Ali Khadaoui n’est plus à présenter. A titre de rappel, iI a été parmi les sept mousquetaires qui ont claqué, fièrement, la porte de l’IRCAM pour protester contre toutes les entraves mises délibérément par le régime marocain contre une promotion réelle de l’amazighité. En militant infatigable, il a été parmi les personnes qui ont participé à l’élaboration d’Option amazighe, une plate-forme qui veut relancer de plus belle le débat sur l’amazighité. Nous l’avons contacté pour nous en parler !
Vous êtes membre d'un groupe de militants amazighs qui a lancé dernièrement une plate-forme appelée : option amazighe ? Pouvez-vous nous dire qui sont ces personnes ?
Les personnes qui ont lancé "Option amazighe" sont les sept démissionnaires de l'IRCAM auxquels se sont adjoints d'autres militants qui partagent avec eux les mêmes convictions et la même analyse de la situation de l'amazighité. Elles sont : Abdelmalek Oussadden , Mohamed Boudhan, Mohamed Ajaâjaâ, Ali Bougrine , Hassan Benkahia, Youssef Aâggouri, Brahim Fouguig, Mohamed Oudadess, Mohamed Kabiri, Mohamed Mounib et moi-même. Cette plate-forme est le fruit de travaux qui se sont étalés sur deux ans. Pratiquement depuis notre départ de l'IRCAM.
Pour quelle raison lancez-vous une plate-forme et pourquoi maintenant ?
essayer de combler ce que nous estimons être un vide conceptuel, référentiel (ou idéologique si vous préférez) d'une part ; clarifier un certain nombre de points restés ambigus jusqu'ici afin que la question amazighe se pose comme il se doit : dans la clarté historique, linguistique et anthropologique, mais aussi politique, économique et social, ce qui constitue en soi une rupture épistémologique dont le Mouvement Amazighe avait et a énormément besoin. Le moment a été choisi par hasard en quelque sorte. En effet, lorsque nous avons commencé les réunions en vue d'élaborer cette plate-forme, nous nous sommes fixé quelques mois, une année au maximum. Mais pour des raisons qui seront longues à expliquer, nous n'avons pas pu respecter notre calendrier. Nous avons dû reporter le lancement de cette plate-forme à plusieurs reprises pour des raisons techniques : traductions, corrections multiples, etc.
Le document est très bien écrit, il montre clairement et franchement les maux dont souffre l'amazigh et l'amazighité, mais il ne propose aucune solution ? Est-ce que c'est voulu ?
Oui, nous n'avons pas voulu mettre la charrue avant les bœufs : les Imazighen doivent être d'abord d'accord sur le diagnostic. La solution viendra elle-même : elle devra faire l'objet d'un dialogue démocratique qui dégagera une solution consensuelle capable de fédérer le maximum possible d'Imazighen qui ne sont pas " les Imazighen n sserbis". Un mémorandum n'est pas une plate-forme. Nous estimons que nous avons comblé un vide conceptuel. Mais surtout que nous avons fait un effort collectif de réflexion autour des points suivants : la conception, la stratégie, la tactique. Même si nous ne proposons pas de solution par souci démocratique, nous suggérons indirectement la solution par le ricochet de l'analyse elle-même : elle devrait logiquement aboutir à une solution concertée.
La plate-forme est donc un donc point de départ pour une réflexion plus saine sur l’amazighité...
Option Amazighe" n'est pas le Coran : c'est le résultat du travail d'un groupe de militants qui est soumis à toutes les composantes du Mouvement Amazighe aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de Tamazgha, afin que chacun donne son point de vue, face des propositions, suggère ce qu'il faudra faire afin que les Imazighen recouvrent leurs droits légitimes dans un pays où démocratie, citoyenneté, droits de l'homme et identité ne soient pas de vains mots, mais une réalité vécue quotidiennement. Ce n'est qu’à cette condition que tout Amazigh conscient de l'être puisse jouir du droit, du confort de dire " je suis".
Azetta amazigh a aussi émis dernièrement un mémorandum, la profusion de documents revendicatifs provenant des organisations et des militants amazighs est-elle réellement positive ? Car malheureusement la situation de l'amazighité est toujours la même si elle ne se dégrade pas.
Notre plate-forme n'est pas un document revendicatif, mais une autopsie de la "question amazighe". La comparaison avec Azetta -que nous respectons-n'a pas lieu d'être. Effectivement, faute d'un diagnostic sérieux, audacieux et surtout bâti sur des faits historiques et non sur des a priori, l'amazighité risque de sombrer dans l'incompréhension et la manipulation. Nous estimons avoir introduit une clarification idéologique sans laquelle les Imazighen allaient continuer à passer à côté du problème. Nous estimons que la vraie question ne réside pas dans le fait de ne pas proposer une solution, mais dans le fait de poser les vraies questions.
Vous avez dit que la plate-forme est ouverte à tout le monde, allez-vous donc organiser des tournées au Maroc ou allez-vous vous contenter de recevoir les suggestions et les idées des Amazighs ?
Nous allons organiser des tournées pour que le débat ait lieu. Mais nous accepterons volontiers toutes les remarques et suggestions surtout quand elles proviennent des militants amazighs.
Ces derniers temps les universités marocaines ont connu des violences, parfois extrêmes, entre les militants du mouvement amazigh et des éléments connus pour leur haine viscérale de tout ce qui est amazigh, qu'est-ce que vous pensez de cette situation ?
Ce qui se passe en ce moment dans les universités marocaines est le reflet du pourrissement que connaît la question amazighe dans ce pays. Les tenants du pouvoir sont responsables de la situation actuelle et à venir car ils n'ont jamais pris au sérieux les revendications des Imazighens, ils ne ressentent pas leurs souffrances multiples, ils ne respectent pas leurs aspirations légitimes : demeure eux-mêmes comme ils l'ont toujours été depuis des millénaires. Cette responsabilité est d'autant plus grave que des indices sérieux pointent du doigt les services de sécurité qui manipuleraient la mouvance "Annahj Al marhali", mouvance connue pour faire de "la violence révolutionnaire", son cheval de bataille politique. Il est maintenant établi que cette mouvance a toujours provoqué les étudiants du MCA, bien connus pour leur pacifisme, leur civisme et leur rejet de la violence. Les étudiants du MCA n'ont fait que se défendre, car ils ont toujours refusé la violence par respect des droits de chacun à s'exprimer, mais aussi parce que les valeurs amazighes pour lesquelles ils se battent interdisent l'usage de la violence. En fait, ce qui se passe au Maroc, c'est le combat entre une conception démocratique de la vie sociale prônée par Imazighen, et une conception dictatoriale pratiquée par les tenants de l'arabo-baâtisme-islamisme et toutes leurs mouvances comme ces écervelés de "Annahj al marhali". Malgré le fait qu'ils se réclament d'un marxisme désuet, ils demeurent des arabo-baâthistes notoires, car ceux qui les manipulent et les arrosent d'idéologie fasciste sont bien connus pour leur esprit saddamiste.
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