mardi, octobre 20, 2015

Oudaden, les maîtres absolus de Tawdadnt

Le dernier album de la troupe légendaire amazighe, Oudaden, n’a nullement déçu.  Comme toujours, ces enfants terribles de Bensergaw ont encore frappé un grand coup.  

Il faut bien reconnaître qu'ils ont, une fois de plus, montré au monde entier qu’ils sont les maîtres incontestés et incontestables du style qu’ils ont inventé et qui porte leur nom, le tawdadnt. Et Dieu sait qu’ils ont des concurrents, beaucoup de concurrents, mais peu peuvent réellement rivaliser avec eux.  Et c’est vraiment le cas de le dire.

Cependant, il faut bien le dire,  la touche  très personnelle et typique au tam-tam de Hassan Jmoumh peut facilement se sentir dans ce dernier opus, même si la performance toujours époustouflante et inégalable au banjo d’El Foua Abdellah conjuguée avec sa voix plus qu’unique arrivent aisément à balancer les choses.

En tant que fans plus qu’indécrottables (personnellement, je le suis depuis mes dix ans),  nous regrettons vraiment et réellement le départ (on espère que ce n’est pas définitif) de Hassan Jmoumh. C’est vraiment bizarre de ne plus le voir au sein de la troupe d’Oudaden avec sa carrure imposante et son instrument fétiche, le tam-tam.

Par ailleurs, l’album compte plusieurs chansons qui sont toutes excellentes sur tous les niveaux. Mais mon coup de cœur est définitivement man g-ik itamn ghik-ad? et ur dar-i bla keyyin. Il est certain qu’elles seront les tubes qui seront entendus et réentendus un peu partout dans le Souss, au Maroc et un peu partout sur la planète terre. 

Leur thème est bien évidemment sentimental avec des mots toujours aussi bien choisis, bien travaillés et bien ciselés. Ce qui contraste radicalement avec la facilité béate, voire l’indigence de certaines chansons que l’on entend ici et là.

Mais la question que l’on se pose : qui écrit vraiment les paroles qu’interprètent Oudaden puisque ce n’est jamais marqué sur la pochette de leurs albums ? Est-ce que c’est Abdellah El-Foua himself ou quelqu’un d’autre ? En tous les cas, que ce soit l’un ou l’autre, elles sont excellentissimes et toujours fidèles à  cette légèreté éthérée qui a toujours caractérisé les chants de  tawdadant.

Mes chers lecteurs, n’attendez plus ! Procurez-vous cet album sans trop tarder ! Je suis sûr que vous n’allez jamais le regretter d’autant plus que c’est une manière de donner un coup de pouce à ces artistes qui nous ont toujours donné du plaisir sans rien nous demander en échange. 

Les paroles de la chanons an g-ik itamn ghik-ad? sont ainsi: 


Man g-ik itamn ɣik-ad?
Ur gi-k iban is g-itun illa laman
Ur neḥtajja ad ak nettegalla a yan iḥnnan
Awal nnek immim ar d-issalla ɣ ifalan
Ar izray uḍaṛ, ifel aɣaras, ar allan
Ar iẓẓaḍ lhemm ixsan i yan isllan
Neḍaleb i mad ak ismn a(y) atay, atay
Afus bu-ddeblij  iɣʷla nit, ila ttaman
Man g-ik itamn ɣik-ad?
*
Waw a wa waw a!
Man g-ik itamn ɣik-ad?

Ur gi-k iban is g-itun illa laman
Ur neḥtajja ad ak nettegalla a yan iḥnnan
Awal nnek immim ar d-issalla ɣ ifalan
Man g-ik itamn ɣik-ad?

Waw a wa waw a!
Man g-ik itamn ɣik-ad?
Uhuy, ur tt g-igi tiwit, irwas is g-igi teṛmit
Uhuy, uhuy, uhuy

Man g-ik itamn ɣik-ad?

Awal nnek immim ar d-issalla ɣ ifalan
Ar iẓẓaḍ lhemm ixsan i yan isllan
Ar izray uḍaṛ, ifel aɣaras, ar allan
Neḍaleb i mad ak ismn a(y) atay, atay
Afus bu-ddeblij, a lḥnna a s-rek iɣʷmman
Ayyis bu-lḥruz  iḍheṛ nit, ila ttaman
Man g-ik itamn ɣik-ad?

Waw a wa waw a!
Man g-ik itamn ɣik-ad?

Yan ɣ illa zzin ar s-is ittelli wayyaḍ
Tijdaɛin, a tumlilin, azmez ay-ad!
Yan kʷent iran a(y) isres  atig n ccuṛuḍ
A ur ittall ifassen iɣ ur iṭṭaf atig!
Man g-ik itamn ɣik-ad?

Waw a wa waw a!
Man g-ik itamn ɣik-ad?

***

mardi, avril 07, 2015

Rays Jamaâ, un artiste qui mérite toute notre reconnaissance

Pour tout vous dire, je ne le connaissais que depuis quelques années. Ce que je ne regretterai jamais. Bien au contraire. Car l’homme est unique dans son genre. Sa maison à Taddart d’Achtouken, qui se trouve à quelques encablures de Biougra, est ouverte au monde entier.  Et c’est le cas le dire.  D’ailleurs, entre nous, on la qualifie de la zaouïa de Sidi Jamaâ. C’est vous dire.

En fait, j’y ai croisé des gens de toutes les nationalités. Ce qui m’a d’ailleurs très surpris au début. Mais en y réfléchissant plus longuement, quoi de mieux pour s’imprégner de la culture musicale authentiquement amazighe que d’aller chez Dda Jamaâ, comme nous l’avons toujours appelé.  Beaucoup plus par respect qu’autre chose.

En d’autres termes, et c’est vraiment très important de le préciser, rays Jamaâ permet non seulement à une tradition musicale très ancienne, menacée de toute part malheureusement, de perdurer, mais il la valorise aussi. À sa manière, avec ses propres moyens.

En vérité, rays Jamaâ n’a pas attendu les beaux discours des politiciens, officiels ou pas,  pour mettre en valeur ce patrimoine immatériel inestimable de tirrousya. Que vive alors le tourisme culturel le plus simplement du monde!

Par ailleurs, tous les locaux qui sont férus de l’art musical de tirrouysa, d’Agadir  à Tiznit et d’Ihahan à Biougra, se donnent régulièrement rendez-vous chez lui, dans sa propre demeure.  Et ce, pour y jouer parfois jusqu’à l’aube.

Rays Lhajj Idder Achtouk, qui est devenu une vedette depuis quelque temps, était d’ailleurs un habitué des séances musicales chez Dda Jamaâ. À en croire un habitué  des lieux, c’est là qu’il s’est réellement amélioré avant de s’imposer sur la scène musicale amazighe.

Comme vous le savez tous, l’on ne peut pas devenir rays si l’on ne gratte pas un instrument. C’est le cas justement de Dda jamaâ. Il  a joué au lotar (une espèce de guitare traditionnelle) pratiquement toute sa vie. Bien plus, il en est devenu un as au sens le plus large du terme.

D’ailleurs, avec son oreille musicale plus qu’expérimentée, il suffit de toucher votre lotar pour qu’il  vous arrête net. Non pas pour vous dire que vous jouez très mal, rassurez-vous ce n’est pas le genre de la maison, mais  parce qu’il a besoin de quelques ajustements. Ce qui se fait toujours avec beaucoup de tact et beaucoup de bonne humeur.

Dda Jamaâ n’est pas que cela. Il est aussi unique d’un point de vue humain. Il est d’une générosité extrêmement rare. Il est l’homme de tout le monde, comme on le dit si bien en langue amazighe. En fait, je ne l’ai jamais vu refuser à quiconque l’accès à sa  maison. Même à des heures extrêmement tardives. Et Dieu sait que chez nous où la mentalité villageoise règne encore, les gens ne sont pas toujours sympathiques. Mais il n’en a cure. Passer un bon moment vaut tous les sacrifices.  

Pour finir, il serait vraiment intéressant si le tissu associatif amazigh pense à lui rendre hommage. Rien que pour lui dire que nous apprécions énormément ce qu’il a fait pour maintenir en vie le tirouysa dans cette partie du Souss, Achtouken, qui avait donné des géants connus et reconnus. Anchad, Janti et Said Achtouk pour ne citer que ce trio pour le moins phénoménal. 

vendredi, février 13, 2015

Le Makhzen réofficialise le racisme anti-amazigh

L’on peut que trouver extrêmement étrange que les militants amazighs et leurs nombreuses associations n’aient pas réagi, massivement, à un fait gravissime qui s’est passé récemment au sein du parlement du Makhzen.

En fait, il y a quelques jours, ce  très haut lieu d’apartheid anti-amazigh (et oui, on y chahute systématiquement comme dans une cour de récréation ceux qui osent s’y exprimer en langue amazighe) a refusé, le plus simplement du monde, de lever l’interdiction qui frappe encore et toujours les prénoms amazighs. La même interdiction que les ministres de l’intérieur successifs du régime raciste du Makhzen ont toujours niée, sans pudeur aucune, lors de leurs péroraisons prétentieusement insipides dans ce même pseudo parlement.   

La justification de cet acte pour le moins  absurde, inique et ignoble (c’est un petit énergumène du parti hautement raciste et anti-amazigh du PJD qui est chargé de nous le dire) de la part des parlementaires du Makhzen est que les prénoms amazighs se contredisent avec les recommandations de l’Islam. Rien que cela! Remarquez, ces gros amazighophobes ne voient l’Islam et ses valeurs que lorsqu’il s’agit de l’amazighité. C’est même devenu une habitude qui commence à nous taper franchement et sérieusement sur les nerfs.  

Mais l’on est quand même resté sur notre faim, car le petit minable (c’est ce qu’il est car le racisme n’est pas une opinion, mais un délit) en question ne s’est pas permis de nous donner des exemples où les prénoms amazighs seraient anti-islamiques. Pire, je présume même  que cet islamiste amazighophobe ne comprend pas un traitre mot de la langue amazighe. Comment alors peut-il savoir que les prénoms amazighs sont anti-islamiques? Franchement entre nous, en quoi Ayyur, Sifaw, Asafu, Tifawt ou Anir sont-ils anti-islamiques ?

Pour tout vous dire, les chemins de l’ignorance et de la bêtise chez cette engeance de la haine  et de l’amazighophobie sont vraiment impénétrables. En fait, toutes les raisons, même les plus pitoyables si ce n’est les plus burlesques, sont bonnes pour continuer à stigmatiser les Amazighs et leur culture. Car en fait, rien n’a changé dans notre pays colonisé par le Makhzen arabe (il faut voir juste comment il persiste et signe à défendre l’existence des cartes discriminatoires des Chorfas). Pour les parents amazighs, il faut toujours passer par la case de « l’in-justice makhzenienne » pour pouvoir inscrire un simple prénom amazigh. Plus apartheid que cela, tu meurs! 

Mais le plus absurde de tout, c’est que l’actuel ministre de l’intérieur, un certain M. Hassad, que l’on disait « amazigh » et certainement fier de l’être, a été très content de cet exploit dans la plus pure tradition makhzenienne. Si incroyable que cela puisse paraître, il  s’est littéralement félicité (il faut le voir pour le croire)  que les choses restent en l’état. En fait, pour lui et surtout ceux qui l’ont mis là où il est maintenant, il faut que les Amazighs, les vrais bien sûr, subissent continuellement et constamment de véritables chemins de croix avant que l’on veuille accepter un petit prénom amazigh dans leurs registres familiaux. Le but ultime de ce vide administratif est bien évidemment cousu de fil  blanc : dégoûter au maximum les parents pour qu’ils renoncent, enfin, aux prénoms amazighs. C’est aussi injuste que cela.

Le cas bien connu de Massin, le fils du poète Brahim Oubella, est dans toutes les mémoires. Plus récent est le scandale du petit Ayyur d’Outat Lhajj qui est resté sans prénom pendant plus de dix ans. N’eût été la mobilisation de quelques associations amazighes qui ont menacé de se plaindre auprès de l’ONU- remarquez, le régime voyou du Makhzen a toujours peur de l’ONU et des autres organisations internationales-, sa situation serait probablement resté inchangée.

Qu’on se le dise les yeux dans les yeux : jusqu’à quand, mes  frères et sœurs amazighs, devons-nous supporter éternellement ces humiliations  continuelles ? Sommes-nous sans une once de dignité pour subir encore et toujours les manigances amazighophobes de ces arriérés tout droit sortis des ténèbres les plus sombres de la préhistoire ? N’est-il pas temps de leur mettre un holà net, précis et définitif ? La balle est définitivement dans votre camps.