Ils sont trois mousquetaires du cinéma amazigh, tous très connus : Rachid Aslal, Abdellatif Atif et Abdelaziz Oussayh. Rencontrés dans le siège de la maison de production Ayouz Vision, ils ne cachent nullement leur inquiétude vis-à-vis du terrible fléau du piratage. Ils lancent à ce propos un appel pressant à tous les cinéphiles pour le combattre autant que faire se peut. Car il risque de mettre un terme à la très belle aventure du cinéma amazigh. Espérons qu’ils soient entendus !
Le bal est ouvert par l’humoriste R. Aslal qui n’a pas trouvé de termes assez durs pour dénoncer ce fléau extrêmement malheureux et tout autant dangereux : « Ce n’est plus ni moins qu’un crime contre notre travail. Que ceux qui piratent viennent nous rendre visite pour voir les efforts que nous déployons pour mettre nos produits sur le marché ! ». « Et pourtant, répond en écho le réalisateur et l’acteur A. Oussayh, nos films ne coûtent absolument rien, car accessibles à toutes les bourses. Je comprendrai si l’on était encore à la cassette VHS qui valait beaucoup plus chère, mais là….»
« Autorités »… dépassées
Tout d’abord, ces cinéastes amazighs pointent, tous, du doigt Internet où certains n’hésitent pas à mettre des films un jour ou deux jours après leur sortie. Ce qui est en lui-même une terrible injustice pour tout le monde. Y compris pour le téléspectateur, qui, à force de privilégier cette méthode illégale, se réveillera un jour sans films à voir. Car tout simplement les sociétés de production ont déjà mis la clé sous la porte. Autrement dit, elles ont fait faillite. Ce que certainement personne ne souhaite.
En second lieu, il y a ceux qui gravent systématiquement les films pour les faire couler dans le marché. A terme, c’est leur cinéma dont ils sont probablement fiers qu’ils vont couler. Autre temps, autre méthode. Certains faussaires ne reculent absolument devant rien. Ils font carrément, surtout dans les villages, du porte-à-porte pour proposer leur marchandise à des prix défiant toute concurrence.
Et les autorités dans tout cela ? Elles sont tout simplement désarmées. Car elles ont énormément de difficultés à prouver que tel ou tel à pirater tel ou tel produit. « Même si elles nous soutiennent dans des campagnes anti-piratage », explique Oussayh. Subitement plein d’espoir, il ajoute « qu’il faut absolument une loi extrêmement draconienne pour combattre ce cancer qui ronge notre jeune et dynamique cinéma. Ou du moins en limiter les dégâts. Surtout que l’on ne peut espérer aucune aide publique».
Scandales… à n’en pas finir
Ce qui est on ne peut plus vrai. Lors de la dernière réunion de la très fameuse Commission d’aide au cinéma « arabe », comme l’a si justement appelé la très dynamique Fatim Alahyane, il n’a été accordé au cinéma amazigh qu’un million de dh et des poussières. Autant dire des clopinettes. Par contre, le cinéma arabe, lui, a raflé la mise, à savoir la bagatelle de plus de 11 millions de dh. Un choix que d’aucuns considèrent comme totalement absurde, car animés uniquement par des considérations éminemment ethniques, raciales et idéologiques.
Pour ceux qui ne le savent pas encore, la préférence arabe est consubstantielle au régime marocain. Ils se confondent même pour ne former qu’un tout. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que ce soit les descendants des réfugiés andalous aux commandes, chez qui, comme on le sait tous, l’amazighophobie et le racisme anti-amazigh font quasiment partie de leur patrimoine génétique, qui y mettent fin. Eux qui ont toujours prôné et cru, dur comme fer, dans la supériorité éternelle de l’homme arabe et de sa culture. Les pauvres, ils ne doivent pas être au courant que le nazisme hitlérien a disparu depuis belle lurette. Passons !
Plus grave encore, le scandale du dernier festival du cinéma international de Marrakech est encore frais dans toutes les mémoires (ne parlons même du scandale des célèbres films amazighs devenus subitement arabes produits par Nabil Ayouch à… 100 million de centimes l’unité). Enfin, chez ceux qui ont un peu d’esprit critique et qui sont encore jaloux des intérêts de ce pays quasiment à la dérive.
A franchement parler, comment un pays extrêmement pauvre que le Maroc (129e en terme de développement humain) puisse se permettre le luxe d’organiser une manifestation, d’un faste absolument choquant, pour prétendument célébrer le cinéma… des Egyptiens ? N’est-ce pas une honte absolue que l’on mette à mal les finances publiques, dont les indicateurs sont tous au rouge, alors que des Marocains meurent encore de froid, de maladies bénignes ou se suicident par groupes entiers dans le Détroit ? N’allez surtout pas la question à un certain El Araichi qui se pavanait dans la capitale des Almoravides comme un nabab, lui, qui ne trouve bizarrement subitement jamais l’argent lorsqu’il s’agit de la culture originelle et authentique du Maroc.
Quant aux pauvres amazighs, qui se souciera de leur misérable vie et à plus forte raison de leur cinéma ? Même si celui-ci est l’objet d’un engouement qui ne se dément jamais. Ce qui est en lui une grande révolution culturelle. Il faut savoir que l’électrification d’une grande partie des régions amazighes et le développement technologique (lecteurs DVD à bon marché) ont fait qu’une immense clientèle essentiellement rurale s’est ajoutée à la citadine, locale ou émigrée, déjà acquise à ce cinéma on ne peut plus amazigh. Et ce pour créer un marché plus qu’important.
Tant mieux donc pour l’amazighité et que tous les Amazighophobes fascistes de tout poil, que Dieu sait très nombreux et puissants, aillent boire « toute l’eau de la mer avec une petite cuillère ». Il va sans dire que ça leur fera un très grand bien !
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