" Les pays arabes du Golfe seront en danger si jamais ils se décident à accorder massivement la citoyenneté aux travailleurs immigrés, car cela risque de changer radicalement leur composition ethnique et culturelle ", tel est l’essentiel de ce qui ressort des propos alarmants tenus par le ministre bahreïni du travail, Majid Ben Mouhsine al-Alaoui, le 15 janvier 2006, lors d’un entretien avec le journal panarabe, Asharq-alawsat.
Le ministre a tout à fait raison de s’inquiéter car le Golfe est la seule région au monde où les populations de souche sont minoritaires. Il faut dire que le boom économique qui a suivi l’exploitation des richesses importantes en pétrole, les besoins étaient énormes en termes de main d’œuvre. Il était donc tout à fait logique de faire appel aux étrangers. Mais pas n’importe lesquels. Il fallait qu’ils fussent dociles et bon marché. Ce qui fut décidé, fut appliqué. Dès le début des années soixante-dix, des milliers et des milliers d’Indiens et de Sri lankais ont été invités pour travailler moyennant des salaires dérisoires dans les multitudes de chantiers et d’usines qui avaient éclos un peu partout dans la région.
Des décennies après, l’on vient se rendre compte d’une chose importante : ils sont, dans la majorité des cas, hindous, boudhistes et même chrétiens. Autrement dit, ils ne sont ni musulmans et encore moins arabes. Ce qui, à terme, peut constituer un gros problème pour les pays hôtes. D’où les craintes justifiées, mais légèrement exagérées, du ministre Bahreïni du travail qui affirme qu’ " il est possible que la culture arabe disparaisse à jamais dans le Golfe, qui risque de devenir un melting pot qui n’a absolument rien à voir avec les valeurs et l’identité de cette région du monde ".
Il a mis en garde les gouvernements locaux contre les dangers de toute décision internationale ou de lois législatives qui tendraient à les obliger à accorder la citoyenneté du pays d’accueil à ces immigrants. D’où son appel à limiter drastiquement leur nombre par un certain nombre de mesures pour le moins expéditives.
Cependant, une question se pose : pourquoi donc les monarchies richissimes du Golfe, si elles avaient réellement à cœur la défense de leur identité, n’ont-elles pas fait venir les millions d’Égyptiens et de Jordaniens misérables qui ont le mérite d’être arabes et de surcroît musulmans ? Pour une raison simple : se méfiant comme de la peste de leurs voisins, les pays du Golfe ont peur d’une déstabilisation de leurs pouvoirs par une présence forte de leurs ressortissants. Ils ont donc opté pour des pays lointains et de culture complètement différente. Sauf qu’il y a un prix à payer, ce dont s’inquiète à juste titre le ministre Bahreïni.
Lahsen Oulhadj