jeudi, septembre 18, 2014

Uḍhir Uffir ou la poèsie de l’instantané

Belkacem Ihijaten, le très talentueux poète kabyle a encore frappé un grand coup avec son recueil, Uḍhir Uffir (À travers la brume). Et c’est le moins que l’on puisse dire. Publié chez l’Harmattan, il y a quelques temps déjà, il se lit d’une seule traite. Tellement il est élégamment simple ! Dans le sens positif du terme bien naturellement. Ne dit-on pas que faire simple est on ne peut plus difficile et ardu ?

En tous les cas, à titre personnel, j’ai beaucoup aimé cette œuvre de M. Belkacem.  Car elle m’interpelle à plus d’un titre. De par les sujets qui y sont traités, mais aussi de par cette conscience identitaire kabylo-amazighe qui la traverse d’un bout à l’autre. Je dirais même qu’elle en est l’ossature plus que visible.  Ce à quoi je suis bien sûr très sensible, car je suis moi-même amazigh.

Les poèmes ont tous la même forme : des strophes de neufs vers ou des neuvains. Ils sont comme des impressions poétiques produites par une inspiration fortuite que le poète griffonne, de son aveu même, sur un morceau de papier pour ne pas les oublier. Au fur et à mesure une œuvre tout entière se met en place. Il ne reste qu’à relire le tout pour le publier. M. Ihijaten est ainsi et restera probablement toujours ainsi : un poète de l’instant et de l’immédiat par excellence.

Quid des sujets traités dans ses poèmes ? On y trouve du tout. Mais son pays y est une obsession permanente. En commençant par son village natal, Gendoul. Ensuite, la Kabylie qui  a une place de choix dans ses écrits. Et enfin, l’Algérie, cette grosse entité politique en plein milieu de l’Afrique du Nord qui englobe tout ce beau monde.

Quant au style, je ne vous le cache pas : par moment, il est par trop déroutant. Même si à titre personnel, j’y trouve bien évidemment les accents de la légende poétique amazighe, Ssi Mohand Ou Mohand. Ce qui est tout à fait normal. Ses poèmes ont bercé de bout en bout toute la vie de l’auteur.  Comme tout Kabyle qui se respecte.

Mais, chose étrange,  par moment, le ton général me rappelle non pas celui d’un poète quelconque, mais précisément celui d’un écrivain bien connu, je veux parler de Nietzsche, particulièrement dans son œuvre magistrale, Ainsi parlait Zarathoustra. Ce qui donne aux textes de M. Ihijaten une aura très joliment spéciale et particulière, si je peux dire les choses ainsi.

Pour davantage rendre accessible son texte aux lecteurs non-amazighophones, M. Ihijaten a tenu à ce que ses poèmes soient tous traduits dans un français plus que châtié qui révèle, à mon humble avis, l’essentiel de sa magie poétique. Comme quoi, chers lecteurs, vous n’avez plus aucune excuse d’aller vous procurer, illico presto, le recueil et le lire ! Je suis sûr et certain que vous n’allez jamais le regretter.