Les Amazighs font tellement preuve de créatitivité en ce moment que l’on peut aisément assimiler cette effervescence, qui en étonne plus d’un contempteur, à une réelle movida. Elle touche presque à tous les domaines culturels et même politiques -il faut le croire. Si le cinéma est très en vogue, la musique n’est pas non plus à la traîne. On connaît Agizul, Yuba, Massinisa, Amarg Fusion, Mellal, mais un peu moins Tafsut. Cette troupe agadiroise veut, elle aussi, apporter son grain de sel à toute cette ébullition inventive. Qui s’en plaindra !
Abdellah Bouzandag, fondateur et leader du groupe, raconte son aventure avec la musique en ces termes : « Lorsque j’étais petit, je l’aimais tellement que je me suis fabriqué un petit violon que je faisais ‘’geindre’’ à longueur de journée en provoquant un boucan infernal à la maison. Ce qui bien évidemment indisposait au plus haut point mes parents qui, en désespoir de cause -car ils ne voulaient en aucun cas que je devienne musicien-, me le cachaient. Parfois excédés, ils n’hésitaient pas à me le casser. »
Mais ce n’était pas sans compter sur sa volonté de fer, car il refabriquait de plus belle son instrument rudimentaire au plus grand dam des membres de la famille. De guerre lasse, ils ont fini par lâcher du lest. En réalité, ils se sont rendu finalement compte que leur fils a à coup sûr la musique dans le sang. Autrement dit, il n’y a rien à faire. Il vaut mieux laisser faire.
Laissé enfin tranquille, notre artiste, qui a grandi à Tagant, entre Bouyzakaren et Agoulmim, mais dont la famille est originaire d’Aït Baâmran, trouvera là l’occasion d’aller de l’avant en améliorant, d’une manière autodidacte, sa vocation musicale et poétique. Commence alors l’écoute intensive du répertoire musical amazigh avec tous ses genres et toutes ses couleurs ( Izenzaren, Ousman, Ammouri M’Bark, Idir…).
Désormais, le chant fera partie de sa vie. Il lui est même consubstantiel. Il n’hésite jamais à le montrer et à prouver, en outre, qu’il a du talent, à en revendre. « Au lycée, révèle-t-il, je participais à toutes les activités culturelles de l’établissement, plus particulièrement tout ce qui a trait au théâtre et à la poésie amazighs. À chaque fois que j’en ai l’occasion, j’interprète volontiers, même à cappella, les chansons d’Izenzaren et d’Ammouri M’bark. Le public a toujours apprécié et en redemande même. »
Par la suite, vient le tour des rythmes occidentaux, la maîtrise de l’anglais aidant – il est titulaire d’une licence en lettres anglaises-. Il découvre d’autres manières professionnellement plus perfectionnées de pratiquer de la musique qu’il a souhaité appliquer à la chanson amazighe pour la sortir, autant que faire se peut, de sa quasi-léthargie. D’autant que depuis l’époque des légendaires Izenzaren et des avant-gardistes Ousman, aucun groupe du Souss n’a fait réellement preuve d’originalité. Malgré, il faut le reconnaître, quelques tentatives ici et là qui n’ont pas tardé à faire malheureusement long feu faute de persévérance et de conviction. Ce n’est que dernièrement que le renouveau est devenu une réalité tangible avec une nouvelle vague d’artistes on ne peut plus douée, sortie tout droit du giron de la mouvance amazighe.
C’était à l’Université d’Agadir que l’idée de former un groupe a vu le jour surtout que les conditions sont enfin réunies. Le mouvement culturel amazigh ( MCA), très actif à Agadir et toute sa région, y est bien évidemment pour quelque chose. « Ma rencontre avec un ami, El-Manari Abderrahman ( Dahan), guiatriste de son état, a été déterminante à tous les points de vue, s’épanche Abdellah Bouzandag, très engagé lui-même dans le militantisme amazigh. À dire vrai, c’était grâce à lui que j’ai eu ma première expérience de travail musical. Même s’il ne parlait pas le tamazight, il adorait par-dessus tout ses sonorités et ses rythmes. Résultat : nous avons pu composer plusieurs chansons dont ‘’amzruy’’, ‘’tilelli’’, ‘’amuddu’’ que nous avons interprétées lors d’une soirée organisée par les militants de la mouvance amazighe (MCA). Notre prestation a beaucoup plu à l’assistance si bien qu’elle a été en quelque sorte le déclic qui nous a poussés à penser sérieusement à la création d’un groupe musical. Ainsi, Tafsut est née en 2004. Ce qui est un peu dans la logique des choses. »
Pour quelle raison le choix est-il tombé sur Tafsut - printemps en tamazight- ? « En fait, la première fois que la troupe s’est produite devant le public c’était justement en 2004, lors de la célébration du printemps amazigh par les étudiants de l’Université d’Agadir. Une célébration qui a été d’ailleurs marquée par la répression féroce des forces de l’ordre marocaines qui voyaient d’un mauvais œil toutes les manifestations estudiantines –pacifiques il faut le préciser- qui ont eu lieu dans son sillage. En souvenir de cet événement un tantinet douleureux, nous avons décidé de baptiser notre groupe, Tafsut », explique encore une fois A. Bouzandag.
D’autres musiciens – tous étudiants-, talentueux les uns que les autres, viennent renforcer la troupe : deux guitaristes, Walid Amajerkou et Hicham Akhanchi, qui n’est que le neveu du grand musicien amazigh Ammouri M’Bark ; au clavier, c’était Mounir Eddahbi et enfin Abdlhadi Aït Lahcen qui était à la batterie et à la percussion. Le dénominateur commun de ce beau monde est qu’il est féru de la musique amazighe moderne ( Ammouri, Idir, Walid Mimoun…) et qu’il porte un intérêt plus que prononcé pour tous les genres musicaux occidentaux.
Au fur et à mesure et au grès des circonstances, d’autres membres vont le rejoindre comme Koukou Omar, Fatima Dougrame… dont quelques-uns sont partis pour un tas de raisons ( travail, raisons familiales, départ pour l’Europe…). Reste que le noyau de Tafsut est toujours là, à savoir Hicham Akhanchi, Walid Amajerkou, Mounir Eddahbi, Abdlhadi Aït Lahcen, Walid Meraghe et bien évidemment A.Bouzandag.
Tafsut a fait de l’engagement son cheval de bataille et c’est à son honneur. Il ne chante que des sujets on ne peut plus sérieux. Exit les thèmes traditionnels pour ne pas dire galvaudés ! Jugez-en : la liberté, l’histoire et l’identité amazighes, les oubliés de la guerre de libération, l’émigration clandestine... En tous les cas, tout cela est prometteur.
Quid du style ? « C’est une sorte de fusion entre les rythmes occidentaux (reggea, rock...) et amazighs dans toutes leurs richesses. C ’est une sorte de mariage heureux entre le monde amazigh et occidental. De fait, nous avons déployé de réels efforts pour avoir notre propre personnalité musicale, qui nous distingue des autres formations déjà existantes», nous confie A. Bouzandag.
En attendant de produire son premier album, que l’on espère dans les plus brefs délais (aux dernières nouvelles, on y travaille d’arrache-pied), la troupe Tafsut a animé beaucoup de soirées et pas mal de festivals que ce soit au Maroc - particulièrement dans la région du Souss- ou à l’étranger. Elle a d’ailleurs participé au Forum social méditerranéen de Barcelone en 2005, au premier festival de culture amazighe de Lille... En juillet 2004, son dynamisme est couronné par une première reconnaissance et non des moindres. Elle a réussi à décrocher le prix de la création collective organisé en marge du festival Timitar à Agadir. C’est vous dire tout le talent que recèle cette prometteuse formation amazighe. Il faut juste l’encourager.
Abdellah Bouzandag, fondateur et leader du groupe, raconte son aventure avec la musique en ces termes : « Lorsque j’étais petit, je l’aimais tellement que je me suis fabriqué un petit violon que je faisais ‘’geindre’’ à longueur de journée en provoquant un boucan infernal à la maison. Ce qui bien évidemment indisposait au plus haut point mes parents qui, en désespoir de cause -car ils ne voulaient en aucun cas que je devienne musicien-, me le cachaient. Parfois excédés, ils n’hésitaient pas à me le casser. »
Mais ce n’était pas sans compter sur sa volonté de fer, car il refabriquait de plus belle son instrument rudimentaire au plus grand dam des membres de la famille. De guerre lasse, ils ont fini par lâcher du lest. En réalité, ils se sont rendu finalement compte que leur fils a à coup sûr la musique dans le sang. Autrement dit, il n’y a rien à faire. Il vaut mieux laisser faire.
Laissé enfin tranquille, notre artiste, qui a grandi à Tagant, entre Bouyzakaren et Agoulmim, mais dont la famille est originaire d’Aït Baâmran, trouvera là l’occasion d’aller de l’avant en améliorant, d’une manière autodidacte, sa vocation musicale et poétique. Commence alors l’écoute intensive du répertoire musical amazigh avec tous ses genres et toutes ses couleurs ( Izenzaren, Ousman, Ammouri M’Bark, Idir…).
Désormais, le chant fera partie de sa vie. Il lui est même consubstantiel. Il n’hésite jamais à le montrer et à prouver, en outre, qu’il a du talent, à en revendre. « Au lycée, révèle-t-il, je participais à toutes les activités culturelles de l’établissement, plus particulièrement tout ce qui a trait au théâtre et à la poésie amazighs. À chaque fois que j’en ai l’occasion, j’interprète volontiers, même à cappella, les chansons d’Izenzaren et d’Ammouri M’bark. Le public a toujours apprécié et en redemande même. »
Par la suite, vient le tour des rythmes occidentaux, la maîtrise de l’anglais aidant – il est titulaire d’une licence en lettres anglaises-. Il découvre d’autres manières professionnellement plus perfectionnées de pratiquer de la musique qu’il a souhaité appliquer à la chanson amazighe pour la sortir, autant que faire se peut, de sa quasi-léthargie. D’autant que depuis l’époque des légendaires Izenzaren et des avant-gardistes Ousman, aucun groupe du Souss n’a fait réellement preuve d’originalité. Malgré, il faut le reconnaître, quelques tentatives ici et là qui n’ont pas tardé à faire malheureusement long feu faute de persévérance et de conviction. Ce n’est que dernièrement que le renouveau est devenu une réalité tangible avec une nouvelle vague d’artistes on ne peut plus douée, sortie tout droit du giron de la mouvance amazighe.
C’était à l’Université d’Agadir que l’idée de former un groupe a vu le jour surtout que les conditions sont enfin réunies. Le mouvement culturel amazigh ( MCA), très actif à Agadir et toute sa région, y est bien évidemment pour quelque chose. « Ma rencontre avec un ami, El-Manari Abderrahman ( Dahan), guiatriste de son état, a été déterminante à tous les points de vue, s’épanche Abdellah Bouzandag, très engagé lui-même dans le militantisme amazigh. À dire vrai, c’était grâce à lui que j’ai eu ma première expérience de travail musical. Même s’il ne parlait pas le tamazight, il adorait par-dessus tout ses sonorités et ses rythmes. Résultat : nous avons pu composer plusieurs chansons dont ‘’amzruy’’, ‘’tilelli’’, ‘’amuddu’’ que nous avons interprétées lors d’une soirée organisée par les militants de la mouvance amazighe (MCA). Notre prestation a beaucoup plu à l’assistance si bien qu’elle a été en quelque sorte le déclic qui nous a poussés à penser sérieusement à la création d’un groupe musical. Ainsi, Tafsut est née en 2004. Ce qui est un peu dans la logique des choses. »
Pour quelle raison le choix est-il tombé sur Tafsut - printemps en tamazight- ? « En fait, la première fois que la troupe s’est produite devant le public c’était justement en 2004, lors de la célébration du printemps amazigh par les étudiants de l’Université d’Agadir. Une célébration qui a été d’ailleurs marquée par la répression féroce des forces de l’ordre marocaines qui voyaient d’un mauvais œil toutes les manifestations estudiantines –pacifiques il faut le préciser- qui ont eu lieu dans son sillage. En souvenir de cet événement un tantinet douleureux, nous avons décidé de baptiser notre groupe, Tafsut », explique encore une fois A. Bouzandag.
D’autres musiciens – tous étudiants-, talentueux les uns que les autres, viennent renforcer la troupe : deux guitaristes, Walid Amajerkou et Hicham Akhanchi, qui n’est que le neveu du grand musicien amazigh Ammouri M’Bark ; au clavier, c’était Mounir Eddahbi et enfin Abdlhadi Aït Lahcen qui était à la batterie et à la percussion. Le dénominateur commun de ce beau monde est qu’il est féru de la musique amazighe moderne ( Ammouri, Idir, Walid Mimoun…) et qu’il porte un intérêt plus que prononcé pour tous les genres musicaux occidentaux.
Au fur et à mesure et au grès des circonstances, d’autres membres vont le rejoindre comme Koukou Omar, Fatima Dougrame… dont quelques-uns sont partis pour un tas de raisons ( travail, raisons familiales, départ pour l’Europe…). Reste que le noyau de Tafsut est toujours là, à savoir Hicham Akhanchi, Walid Amajerkou, Mounir Eddahbi, Abdlhadi Aït Lahcen, Walid Meraghe et bien évidemment A.Bouzandag.
Tafsut a fait de l’engagement son cheval de bataille et c’est à son honneur. Il ne chante que des sujets on ne peut plus sérieux. Exit les thèmes traditionnels pour ne pas dire galvaudés ! Jugez-en : la liberté, l’histoire et l’identité amazighes, les oubliés de la guerre de libération, l’émigration clandestine... En tous les cas, tout cela est prometteur.
Quid du style ? « C’est une sorte de fusion entre les rythmes occidentaux (reggea, rock...) et amazighs dans toutes leurs richesses. C ’est une sorte de mariage heureux entre le monde amazigh et occidental. De fait, nous avons déployé de réels efforts pour avoir notre propre personnalité musicale, qui nous distingue des autres formations déjà existantes», nous confie A. Bouzandag.
En attendant de produire son premier album, que l’on espère dans les plus brefs délais (aux dernières nouvelles, on y travaille d’arrache-pied), la troupe Tafsut a animé beaucoup de soirées et pas mal de festivals que ce soit au Maroc - particulièrement dans la région du Souss- ou à l’étranger. Elle a d’ailleurs participé au Forum social méditerranéen de Barcelone en 2005, au premier festival de culture amazighe de Lille... En juillet 2004, son dynamisme est couronné par une première reconnaissance et non des moindres. Elle a réussi à décrocher le prix de la création collective organisé en marge du festival Timitar à Agadir. C’est vous dire tout le talent que recèle cette prometteuse formation amazighe. Il faut juste l’encourager.