C’était à partir de là qu’elle allait former avec lui un duo des plus originaux, car très rare dans les moeurs musicales des Nord Africains. Même si elle n’avait rien emporté ce jour-là, reste que l’impression du jury a été largement positive.

Quelque temps après, lors d’une compétition musicale organisée par la RTM, elle a remporté, en solo, son premier prix, en jouant elle-même de la guitare alors qu’elle ne l’avait jamais réellement apprise. Ce qui a surpris tous ceux qui la connaissaient. Ce n’était que par la suite qu’elle avait déployé beaucoup d’efforts pour parfaire ses connaissances de cet instrument en s’inscrivant au Centre culturel français.

En 1991, la consécration est enfin arrivée. D ’une part, elle a produit son premier album, " maymmi ? ", qui a eu un succès phénoménal auprès des mélomanes amazighe, d’autre part, son duo avec Khalid Izri a eu son premier fruit en emportant haut la main, le très prestigieux prix " Média ", décerné chaque année par Radio France Internationale (RFI). Un prix qui lui a été remis à Cotonou au Bénin où elle a animé deux galas avec les plus grandes stars de la chanson africaine, Angélique Kidjo et Mano Bango pour ne citer que ceux-là.

Elle a été invitée, ensuite, toujours par RFI, à effectuer un stage dans le cadre de la chanson francophone au Salon de Provence à Avignon. Dans les ateliers qui y étaient offerts, elle y a perfectionné ses connaissances musicales et chorégraphiques. Une expérience qu’elle qualifie elle-même de très positive. Elle a fait également plusieurs tournées nationales et internationales (Maroc, France, Hollande…). Elle continue à animer, avec plaisir, les activités culturelles amazighes auxquelles elle est conviée.

Pour des raisons personnelles, elle a été obligée de mettre sa carrière en veilleuse, mais, dernièrement, elle est revenue et avec du nouveau. En femme courage et de caractère aussi – ce n’est jamais évident une femme musicienne et amazighe surtout dans un pays comme le Maroc -, elle a pu sortir un opus de très bonne facture, comme on s’attendait. Son titre est " uccigh am ul inu ". Si jamais vous avez l’occasion de l’écouter, vous mesurerez tout le talent de cette grande dame de la chanson amazighe.