jeudi, juillet 12, 2007

Abdelaziz Louazani : « On ne peut pas revenir aux années de plomb. »


Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis militant associatif, membre actif de la Ligue amazighe des droits humains et président de l’association Ouzkan pour le développement. Cette dernière structure a été fondée, au douar Ouzkan, cercle de Bouizakarne, province d’Agoulmim, le 12 novembre 2006, mais dont le récépissé de légalisation n’a été reçu que le 22 février 2007. Toujours est-il que nous essayons, autant que faire se peut, de soutenir les nombreux citoyens spoliés, injustement, de leurs terres ancestrales.

Pourquoi cet intérêt pour la problématique de la terre ?

Pour la simple raison que c’est la pierre angulaire de tout développement rural et une source de vie pour toutes les populations autochtones amazighes. Reste que les complications bureaucratiques faites autour de la conservation foncière les inquiètent au plus haut point. Ainsi, nous avons fait de cette question de la terre et la protection de l’arganier notre principal souci et notre raison d’exister. Ce qui veut dire s’opposer, forcément, aux intérêts des mafias locales de mèche avec certains services de l’Etat pour s’approprier illégalement des terres de plusieurs hectares à des prix extrêmement bas.

Une plainte a été déposée contre vous, pour quelle raison ?

En effet, travailler sur la question sensible de la terre est semé d’embûches de toutes sortes et nécessite, parfois, de payer un certain prix au combat que nous menons. Simplement parce que nous nous opposons au Makhzen et les mafias locales, capables d’user de tous les moyens en leur possession, pour satisfaire leurs gros appétits immobiliers. C’est dans ce contexte que nous avons organisé un colloque international, avec la participation effective du Congrès mondial amazigh, la Ligue amazighe des droits humains et l’association Ouzkan, le 10 février 2007, à la Maison de la culture à Bouizakarne. Et ce pour y examiner ce phénomène inquiétant des expropriations illégales et écouter les doléances des victimes venues très nombreuses.

Quelle a été la réaction de ces mafias ?

Naturellement, elles n’étaient nullement contentes des tournures qu’ont pris les événements, à cause principalement du dévoilement de leurs basses œuvres devant le public et les autorités. Elles ont donc décidé de réagir au quart de tour en m’intentant un procès, dont la première audience aura lieu 9 juillet 2007. Et ce sans que le tribunal ne fasse une quelconque enquête pour savoir c’est ce qui m’est reproché est réellement vrai. Mais le plus étrange dans cette affaire, c’est que nous n’avons de cesse d’interpeller tous les organismes publics, dont le domaine de compétence recouvre les questions de la terre, pour diligenter une enquête et faire la lumière sur les nombreuses expropriations qui ont eu lieu dans la région. Surtout que nous avons en notre possession toutes les preuves nécessaires. Mais voilà, c’est moi qu’on poursuit pour la simple raison que je fais mon travail de sensibilisation ! Surprenant, n’est-ce pas ?

De quel genre de soutien avez-vous le plus besoin ?

Considérant ce procès comme une atteinte grave à la liberté d’expression et d’opinion, une violation dangereuse des droits de l’homme et une intimidation préoccupante de tous les militants et autres animateurs associatifs, j’appelle tous les partis politiques, les syndicats nationaux, toutes les organisations de la société civile, les associations des barreaux des avocats, pour me soutenir dans cette épreuve et faire de la liberté d’expression et d’opinion un principe sacré auquel il ne faut jamais renoncer. Quoi que puisse en être le prix. Surtout qu’il est à craindre qu’on revive, encore une fois, les années de plomb après les inquiétantes régressions par rapport aux acquis des droits de l’homme constatées ces derniers jours un peu partout sur le territoire national

Association amazigho-juive : haro sur les Amazighs

Des Amazighs originaires du Souss ont annoncé dernièrement qu’ils comptaient faire une association d’amitié amazigho-juive. L’on peut ergoter indéfiniment sur la pertinence d’une telle initiative, mais une chose est sûre : ils sont tout à fait libres de la faire. C’est leur droit le plus absolu. Car, en fin de compte, chacun est responsable de ses actes tant qu’il est majeur et vacciné.

Mais là où c’est vraiment révoltant, inacceptable, inadmissible même ce sont les réactions épidermiques des baâthistes et des islamistes de tout poil. Elles ont été d’une violence absolument incroyable. Il s’en fallait de peu pour appeler à exterminer tous les Amazighs du monde. Et ce pour la simple raison d’avoir l’intention de mettre sur pied une petite association de rien du tout, car rien nous ne dit qu’elle verra le jour. C’est connu, entre vouloir et faire il y a énormément de différence.

Profitant de la presse- enfin est-ce que c’est vraiment une presse ?- qui leur a ouvert grandes ouvertes ses portes( même El-Maghribia, le journal du Makhzen est de la partie), Sofiani, un avocaillon raté, et Al-Andalousi ( il n’est même pas marocain et il se permet de donner des leçons à tout va), un syndicaliste qui n’avait jamais vraiment lutté, qui vivent uniquement et exclusivement des malheurs des Palestiniens et des Irakiens, ont donné libre cours à leur haine féroce des Amazighs dont ils habitent – où plutôt ils colonisent- pourtant le pays. La moindre des choses, c’est de respecter l’hôte, qui leur a tout donné sans jamais leur reprocher leurs perpétuels délires moyen-orientaux dont il n’a que faire.

On vous fait l’économie, cher lecteur, de toutes les insultes et autres obscénités que ces énergumènes n’ont aucune honte d’éructer contre les Amazighs. Mais quelques jours après, le ministre des affaires étrangères et le directeur des services secrets marocains- qui sont à des années lumières de l’amazighité et des Amazighs- ont carrément rencontré, à Paris, le plus normalement du monde, la ministre des affaires étrangères de l’Etat hébreu. Il fallait donc que les réactions de Sofiani et consort soient autant virulentes si ce n’est plus, comme c’était le cas avec l’association amazigho-juive. Oh que nenni ! Elles ont été extrêmement modérées, terriblement gentilles même.

En fait, au-delà du fait qu’ils sont on ne peut plus lâches, cette attitude de deux poids deux mesures est une manière de dire à tous les Amazighs que ce qui nous est permis vous est interdit. Dans ce pauvre pays qu’est le Maroc, ce sont nous les maîtres, les seigneurs, les décideurs…alors que vous, vous n’êtes que des dominés, des colonisés, des clochards, des moins que rien… Vous n’avez donc qu’un seul droit : la boucler et subir dans le silence.

Le nouvel album de Saida Titrit est dans les bacs

Attendu depuis pas mal de temps déjà, le nouvel album de Titrit est enfin disponible sur le marché. Composé de cinq chansons : uccigh am ul inu, ur tettut awal, smuqqel d yi, asmun wabda, maxx et deux instrumentaux. Qu’en dire ? Comme on s’y attend, nos espoirs n’ont nullement été déçus : c’est du pur Titrit avec cette fraîcheur suave qui la caractérise tant, cette inimitable voix qui est la sienne et ses compositions qui en disent long sur son savoir-faire musical. Quant aux paroles, l’engagement, comme toujours, est leur maître mot. Titrit, ne l’oublions jamais a ouvert le bal à toute une génération d’artistes amazighs extrêmement douée ( Mallal, Yuba, Aza…), a évoqué tous les sujets inhérents à la vie de l’homme et de la femme amazighs. Ainsi, elle ne peut ignorer les nouveaux dangers qui les guettent et les menacent dans leur existence même. Maxx est une chanson qui porte sur le terrorisme – signalons que c’est une première de la part d’un artiste au Maroc. En fait, il s’agit d’une grande interrogation sur ce terrible fléau et une tentative poético-musicale pour en comprendre les motivations et les raisons. Pari risqué, mais amplement réussi. Merveilleusement bien. Malgré le côté dramatique et tragique de la chose. Que notre Étoile continue à scintiller encore longtemps… pour notre plus grand plaisir !