Voilà quatre ans que je ne suis pas revenu dans le Souss, le seul coin au monde, et je le dis en toute franchise, où je me sens réellement chez moi. Moi le citoyen du monde qui n’est dans son élément qu’hanté, peut-être jusqu’à la fin de ses jours, par le nomadisme et la transhumance. Certains penseront, et diront même, que c’est beaucoup quatre longues années ? Ils ont tout à fait raison. Car en l’espace de ce temps, mon Souss natal a changé. De fond en comble. Littéralement. Radicalement.
Sauf les gendarmes et les policiers du Makhzen qui y sévissent. Toujours aussi impitoyablement. Il ne faut même pas espérer que ceux-là changent un jour. Ils sont d’ailleurs partout. En mettant, parfois, leur vie et celle des autres en danger. Imaginez qu’ils peuvent être au milieu de la chaussée, à des heures extrêmement tardives de la nuit, sans qu’aucune plaque lumineuse ne signale leur présence. Comme cela se fait normalement ailleurs. Vous ne pouvez savoir qu’il s’agit d’eux que lorsqu’ils se font remarquer avec une petite et minuscule lampe. Qu’il faut impérativement voir. Sinon, c’est la catastrophe. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs perdu leur vie ainsi. Bêtement.
Vitesse
Mais une chose est plus que sûre, ils sont toujours aussi fourbes et trouvent même un malin plaisir, une jouissance extatique, pour ne pas dire sadique, à vous arrêter. Et ce pour vous rappeler, le plus souvent, que vous roulez à une vitesse excessive. Parce que vous avez le malheur de ne pas voir une très discrète plaque limitant la vitesse qu’un buisson touffus, une carriole surchargée, un clochard avec ses haillons ou même un animal errant a caché, comme par hasard, lors de votre passage à sa hauteur.
Une question vous trotte certainement dans la tête : comment diable peuvent-ils savoir que vous roulez vite ? Ils n’ont quand même pas le don d’ubiquité ! En fait, c’est très simple : on les a, enfin, équipés de caméras avec lesquelles elles scrutent constamment la route ou ce qui lui ressemble (les routes marocaines sont en piteux état). Mais dans le cas où vous êtes arrêté, ne demandez surtout pas une preuve écrite comme cela se fait sous d’autres cieux. C’est votre parole contre la leur.
Qui plus est, il paraît que dans les lois marocaines, le témoignage d’un homme détenant n’importe quelle autorité, petite soit-elle, équivaut à 12 personnes. Bonjour l’égalité des sujets ! (pour les citoyens, revenez peut-être dans cinq siècles et encore !) Autrement dit, dans tous les cas vous êtes cuit. Il faut donc obtempérer. Et que ça saute. Et tout de suite.
En réalité, il ne sert à strictement à rien de chercher une échappatoire, il faut casquer de l’argent « a messiou » avec un regard exorbité à la clé. Histoire de vous intimider bien évidemment. Mais contrairement à toutes les polices du monde, ici, on ne fait jamais dans les règles. Si surprenant que cela puisse être, on a toujours le choix de négocier, sur place, une solution à l’amiable.
Décidément rien n’étonne plus dans ce royaume qui n’arrête pas de déchanter. Une petite confidence : j’ai eu personnellement droit de la part d’un policier au fameux « la fête du sacrifice est sur les portes ». Une manière détournée, voire même subtile, pour quémander de l’argent. Ce qui m’a laissé bouche bée, car habituellement c’est plutôt le style le plus direct qui est de rigueur.
Halte !
Disons-le franchement, ce n’est pas demain la veille que le Makhzen va se débarrasser de cette petite corruption, comme il le claironne hypocritement dans ses médias où il a quasiment élu domicile. Tout seul. Il faut savoir qu’il y a une grande, une très grande corruption. Celle des marchés publics à titre d’exemple. A signaler qu’elle brasse non pas quelques piécettes mais bel et bien des millions et des millions ! Mais là c’est une autre paire de manche. Passons ou plutôt revenons à notre petite « talkhcha » gendarmesque ou cauchemardesque. A vous de choisir !
Votre véhicule immobilisé, il faut savoir que vous aurez droit à cette question, ô combien significative, systématiquement posée dans je ne sais quel idiome des Aroubis – la police et la gendarmerie sont leur chasse gardée- : « que ferait-on ‘’a ssi’’ ? » en montrant des gencives avariées, des dents complètement ravagées par un « tsunami » bucal à base de cigarettes de mauvaise qualité et, peut-être même, de bières frelatées au milieu d’un visage complètement carbonisé par l’implacable soleil de ce coin du Tamazgha ? Sans vouloir exagérer, certains d’entre eux peuvent aisément avoir les premiers rôles dans les films d’horreur les plus effrayants. Tellement ils sont laids, hideux et repoussants ! On dirait que c’est la condition sine qua non pour qu’ils soient embauchés.
D’ailleurs, lorsque nous étions petits, ma petite maman, dépassée qu’elle était par nos multiples débordements enfantins, a trouvé une parade imparable pour y mettre le holà. Il suffit qu’elle fasse allusion à la figure du gendarme pour qu’on reste coi non seulement pendant une journée, mais pendant des semaines. A telle enseigne qu’elle désespérait, carrément, de nos longs silences non moins inquiétants. A la fin, elle nous suppliait pour renouer avec nos cacophonies d’antan. C’est vous dire.
Il faut reconnaître que nos multiples ogres locaux n’ont plus aucun effet sur nos petites têtes. Même s’ils tout autant redoutables, ils ont fini par nous paraître on ne peut plus doux comparés aux « ogres » faits de gendarmes et de policiers. Ceux-là même que le Makhzen a envoyés spécialement pour dresser, bien comme il faut, ces radins de « Grabz », chez eux, dans le Souss. L’objectif est plus que clair : il faut tuer en eux toute velléité de remise en question du système et de ses magnifiques « valeurs » que le monde entier n’a de cesse de lui envier. A-t-il réussi dans cette entreprise on ne peut plus « civilisatrice » ? Largement. Amplement.
Corruption
Quant à l’amende, et c’est là que le bât fait plus que « taillader », les « très fins stratèges » de Rabat n’ont nullement fait les choses à moitié. Comme d’habitude. Il faut savoir que vous devez payer sur place 400 dh (presque la moitié du smic marocain s’il en existe réellement un) ou bien 100 dh ou même parfois moins de « dehna », un autre mot arabe pour désigner la corruption. Il semblerait que le tristement célèbre « rechwa », un terme tout aussi arabe, « walhdoulillah » comme diraient certains faux bigots un peu idiots, est devenu usé à force d’être utilisé. En tous les cas, vous aurez beau cherché, il n’existe aucun mot en tamazight pour exprimer ce fléau qui fait des ravages dans la société et l’installe définitivement dans le sous-développement.
Quelque incroyable que cela puisse être, on vous laisse même un temps de réflexion pour prendre une sage… décision, c’est-à-dire corrompre. Comment cela ? Je sais qu’en racontant tout cela, je n’apprends certainement rien aux indigènes qui doivent en savoir plus que quelque chose. En fait, c’est presque un rituel, les gendarmes et les policiers marocains ont presque tous la manie de prendre vos papiers pour les glisser, le plus naturellement du monde, sous leurs casquettes suantes en vous laissant poireauter pendant de longues minutes à côté de la chaussée. Histoire de vous accorder toute la latitude pour cogiter à une solution idoine. Encore faut-il comprendre tout ce vicieux manège. Sinon, il y a de quoi avoir une crise de nerf immédiate et même attraper un diabète insulinodépendant sur place.
Mais à force, on apprend, on s’habitue, on s’intègre en quelque sorte. Doucement. La socialisation fera son effet d’une manière inconsciente comme dirait emphatiquement n’importe quel sociologue averti. Surtout que vous aurez toutes les chances, si vous roulez souvent, d’être arrêté plusieurs fois dans la journée. Et vos vacances, que vous espériez calmes et paisibles, peuvent être synonymes d’un perpétuel jeu de cache-cache, au demeurant très fatigant, avec les forces de « l’ordre ». Qu’elles soient en bleu ou en gris.
Sauf les gendarmes et les policiers du Makhzen qui y sévissent. Toujours aussi impitoyablement. Il ne faut même pas espérer que ceux-là changent un jour. Ils sont d’ailleurs partout. En mettant, parfois, leur vie et celle des autres en danger. Imaginez qu’ils peuvent être au milieu de la chaussée, à des heures extrêmement tardives de la nuit, sans qu’aucune plaque lumineuse ne signale leur présence. Comme cela se fait normalement ailleurs. Vous ne pouvez savoir qu’il s’agit d’eux que lorsqu’ils se font remarquer avec une petite et minuscule lampe. Qu’il faut impérativement voir. Sinon, c’est la catastrophe. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs perdu leur vie ainsi. Bêtement.
Vitesse
Mais une chose est plus que sûre, ils sont toujours aussi fourbes et trouvent même un malin plaisir, une jouissance extatique, pour ne pas dire sadique, à vous arrêter. Et ce pour vous rappeler, le plus souvent, que vous roulez à une vitesse excessive. Parce que vous avez le malheur de ne pas voir une très discrète plaque limitant la vitesse qu’un buisson touffus, une carriole surchargée, un clochard avec ses haillons ou même un animal errant a caché, comme par hasard, lors de votre passage à sa hauteur.
Une question vous trotte certainement dans la tête : comment diable peuvent-ils savoir que vous roulez vite ? Ils n’ont quand même pas le don d’ubiquité ! En fait, c’est très simple : on les a, enfin, équipés de caméras avec lesquelles elles scrutent constamment la route ou ce qui lui ressemble (les routes marocaines sont en piteux état). Mais dans le cas où vous êtes arrêté, ne demandez surtout pas une preuve écrite comme cela se fait sous d’autres cieux. C’est votre parole contre la leur.
Qui plus est, il paraît que dans les lois marocaines, le témoignage d’un homme détenant n’importe quelle autorité, petite soit-elle, équivaut à 12 personnes. Bonjour l’égalité des sujets ! (pour les citoyens, revenez peut-être dans cinq siècles et encore !) Autrement dit, dans tous les cas vous êtes cuit. Il faut donc obtempérer. Et que ça saute. Et tout de suite.
En réalité, il ne sert à strictement à rien de chercher une échappatoire, il faut casquer de l’argent « a messiou » avec un regard exorbité à la clé. Histoire de vous intimider bien évidemment. Mais contrairement à toutes les polices du monde, ici, on ne fait jamais dans les règles. Si surprenant que cela puisse être, on a toujours le choix de négocier, sur place, une solution à l’amiable.
Décidément rien n’étonne plus dans ce royaume qui n’arrête pas de déchanter. Une petite confidence : j’ai eu personnellement droit de la part d’un policier au fameux « la fête du sacrifice est sur les portes ». Une manière détournée, voire même subtile, pour quémander de l’argent. Ce qui m’a laissé bouche bée, car habituellement c’est plutôt le style le plus direct qui est de rigueur.
Halte !
Disons-le franchement, ce n’est pas demain la veille que le Makhzen va se débarrasser de cette petite corruption, comme il le claironne hypocritement dans ses médias où il a quasiment élu domicile. Tout seul. Il faut savoir qu’il y a une grande, une très grande corruption. Celle des marchés publics à titre d’exemple. A signaler qu’elle brasse non pas quelques piécettes mais bel et bien des millions et des millions ! Mais là c’est une autre paire de manche. Passons ou plutôt revenons à notre petite « talkhcha » gendarmesque ou cauchemardesque. A vous de choisir !
Votre véhicule immobilisé, il faut savoir que vous aurez droit à cette question, ô combien significative, systématiquement posée dans je ne sais quel idiome des Aroubis – la police et la gendarmerie sont leur chasse gardée- : « que ferait-on ‘’a ssi’’ ? » en montrant des gencives avariées, des dents complètement ravagées par un « tsunami » bucal à base de cigarettes de mauvaise qualité et, peut-être même, de bières frelatées au milieu d’un visage complètement carbonisé par l’implacable soleil de ce coin du Tamazgha ? Sans vouloir exagérer, certains d’entre eux peuvent aisément avoir les premiers rôles dans les films d’horreur les plus effrayants. Tellement ils sont laids, hideux et repoussants ! On dirait que c’est la condition sine qua non pour qu’ils soient embauchés.
D’ailleurs, lorsque nous étions petits, ma petite maman, dépassée qu’elle était par nos multiples débordements enfantins, a trouvé une parade imparable pour y mettre le holà. Il suffit qu’elle fasse allusion à la figure du gendarme pour qu’on reste coi non seulement pendant une journée, mais pendant des semaines. A telle enseigne qu’elle désespérait, carrément, de nos longs silences non moins inquiétants. A la fin, elle nous suppliait pour renouer avec nos cacophonies d’antan. C’est vous dire.
Il faut reconnaître que nos multiples ogres locaux n’ont plus aucun effet sur nos petites têtes. Même s’ils tout autant redoutables, ils ont fini par nous paraître on ne peut plus doux comparés aux « ogres » faits de gendarmes et de policiers. Ceux-là même que le Makhzen a envoyés spécialement pour dresser, bien comme il faut, ces radins de « Grabz », chez eux, dans le Souss. L’objectif est plus que clair : il faut tuer en eux toute velléité de remise en question du système et de ses magnifiques « valeurs » que le monde entier n’a de cesse de lui envier. A-t-il réussi dans cette entreprise on ne peut plus « civilisatrice » ? Largement. Amplement.
Corruption
Quant à l’amende, et c’est là que le bât fait plus que « taillader », les « très fins stratèges » de Rabat n’ont nullement fait les choses à moitié. Comme d’habitude. Il faut savoir que vous devez payer sur place 400 dh (presque la moitié du smic marocain s’il en existe réellement un) ou bien 100 dh ou même parfois moins de « dehna », un autre mot arabe pour désigner la corruption. Il semblerait que le tristement célèbre « rechwa », un terme tout aussi arabe, « walhdoulillah » comme diraient certains faux bigots un peu idiots, est devenu usé à force d’être utilisé. En tous les cas, vous aurez beau cherché, il n’existe aucun mot en tamazight pour exprimer ce fléau qui fait des ravages dans la société et l’installe définitivement dans le sous-développement.
Quelque incroyable que cela puisse être, on vous laisse même un temps de réflexion pour prendre une sage… décision, c’est-à-dire corrompre. Comment cela ? Je sais qu’en racontant tout cela, je n’apprends certainement rien aux indigènes qui doivent en savoir plus que quelque chose. En fait, c’est presque un rituel, les gendarmes et les policiers marocains ont presque tous la manie de prendre vos papiers pour les glisser, le plus naturellement du monde, sous leurs casquettes suantes en vous laissant poireauter pendant de longues minutes à côté de la chaussée. Histoire de vous accorder toute la latitude pour cogiter à une solution idoine. Encore faut-il comprendre tout ce vicieux manège. Sinon, il y a de quoi avoir une crise de nerf immédiate et même attraper un diabète insulinodépendant sur place.
Mais à force, on apprend, on s’habitue, on s’intègre en quelque sorte. Doucement. La socialisation fera son effet d’une manière inconsciente comme dirait emphatiquement n’importe quel sociologue averti. Surtout que vous aurez toutes les chances, si vous roulez souvent, d’être arrêté plusieurs fois dans la journée. Et vos vacances, que vous espériez calmes et paisibles, peuvent être synonymes d’un perpétuel jeu de cache-cache, au demeurant très fatigant, avec les forces de « l’ordre ». Qu’elles soient en bleu ou en gris.
3 commentaires:
Rien de nouveau dans le royaume de M6 à ce que je vois... la prochaine fois essaie de les filmer et mets les sur le net peut être que ça les calmera quelques jours
Salut Lahsen,
cela fait un moment que j'ai découvert ton blog et là en lisant ton article je me suis "régalée", tu as exactement décrit la situation...
en tout cas, félicitations M. le journaliste...
Rkia (la soeur de Rachid
hhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh tnghitiyi assi lhsen s tadssa tu n'oblieras jamais le makhzan marocain de tt ce que il a fait.(grnak amskin) hhhhhhh mais +que ça tu a gagner un temoine qui est moi meme et des bon amis tu as oblier de l'ajete dans ton article.
abdellah amennou
achtoukn
www.monmona.canalblog.com
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