Le cinéma amazigh, avec une production incroyablement importante, est devenu en un laps de temps plus qu’incontournable. C’est même devenu un véritable phénomène de société tellement il est l’objet d’un engouement qui ne se dément jamais. Quelques études lui ont été consacrées dans quelques universités nord américaines, mais peu a été fait par les intéressés eux-mêmes, à savoir les Amazighs. Omar Idtnayn a été le premier à se lancer en publiant dernièrement un livre à ce sujet. Dont le titre est À propos du film amazigh : écrits et opinions. Nous l’avons contacté pour répondre à quelques-unes de nos interrogations.
Peu de gens vous connaissent, est-ce que vous pouvez vous présenter ?
Je suis né dans la ville de Masst en 1977. J’ai complété mes études secondaires à Agadir. Je me suis inscrit par la suite à l’université où je ne suis resté malheureusement qu’une seule année. J’ai fait du travail associatif très tôt. Mais ce n’est qu’en 1997 à Agadir que je me suis intéressé de très près aux associations amazighes. C’est alors que je suis devenu membre d’Afrak, une association très active chez moi à Masst. À Rabat où je me suis installé, je suis devenu adhérent de la fameuse association marocaine de recherche et d’échange culturels ( AMREC).
Pourquoi avez-vous écrit un livre sur le cinéma amazigh ?
L’idée d’une publication sur le cinéma amazigh n’est pas le fruit du hasard. En fait, j’ai été toujours proche de ce milieu. Un intérêt qui remonte à mes années d’études au lycée. Plus tard, j’ai écrit nombre d’articles critiques que j’ai publiés par la suite dans la presse nationale. J’ai même été à l’origine d’un ciné-club au sein de l’association Afrak, qui se penche régulièrement sur les questions du 7e art et de l’audiovisuel d’une manière générale. Mon livre vient donc à point nommé en essayant de remplir, modestement, un vide criant concernant le travail critique sur le très jeune cinéma amazigh. Je dis jeune parce qu’il n’a en fait que 16 ans, à savoir depuis la sortie du film de « Tamghart ww urgh » en 1991, dont le réalisateur n’est autre qu’ El-Houssayn Bizgaren.
Mais qu’est-ce qui vous a motivé le plus pour aller de l’avant ?
La raisons qui m’a poussé le plus pour publier ce livre est le désintérêt total manifesté par les critiques marocains vis-à-vis de ce cinéma, qui, à ce jour, a à son actif un nombre phénoménal de titres. Et ce en un temps record. Tous les articles que j’ai déjà publiés à ce propos dans la presse ont fini par me convaincre d’aller de l’avant. Et ce pour sortir cette expérience cinématographique originale de l’exclusion et du mépris que lui vouent certains. D’ailleurs, j’ai remarqué dernièrement que beaucoup de films amazighs sont déjà introuvables sur le marché alors que la bibliothèque nationale, ce qui est quand même son rôle, n’a fait pas le moindre effort pour réaliser même une liste approximative de cette production cinématographique et à plus forte raison en garder des copies pour des objectifs de recherche.
Quels sont les sujets que vous avez évoqués dans votre livre ?
Le livre se compose de deux grandes parties. Si dans la première j’ai analysé quelques exemples de films de réalisateurs différents, dans la deuxième je me suis penché plutôt sur les thèmes abordés dans ces films : l’émigration, les tabous de la société...
D’après vous, quelles sont les raisons du succès du cinéma amazigh ?
Les succès relatifs du film amazigh peut s’expliquer pour des raisons objectives : la frustration du public amazigh à cause de l’exclusion totale dont il a été l’objet par les médias publics. Ainsi, le film amazigh a été une sorte d’exutoire et un espace qui a permis, enfin, de se voir et d’être vu. D’autant plus que la démocratisation de l’accès à la vidéo, à la fin des années 80 et le début des années 90, a été une bénédiction pour une grande partie de la population incapable de comprendre ce qui se dit dans les télévisions nationales. Il y a également des raisons subjectives qu’il ne faut pas oublier. En fait, elles sont tellement nombreuses qu’elle serait vain de toutes les citer, mais on va juste se contenter d’en évoquer une : l’homme amazigh avait, pour la première fois de son histoire, le sentiment d’être proche de ces films que ce soit au niveau de la langue, du contenu et même de l’espace.
Quels sont encore les défauts de ce cinéma ?
Il souffre toujours de nombre d’imperfections sur plusieurs niveaux : l’essentiel de la production se fait encore en vidéo, ce qui est vraiment dommage ; les décors restent toujours rustiques et les personnages sont pour le moins niais, ce qui a pour résultat de provoquer et maintenir un tas de préjugés sur l’homme amazigh ; la primauté de l’amateurisme loin de tout professionnalisme ; le traitement des mêmes sujets ennuyeux sans faire aucun effort d’aller explorer d’autres horizons ; les conditions de travail du personnel sont loin de répondre aux normes légales et professionnelles, on travaille avec la même équipe sur plusieurs productions avec des contrats pas toujours clairs ; le soucis du gain rapide au détriment des exigences artistiques, esthétiques et civilisationnelles... Toutes ces raisons ont fait que l’engouement du public risque, à terme, de diminuer si rien n’est fait.
Comment peut-on faire pour atteindre le niveau international ?
On peut y arriver si nous avons des œuvres qui répondent aux exigences de qualité professionnelle et artistique mondialement reconnues. J’en veux pour preuve, le film de « Sat taddangiwin » de Abdellah Dari, qui a raflé deux importants prix au festival de la radio et de la télévision du Caire. En tous les cas, à mon point de vue, l’avenir du cinéma amazigh est très prometteur. Surtout avec l’avènement d’une nouvelle génération de jeunes cinéastes pourvus de formations dans le domaine et ayant de nouvelles idées qu’ils s’impatientent d’appliquer.
Ne serait-il pas intéressant de créer une école de cinéma à Agadir ou Tiznit pour accompagner cet emballement pour le cinéma ?
Je pense que ce serait une très bonne idée de créer une école de cinéma dans le Souss. Car cela va permettre d’aller encore plus loin. Surtout que la région possède tous les atouts à même de permettre le développement d’une véritable industrie cinématographique : des décors merveilleux, des talents nombreux et un marché important. Je pense que la construction d’un complexe de salles de cinéma à Agadir n’est que la conséquence logique de toute cette effervescence créatrice.
Comment expliquez-vous la persistance du boycott des médias publics marocains de la productions amazighe ?
Il ne faut pas avoir peur de dire que la qualité est loin d’être une caractéristique de la production nationale et pas seulement amazighe. Je suis convaincu que seule la qualité ouvre toutes les portes. Pour preuve, le film de Hemmou Ou Namir de Fatim Boubekdi qui a été programmé par 2M. Parce qu’il a eu un succès fantastique auprès du public qu’il soit amazighophone ou pas. En fait, pas que cela, c’est aussi et surtout un film extrêmement bien fait.
La commission d’aide à la production cinématographique a accordé la bagatelle de plus de 11 millions de dirhams au film arabe alors qu’elle n’a donné qu’un petit million et des poussières à un seul et unique film amazigh, qu’en pensez-vous ?
Je ne pense pas que la dite commission a exclu le tamazight. En fait, il faut voir les choses autrement, à savoir que le darija s’est imposé. Malheureusement dans la production amazighe, nous avons encore des faiblesses qu’il faut absolument corriger. Le scénario par exemple. Et justement l’IRCAM a vu juste en organisant en partenariat avec le ministère de la communication des sessions de formation au profit des scénaristes amazighs. Je suis intimement convaincu que le film amazigh a toutes ses chances à condition bien évidemment de proposer des dossiers bien ficelés. Ça va venir certainement !
Le piratage n’est-il pas une épée de Damoclès au-dessus du cinéma amazigh ?
En effet, le film amazigh est victime du piratage à grande échelle. Dans l’absence totale de tout soutien public, sa seule ressource reste la commercialisation sous forme de DVD. D’où les menaces terribles qui pèsent sur lui. Malgré les efforts des autorités pour en finir avec ces pratiques frauduleuses, la situation est toujours la même malheureusement. À mon sens, il faut que les producteurs se mettent au 35 mm pour assurer d’autres ressources en projetant leurs films dans les salles obscures.
Que pensez-vous du marché accordé à Nabil Ayyouch par le minsitre de la communication ?
Cette affaire a provoqué une levée de bouclier de beaucoup de professionnels du cinéma à cause de l’absence de tout appel d’offre. Surtout que la somme en jeu est on ne peut plus importante. Il s’agit en fait de plus d’un milliard de centimes. Mais ce qui m’intéresse personnellement, c’est le niveau technique des films produits jusqu’à maintenant. J’ai remarqué qu’il y a eu nombre de maladresses au niveau du tifinagh dans le générique par exemple. Ajoutons à cela que la qualité n’est pas toujours au rendez-vous.
Peu de gens vous connaissent, est-ce que vous pouvez vous présenter ?
Je suis né dans la ville de Masst en 1977. J’ai complété mes études secondaires à Agadir. Je me suis inscrit par la suite à l’université où je ne suis resté malheureusement qu’une seule année. J’ai fait du travail associatif très tôt. Mais ce n’est qu’en 1997 à Agadir que je me suis intéressé de très près aux associations amazighes. C’est alors que je suis devenu membre d’Afrak, une association très active chez moi à Masst. À Rabat où je me suis installé, je suis devenu adhérent de la fameuse association marocaine de recherche et d’échange culturels ( AMREC).
Pourquoi avez-vous écrit un livre sur le cinéma amazigh ?
L’idée d’une publication sur le cinéma amazigh n’est pas le fruit du hasard. En fait, j’ai été toujours proche de ce milieu. Un intérêt qui remonte à mes années d’études au lycée. Plus tard, j’ai écrit nombre d’articles critiques que j’ai publiés par la suite dans la presse nationale. J’ai même été à l’origine d’un ciné-club au sein de l’association Afrak, qui se penche régulièrement sur les questions du 7e art et de l’audiovisuel d’une manière générale. Mon livre vient donc à point nommé en essayant de remplir, modestement, un vide criant concernant le travail critique sur le très jeune cinéma amazigh. Je dis jeune parce qu’il n’a en fait que 16 ans, à savoir depuis la sortie du film de « Tamghart ww urgh » en 1991, dont le réalisateur n’est autre qu’ El-Houssayn Bizgaren.
Mais qu’est-ce qui vous a motivé le plus pour aller de l’avant ?
La raisons qui m’a poussé le plus pour publier ce livre est le désintérêt total manifesté par les critiques marocains vis-à-vis de ce cinéma, qui, à ce jour, a à son actif un nombre phénoménal de titres. Et ce en un temps record. Tous les articles que j’ai déjà publiés à ce propos dans la presse ont fini par me convaincre d’aller de l’avant. Et ce pour sortir cette expérience cinématographique originale de l’exclusion et du mépris que lui vouent certains. D’ailleurs, j’ai remarqué dernièrement que beaucoup de films amazighs sont déjà introuvables sur le marché alors que la bibliothèque nationale, ce qui est quand même son rôle, n’a fait pas le moindre effort pour réaliser même une liste approximative de cette production cinématographique et à plus forte raison en garder des copies pour des objectifs de recherche.
Quels sont les sujets que vous avez évoqués dans votre livre ?
Le livre se compose de deux grandes parties. Si dans la première j’ai analysé quelques exemples de films de réalisateurs différents, dans la deuxième je me suis penché plutôt sur les thèmes abordés dans ces films : l’émigration, les tabous de la société...
D’après vous, quelles sont les raisons du succès du cinéma amazigh ?
Les succès relatifs du film amazigh peut s’expliquer pour des raisons objectives : la frustration du public amazigh à cause de l’exclusion totale dont il a été l’objet par les médias publics. Ainsi, le film amazigh a été une sorte d’exutoire et un espace qui a permis, enfin, de se voir et d’être vu. D’autant plus que la démocratisation de l’accès à la vidéo, à la fin des années 80 et le début des années 90, a été une bénédiction pour une grande partie de la population incapable de comprendre ce qui se dit dans les télévisions nationales. Il y a également des raisons subjectives qu’il ne faut pas oublier. En fait, elles sont tellement nombreuses qu’elle serait vain de toutes les citer, mais on va juste se contenter d’en évoquer une : l’homme amazigh avait, pour la première fois de son histoire, le sentiment d’être proche de ces films que ce soit au niveau de la langue, du contenu et même de l’espace.
Quels sont encore les défauts de ce cinéma ?
Il souffre toujours de nombre d’imperfections sur plusieurs niveaux : l’essentiel de la production se fait encore en vidéo, ce qui est vraiment dommage ; les décors restent toujours rustiques et les personnages sont pour le moins niais, ce qui a pour résultat de provoquer et maintenir un tas de préjugés sur l’homme amazigh ; la primauté de l’amateurisme loin de tout professionnalisme ; le traitement des mêmes sujets ennuyeux sans faire aucun effort d’aller explorer d’autres horizons ; les conditions de travail du personnel sont loin de répondre aux normes légales et professionnelles, on travaille avec la même équipe sur plusieurs productions avec des contrats pas toujours clairs ; le soucis du gain rapide au détriment des exigences artistiques, esthétiques et civilisationnelles... Toutes ces raisons ont fait que l’engouement du public risque, à terme, de diminuer si rien n’est fait.
Comment peut-on faire pour atteindre le niveau international ?
On peut y arriver si nous avons des œuvres qui répondent aux exigences de qualité professionnelle et artistique mondialement reconnues. J’en veux pour preuve, le film de « Sat taddangiwin » de Abdellah Dari, qui a raflé deux importants prix au festival de la radio et de la télévision du Caire. En tous les cas, à mon point de vue, l’avenir du cinéma amazigh est très prometteur. Surtout avec l’avènement d’une nouvelle génération de jeunes cinéastes pourvus de formations dans le domaine et ayant de nouvelles idées qu’ils s’impatientent d’appliquer.
Ne serait-il pas intéressant de créer une école de cinéma à Agadir ou Tiznit pour accompagner cet emballement pour le cinéma ?
Je pense que ce serait une très bonne idée de créer une école de cinéma dans le Souss. Car cela va permettre d’aller encore plus loin. Surtout que la région possède tous les atouts à même de permettre le développement d’une véritable industrie cinématographique : des décors merveilleux, des talents nombreux et un marché important. Je pense que la construction d’un complexe de salles de cinéma à Agadir n’est que la conséquence logique de toute cette effervescence créatrice.
Comment expliquez-vous la persistance du boycott des médias publics marocains de la productions amazighe ?
Il ne faut pas avoir peur de dire que la qualité est loin d’être une caractéristique de la production nationale et pas seulement amazighe. Je suis convaincu que seule la qualité ouvre toutes les portes. Pour preuve, le film de Hemmou Ou Namir de Fatim Boubekdi qui a été programmé par 2M. Parce qu’il a eu un succès fantastique auprès du public qu’il soit amazighophone ou pas. En fait, pas que cela, c’est aussi et surtout un film extrêmement bien fait.
La commission d’aide à la production cinématographique a accordé la bagatelle de plus de 11 millions de dirhams au film arabe alors qu’elle n’a donné qu’un petit million et des poussières à un seul et unique film amazigh, qu’en pensez-vous ?
Je ne pense pas que la dite commission a exclu le tamazight. En fait, il faut voir les choses autrement, à savoir que le darija s’est imposé. Malheureusement dans la production amazighe, nous avons encore des faiblesses qu’il faut absolument corriger. Le scénario par exemple. Et justement l’IRCAM a vu juste en organisant en partenariat avec le ministère de la communication des sessions de formation au profit des scénaristes amazighs. Je suis intimement convaincu que le film amazigh a toutes ses chances à condition bien évidemment de proposer des dossiers bien ficelés. Ça va venir certainement !
Le piratage n’est-il pas une épée de Damoclès au-dessus du cinéma amazigh ?
En effet, le film amazigh est victime du piratage à grande échelle. Dans l’absence totale de tout soutien public, sa seule ressource reste la commercialisation sous forme de DVD. D’où les menaces terribles qui pèsent sur lui. Malgré les efforts des autorités pour en finir avec ces pratiques frauduleuses, la situation est toujours la même malheureusement. À mon sens, il faut que les producteurs se mettent au 35 mm pour assurer d’autres ressources en projetant leurs films dans les salles obscures.
Que pensez-vous du marché accordé à Nabil Ayyouch par le minsitre de la communication ?
Cette affaire a provoqué une levée de bouclier de beaucoup de professionnels du cinéma à cause de l’absence de tout appel d’offre. Surtout que la somme en jeu est on ne peut plus importante. Il s’agit en fait de plus d’un milliard de centimes. Mais ce qui m’intéresse personnellement, c’est le niveau technique des films produits jusqu’à maintenant. J’ai remarqué qu’il y a eu nombre de maladresses au niveau du tifinagh dans le générique par exemple. Ajoutons à cela que la qualité n’est pas toujours au rendez-vous.