dimanche, octobre 02, 2005

Le Seigneur de guerre: mi-figue, mi-raisin

Lahsen Oulhadj
Le film raconte l’ascension fulgurante, la dernière quinzaine d’années du siècle passé, d’un marchand d’armes d’origine ukrainienne et est établi aux États-Unis. Son commencement dans le milieu a débuté en assistant, par le plus grand des hasards, à une fusillade dans un grand hôtel new yorkais. Ce qui est pour le moins léger, reconnaissons-le !

La fin du bloc de l’Est a eu pour résultante l’explosion du marché des armes, et partant, la prospérité des affaires de Yuri Ovlov, protégé hypocritement par les grandes puissances et en même temps poursuivi continuellement par un agent têtu d’Interpol, qui entraîne dans son monde terriblement tragique, son petit frère Vatali. D’ailleurs, celui-ci va en être la victime expiatoire parce que il en refuse les règles du jeu.

Une plongée adacieuse dans un monde glauque des armes est tout simplement à saluer. Mais, à mon sens, il y a quelques ratés. Primo, un moralisme trop flagrant, si ce n’est un simplisme de mauvais aloi, de bout en bout du film ; on aurait pu être un peu moins direct ! Secundo, on a usé et a abusé de duel bien/mal avec l’agent d’Interpol, qui est présent partout à tel point qu’il en devient fatigant. Enfin, manque de vraisemblance pour certaines scènes, surtout lors de l’atterrissage de l’avion de Yuri dans une savane africaine et son démantèlement, en un temps record, par les populations locales, montrées sous un mauvais jour.
En visionnant le film, on ne peut pas s’empêcher d'avoir l'amère impression qu’il renforce certains clichés de l’Africain violent, barbare et sauvage. Ce qui est dans la réalité est loin d’être vrai.

mercredi, septembre 28, 2005

Le Prince rouge prêche sa bonne parole à Montréal

Lahsen Oulhadj
"Oui, le monde arabe est dans une crise très grave. Il faut donc trouver le chemin le plus approprié pour une transition démocratique avec moins de dégâts ", tel est le leitmotiv de la conférence ayant pour thème, " crises et pistes de réformes dans le monde arabe ", animée dans une salle archi-comble de l’Université de Québec à Montréal (UQAM), par le Prince Moulay Hicham, invité ce soir par l’institut d’études politiques international de Montréal en collaboration avec l’association Espoir-Maroc et le Conseil des relations internationales de Montréal.
Dans un débit extrêmement rapide et dans un français pour le moins châtié, le Prince a fait l'état des lieux des possibilités de réforme dans le monde arabe. Selon lui, il y en a trois: la première est représentée par la mouvance Islamiste; la deuxième est celle des mouvements démocratiques locaux et la dernière est celle de l'intervention étrangère. C'est cette dernière possibilité qui a d'ailleurs fait l'objet d'une analyse très apprfondie et très tatillonne de la part du conférencier.
Il a ensuite décortiqué, avec brio, l’idéologie des néo-conservateurs américains et ses théoriciens les plus en vue (Pearl, Wolfowitz…) qui ne voient qu’une menace dans le monde arabe. Il faut donc y intervenir directement pour changer les choses de fond en comble d’où par exemple la guerre en Irak.

Ce que le conférencier considère comme une véritable catastrophe, car selon sa propre expression " au lieu de la démocratie tant attendue, nous avons eu une société en ruine et presque en guerre civile ". Or, les dirigeants américains sont loin de voir les choses sous le même angle. Car ils continuent de répéter que leur intervention a été bénéfique à tous les points de vue. La preuve, pensent-ils, des élections libres ont eu lieu pour la première fois dans ce pays.

Il a tenu à dénoncer ce qu’il a appelé l’attitude sélective de l’Occident envers le monde arabe et islamique. " D’un côté, dit- il, on soutient ouvertement les Islamistes dans certaines régions du monde; et de l’autre, on soutient les régimes pour les réprimer comme c'est le cas, respectivement, en Arabie Saoudite et en Algérie". Il s’est aussi inquiété de la montée du fondamentalisme chrétien aux États-Unis qui va de pair avec une désécularisation qui n’augure rien de bon. D’ailleurs, le parti républicain devient de plus en plus théocratique.

Quant aux Islamsites, le prince s’est prononcé clairement pour leur intégration dans le jeu politique. L’expérience turque est très intéressante à observer. Voilà un parti islamiste qui est aux commandes d’un pays laïc sans trop d’accroc avec les militaires, les gardiens du temple de Kamal Ataturk. L’expérience du Parti de la justice et du développement marocain est aussi très intéressante dans la mesure où il a fait beaucoup de concessions idéologiques pour prétendre à être un acteur politique légal.

S’il doit y avoir un changement, il faut que cela vienne de l’intérieur. Sinon, dans le cas de toute intervention étrangère, on aboutit à des scénarios à l’irakienne. Ce à quoi le prince s’oppose avec beaucoup de conviction et d’énergie. " Car une occupation est toujours inacceptable ", déclare-t-il.

Le débat, qui s’est ensuivi, a été très intéressant à tous les niveaux. Beaucoup a été dit sur le Maroc et sa transition démocratique. Une idée principale en sort, à savoir que la monarchie est inéluctable dans ce processus déterminant.Vouloir en faire abstraction serait à tous les coups un chaos indescriptible. Pour la simple raison qu'il n'y a aucune alternative crédible à cette même monarchie.
Cependant, pour que le Maroc s'en sorte, économiquement parlant, il faut impérativement, selon Moulay Hicham, réhabiliter le politique, car les gouvernements technocratiques ont montré leurs limites à trouver une quelconque solution aux problèmes du pays.

Le seul reproche qu’on peut faire à certaines personnes du public, c’est qu’à la fin, elles se sont agglutinées autour du Prince, qui pour faire une photo souvenir, qui pour lui faire un bisou, qui pour l’embrasser sur l’épaule… Décidément, certains marocains ne changeraient jamais. Il faut dire que soixante ans de culte de personnalité laisse forcément des traces.

lundi, septembre 26, 2005

Al-Jazira: dure condamnation de Tayssir Allouni

Lahsen Oulhadj

La chaîne Al-Jazira a tout naturellement réagi négativement à la condamnation à 7 ans, en Espagne, de son journaliste vedette Tayssir Allouni. Une condamnation que son porte-parole a qualifiée d’ " inique et d’une première dangereuse dans le monde du journalisme. "

Il a réitéré, à cette occasion et au nom d’Al-Jazira, son soutien indéfectible à Tayssir Allouni et assure qu’il n’aura de cesse de défendre sa " rigueur et son courage journalistique. "

L’envoyée spéciale à Madrid de la chaîne qatarie a souligné que le jugement était connu bien avant par la presse espagnole qu’elle a égratigné au passage en affirmant qu’elle a joué un rôle très négatif dans cette affaire.

Quant au chef de la rédaction d’Al Jazira, Ahmed Al-Cheikh, présent lui aussi à Madrid, il a tenu à exprimer sa profonde tristesse vis-à-vis d’un jugement qui n’a, selon lui, aucune base légale et qu’il a qualifié d’un " moment sombre dans l’histoire de l’humanité ".

L’avocat de la défense Saâd Jabbar a abondé dans le même sens en parlant d’une " première catastrophique dans l’histoire de la justice dans la mesure où elle a fondé sa lourde condamnation sur les rapports des services de sécurité qui devaient normalement ne pas être pris en compte, car non vérifiables ". Il a considéré ce jugement comme un retour en arrière en rappelant que " c’est exactement ce que faisait les régimes soviétiques. "

Il a conclu en déclarant que " c’est une véritable catastrophe pour le travail journalistique et pour Al-
Jazira ."
Reste qu'Al-Jazira ne va pas rester les bras croisés. Il va certainement faire appel.

- Selon le site Internet d'Al-Jazira -